Anticiper la transition de l’enfant à l’adulte, évaluer régulièrement les compétences des patients, mieux connaître les modes de communication non verbale (CNV) : telles sont les recommandations qu’adresse l’Académie nationale de médecine (ANM) au secteur médical et médico-social pour la prise en charge des adolescents avec un handicap sévère.
Adolescence et handicap entraînent une double vulnérabilité chez ces jeunes, confrontés à des modifications et des ruptures de parcours de soins et de vie. Alors que cette période charnière s’étale de l’âge de 12 à 25 ans, les limites d’âge en vigueur dans le soin ne sont pas adaptées. En effet, dans les handicaps sévères, il existe un décalage entre la maturation des zones à l’origine des comportements spontanés et celles de l’adaptation à l’environnement social. L’adolescence est par ailleurs une période à risque de comorbidités (maladies chroniques, troubles psychiques et du comportement). Le minimum recommandé d’une consultation entre l’âge de 15 et 20 ans n’est le plus souvent pas suivi.
Évaluer régulièrement les capacités d’autonomie
L’ANM appelle à « anticiper et coordonner le processus de passage à l’âge adulte ». Il s’agit d’identifier le médecin référent de l’adulte « le plus précocement possible » pour construire ce nouveau parcours et garantir l’autonomie du patient. Contrairement à d’autres maladies chroniques pour lesquelles le référent est tout trouvé, c’est moins évident dans les handicaps sévères qui cumulent parfois plusieurs déficiences. Les spécialistes se multiplient sans coordination. La société savante exhorte à « amener l’offre de soins vers le jeune adulte, trop souvent laissé à son initiative ou celle de l’entourage ».
« Lorsque la transition n’est pas préparée et qu’il y a rupture du suivi, le médecin spécialisé voit en consultation un jeune adulte accompagné de ses parents », explique le Pr Alain Yelnik, rapporteur et spécialiste en médecine physique et de réadaptation (MPR) à l’hôpital Lariboisière (AP-HP). Il ajoute : « Le médecin, habitué à une relation duale avec un patient, peut avoir du mal à déterminer si la place des aidants est utile ou délétère. »
Les enfants handicapés deviendront des adultes handicapés mais, avant tout, simplement des adultes
Pr Alain Yelnik, spécialiste en médecine physique et de réadaptation
Si ces jeunes ont des points communs, la variété des situations nécessite des évaluations « précises, individuelles, complètes et répétées », lit-on dans le rapport. L’ANM fustige les soignants qui ne réévaluent que rarement les potentialités d’indépendance à l’âge adulte et souligne la minutie d’une telle analyse. « Le jeune adulte n’est vu que par ses déficiences, comme un handicapé et non une personne », déplore le Pr Yelnik. Et d’ajouter : « Les enfants handicapés deviendront des adultes handicapés mais, avant tout, simplement des adultes. »
Prendre le temps de communiquer
Que ce soit avec les patients ou entre les soignants, la communication pèche dans la prise en charge du handicap sévère. Le secret professionnel doit être partagé de manière adaptée pour ne pas créer de barrières entre les sphères médicales et médico-sociales. « Une synthèse annuelle multiprofessionnelle avec la famille, coordonnée par le médecin référent, est recommandée pendant toute la période », lit-on.
L’ANM demande d’inclure « un module d’initiation aux handicaps de l’enfant et une formation aux particularités de l’adolescence prolongée » dans les diplômes d’études spécialisées des disciplines concernées, MPR, neurologie et médecine générale. « En faculté de médecine, la question du handicap est seulement effleurée, se désole la Pr Catherine Barthélémy, coautrice et pédopsychiatre spécialiste de l’autisme. Les modes de communication non verbale et de communication alternative et améliorée sont mal connus et doivent être développés. »
La Pr Barthélémy introduit l’idée de passeport médical, « confidentiel et protégé, qui voyage avec le patient ». Cette ressource complémentaire au dossier médical partagé informerait le clinicien des caractéristiques du patient essentielles à l’accompagnement et à la prise de décision (établissements fréquentés, capacité à communiquer, troubles sensoriels).
Le Pr Yelnik déplore : « Il est plus facile pour les équipes soignantes d’aller vite avec une personne qui ne communique pas verbalement en décidant à sa place. » Or si le patient est mal compris, cela peut engendrer des troubles du comportement qui renforceront les difficultés à communiquer, formant un cercle vicieux qui entrave le soin. Le rapporteur exhorte ainsi à prendre le temps de construire une relation de confiance. La Pr Barthélémy renchérit : « À cette période, les parents s’effacent progressivement. Le regard et l’écoute des médecins sont primordiaux face à ces adolescents qui n’ont pas accès au langage parlé mais qui ont leur mot à dire. »
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