La Commission européenne a demandé fin mai aux États membres de suspendre l'autorisation d'environ 400 médicaments génériques, leur fixant un délai d'un mois – celui-ci expire lundi 24 juin. Ces médicaments couvrent un vaste éventail : anticancéreux, notamment contre la leucémie et le cancer du sein, antidiabétiques, thérapie contre l'infection au VIH, antiépileptiques, traitement de la schizophrénie… Les pays de l'UE sont inégalement concernés, selon les traitements qui y sont approuvés. La France, par exemple, est assez affectée avec 72 médicaments problématiques.
Un groupe pharma indien incriminé
Pour rappel, les génériques sont des médicaments dont la molécule de base, la substance active, est tombée dans le domaine public. Leur fabrication n'est donc plus réservée au propriétaire de leur brevet. Leur autorisation obéit à des règles moins strictes qu'un nouveau traitement. Le fabricant de génériques, tel l'israélien Teva ou le français Biogaran, ne doit pas prouver à nouveau leur efficacité clinique ou leur absence de dangerosité. Il doit juste démontrer in vitro que le médicament générique libère la même quantité de substance active que son modèle : c'est la bioéquivalence.
Or, les fabricants de génériques ne font souvent pas ces tests eux-mêmes. Ils recourent à des sous-traitants, dits « organisations de recherche sous contrat », les CRO. Et l'autorité sanitaire européenne, l'European medecine Agency (EMA), a découvert que l'un de ces groupes, l'indien Synapse Labs, ne menait pas ces tests avec la rigueur requise. « Pour la majorité des traitements testés par Synapse Labs, (...) les données manquent ou sont insuffisantes pour prouver la bioéquivalence », a résumé l'EMA en mars. Comme de nombreux producteurs de génériques recourent aux services de Synapse, le souci ne se résume pas à un fabricant de génériques mais concerne tous les principaux acteurs du secteur.
Pas de danger immédiat
Il n'y a pas de danger immédiat et les autorités sanitaires, comme les associations de patients, veillent à ne pas créer la panique. « Il n'y a pas de défaut de fabrication », a insisté auprès de l'AFP Yann Mazens, l'un des responsables de France Assos Santé, principale fédération française d'associations de patients. Mais, « on est face à des produits qui n'ont potentiellement pas la même efficacité car les études n'ont pas rempli les standards », a-t-il précisé. Et si cette moindre efficacité n'est pas prouvée en l'état, elle reste une possibilité et les patients concernés courent donc le risque d'être moins bien traités, parfois sur des pathologies graves et meurtrières.
Cependant, les autorités nationales ne vont certainement pas retirer lundi tous ces médicaments de marché. D'abord, parce que certains fabricants de ces génériques ont déjà refait des tests et prouvé la bioéquivalence de traitements sur la liste. Ensuite, et surtout, la Commission européenne a laissé une large marge de manœuvre aux États pour ne pas immédiatement retirer des traitements irremplaçables pour les patients.
Pas d’ordre de grandeur sur les retraits
« Ces médicaments critiques sont ceux qui auraient de grosses parts de marché ou n'auraient pas d'alternative thérapeutique », a souligné l'agence française du médicament, l'ANSM, interrogée par l'AFP. Dans ce cas, Bruxelles laisse jusqu'à deux ans de délai aux États pour finalement retirer un traitement, au cas où des données probantes n'auraient toujours pas été fournies par le fabricant.
L'ANSM, qui se prononcera ce lundi 24 juin, mais ne communiquera pas publiquement, dans l'immédiat, se refuse pour l'heure à donner tout ordre de grandeur sur le nombre de retraits immédiats. De même, en Allemagne, autre pays concerné pour de nombreuses références de traitements, l'Institut fédéral des médicaments et des dispositifs médicaux s'est abstenu de se prononcer auprès de l'AFP.
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