L’Académie des sciences a publié le 25 mars 2025 un rapport réalisant l’état des lieux des connaissances sur les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), les polluants éternels. Face à une pollution « d’une complexité inédite », ce document établit un panorama des connaissances actuelles sur les PFAS et leurs limites, visant par ailleurs à trier les éléments scientifiques avérés et ceux non établis. L’Académie émet cinq recommandations concernant cette classe de molécules.
Dans le rapport, les experts rappellent que l’exposition aux PFAS peut survenir au cours des différentes étapes de leur cycle de vie et que tous les milieux sont concernés : atmosphère et air ambiant, masses d’eau, eaux de boisson et d’alimentation. Leur présence, souvent en mélanges et en très faibles concentrations, rend leur séparation et donc leur recyclage impossible.
L’Académie préconise d’éviter tant que possible les usages non essentiels comme les cosmétiques et textiles (une loi adoptée en France le 20 février 2025 vise à interdire la fabrication et la mise sur le marché de certains d’entre eux) et, pour ceux incontournables (ex : mousse anti-incendie), de les substituer dès que possible.
Pour autant, l’Académie avertit : « la substitution n’est pas une solution exempte de problèmes », citant l’exemple du PFOA interdit dans l’Union européenne en 2009, remplacé par d’autres PFAS. De plus, certaines de ces molécules n’ont pas encore d’alternatives viables pour des usages essentiels (transition énergétique, santé et protection). « Tout porte à considérer que l’on ne puisse pas, à court terme, se passer de PFAS », expliquent les experts. Et d’appeler à ce que la réglementation ne se contente pas de fixer des valeurs seuils de concentrations mais impose un suivi du cycle de vie des substances, de leur synthèse jusqu’à leur devenir dans l’environnement.
Des valeurs limites, sans réelle base de connaissances
Les experts font un gros plan sur le TFA (acide trifluoroacétique) qui « mérite une vigilance particulière » puisqu’il est actuellement considéré comme le plus petit PFAS connu. Il est le plus répandu et abondant dans l’environnement mais n’a pas été intégré à la liste européenne des 20 PFAS préoccupants. Néanmoins, au vu de plusieurs études mettant en lumière son effet sur le foie et la reproduction, « il paraît nécessaire de prendre des mesures pour réduire ses émissions ainsi que celles de ses précurseurs », indique le rapport. Certains pays européens l’ont réglementé (valeur seuil autorisée dans l’eau) mais pas encore la France.
D’ailleurs, pour l’ensemble des PFAS, l’Europe a défini comme dangereuse une concentration de 100 ng/L dans l’eau de consommation mais plusieurs pays plaident pour abaisser cette limite. En effet, « il n’existe pas à l’heure actuelle de seuils qui permettent, sur la base des valeurs d’imprégnation, de définir un risque sanitaire pour la personne et les modalités de prise en charge », explique l’Académie.
Traçabilité, contrôle et plan de recherche
L’institution enjoint avant tout à la transparence : « La traçabilité des PFAS doit devenir la règle. » En effet, malgré leur omniprésence, le rapport pointe qu’ils sont rarement indiqués sur l’étiquetage des produits utilisés au quotidien et demande « une traçabilité stricte », similaire aux obligations de déclaration des ions dans les eaux minérales. Les consommateurs pourront ainsi prendre une décision éclairée et se diriger vers des alternatives moins nocives s’ils le souhaitent.
La deuxième recommandation concerne le contrôle du rejet des substances dans l’environnement. L’Académie demande son interdiction stricte, « en particulier en aval des sites de production industrielle ». Elle argue que le faible nombre de sites, « un contrôle pourrait être mis en place efficacement et rapidement ».
Dans ses dernières préconisations, l’Académie exhorte à mener de grands programmes de recherche. En premier lieu, il s’agit d’acquérir de nouvelles connaissances scientifiques sur les PFAS (détection, caractérisation, évaluation des effets). « Un levier primordial » pour établir les priorités en matière de substitution (en particulier pour les industries liées à la transition énergétique) et de méthodes de remédiation (élimination des milieux contaminés).
Les experts appuient la nécessité d’un « effort accru dans plusieurs champs de recherche en santé et environnement : chimie analytique, toxicologie, épidémiologie, modélisation et sciences de l’environnement entre autres ». À travers ce rapport sur les PFAS, l’Académie des sciences souligne « l’importance d’une approche plus large des expositions chimiques ».
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