Le SARS-CoV-2 pourrait provoquer des troubles de l’audition, et en particulier une perte d’acuité auditive soudaine. C’est ce que suggère un "case report" publié par le British Medical Journal (BMJ) au mois d’octobre. Dans cet article, trois médecins londoniens rapportent avoir pris en charge un patient présentant à la fois une perte auditive brutale et une forme grave d’infection par le SARS-CoV-2.
Ce patient était un homme de 45 ans, asthmatique mais sans antécédent de surdité ou de pathologie auriculaire, qui 10 jours après des premiers signes de Covid-19, a développé une détresse respiratoire aiguë, racontent les médecins. L’homme aurait donc été hospitalisé en réanimation et intubé pendant 30 jours, au cours desquels il aurait notamment reçu du remdésivir et des corticoïdes, mais « aucun médicament ototoxique », précisent-ils. C'est une semaine après avoir été extubé qu'il aurait finalement signalé souffrir « d’acouphènes du côté gauche et d’une perte soudaine de l'audition ».
Devant l’absence d’étiologie claire possible, les auteurs ont en effet « postulé » que cette surdité d’apparition brutale « pouvait être liée au Covid-19 ». Si le rôle du SARS-CoV-2 dans l’apparition de la surdité apparaît donc ici seulement hypothétique, quelques autres cas de pertes d’audition chez des patients Covid + auraient cependant été décrits ailleurs dans le monde, chez des individus sévèrement touchés par le coronavirus comme chez des personnes asymptomatiques. Une étude égyptienne menée auprès de 20 patients Covid + asymptomatiques aurait en particulier évoqué chez ces individus des atteintes cochléaires liées au Covid-19.
Le stress cellulaire et le récepteur ACE2 mis en cause
« Des virus capables de provoquer des pertes d’audition ont déjà été décrits », rappellent les auteurs de l’étude, qui citent en particulier les herpesvirus ainsi que le cytomégalovirus. « Les oreillons seraient responsables de 3 % des surdités brusques », et d’autres virus tels que la rubéole, la varicelle, la grippe ou la rougeole engendrent parfois également des pertes auditives, indique par ailleurs l’AP-HM sur son site internet.
Dans le cas du SARS-CoV-2, les auteurs du BMJ ont tenté de trouver une explication à ce phénomène « encore incomplètement exploré à l’heure actuelle ». À l’issue d’une brève revue de la littérature, ils évoquent en particulier deux types de mécanismes physiopathologiques.
« Des études histopathologiques des patients [présentant de tels troubles] ont montré une perte de cellules ciliées et de cellules de soutien de l'organe de Corti sans infiltrat de cellules inflammatoires », rapportent les médecins. Le SARS-CoV-2 provoquant une sécrétion intense de cytokines et d’autres molécules inflammatoires, ces dernières pourraient entrer directement dans la cochlée et être « impliquées dans la persistance perte auditive neurosensorielle ».
De plus, ces surdités pourraient être causées directement par la liaison du SARS-CoV-2 au récepteur ACE-2. « Il a [en effet] été récemment observé que [ce récepteur] est exprimé par les cellules épithéliales de l’oreille moyenne », indiquent les auteurs.
Un appel au dépistage des troubles auditifs
Le traitement administré au patient anglais a consisté en une corticothérapie administrée orale puis intra-tympanique. Ces médicaments auraient permis une restauration en tout cas partielle de l’ouïe.
L’efficacité de ces traitements dépendant de la précocité de l’administration, dépister des troubles de l’audition post-covid, « qui peuvent facilement rester ignorés en réanimation », pourrait, d’après les auteurs, offrir aux patients « les meilleures chances de retrouver l’ouïe ». Même si des études complémentaires doivent être menées sur ce sujet encore méconnu, ils préconisent ainsi de rechercher plus systématiquement d'éventuelles surdités chez les patients infectés par le SARS-CoV-2.
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