C'est une première mondiale porteuse d'espoir pour les personnes ayant perdu l'usage d'un œil : des chirurgiens américains ont annoncé ce 9 novembre avoir réalisé la première greffe d'un œil complet sur un patient, qui n'a toutefois pas (encore) recouvré la vue.
Un peu plus de cinq mois après l'opération, l'œil du patient montre des signes de très bonne santé, y compris un flux sanguin jusqu'à la rétine. Des résultats qui laissent les experts « stupéfaits », a déclaré lors d'une conférence de presse le Dr Eduardo Rodriguez, le chirurgien plasticien qui a dirigé la procédure.
« Il y a des millions d'individus qui ont perdu la vue, et nous n'affirmons pas que nous allons résoudre cela aujourd'hui », a déclaré le chirurgien. « Mais nous en sommes sans aucun doute un peu plus près ». L'opération a duré environ 21 heures, et a été réalisée fin mai par une équipe de l'hôpital universitaire new-yorkais NYU Langone Health.
Le patient receveur, Aaron James, a été victime en 2021 d'un accident du travail qui aurait pu lui coûter la vie, son visage ayant alors touché une ligne électrique à haute tension. En plus de l'œil gauche et de son orbite, les chirurgiens ont greffé le nez, les lèvres et d'autres tissus du visage prélevés sur un donneur. Autant d'opérations qui nécessitent la prise d'immunosuppresseurs et font de cet ancien militaire un candidat idéal pour tenter la greffe d'un œil.
Le défi de reconnecter l'œil au cerveau
Aaron James, dont l'œil droit fonctionne toujours normalement, est apparu durant la conférence de presse à visage entièrement découvert, son œil gauche fermé sous sa paupière (qu'il ne peut encore bouger naturellement). « Que je puisse voir ou non, c'est comme ça », a-t-il dit, en remerciant le donneur et sa famille. « Il faut commencer quelque part, et j'espère que cela va initier quelque chose que l'on pourra améliorer pour le prochain patient. »
L'œil greffé retrouvera-t-il la vision par la suite ? « En médecine, on n'aime jamais dire jamais », a répondu la Pr Vaidehi Dedania, spécialiste de la rétine à NYU Langone Health. « Nous allons continuer à le suivre et voir comment les choses évoluent. Mais nous avons beaucoup d'espoir. » Une grande partie de la rétine est préservée. « Nos tests montrent qu'elle est capable de générer un signal », a-t-elle détaillé.
Une équipe a été formée en urgence pour explorer les différentes pistes qui pourraient permettre de rétablir la vue. La principale difficulté d'une greffe d'œil est d'arriver à rétablir la transmission d'informations vers le cerveau via le nerf optique. Celui-ci est en effet coupé chez le patient comme chez le donneur pour réaliser la greffe.
Cellules souches
Par le passé, des greffes d'yeux entiers avaient déjà été réalisés sur de petits animaux, dont la vision a au moins partiellement été restaurée dans certains cas, a expliqué la chirurgienne Kia Washington, qui travaille depuis 10 ans sur cette problématique à l'Université du Colorado.
Mais réussir à y parvenir chez l'humain réclamera de combiner « beaucoup de méthodes différentes », selon elle. Parmi celles citées par la spécialiste comme de futures pistes : la thérapie génique, l'utilisation de cellules souches, ou encore la préparation du cerveau du receveur via des stimulations électriques.
Dans le cas d'Aaron James, des cellules souches issues de la moelle épinière du donneur ont également été injectées dans le nerf optique du patient, dans l'espoir d'améliorer sa régénération. Sa greffe est « une énorme avancée », insiste la Pr Washington : « Tellement de gens doutaient encore que ce soit possible chez l'humain. »
Sera-t-il possible d'un jour donner la vue à une personne aveugle de naissance grâce à une greffe ? Il s'agit d'un horizon encore lointain, répond Kia Washington. Mais « je pense que oui, cela arrivera dans les décennies qui viennent. »
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