Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) touche près d’une femme sur 10 et est la première cause d’infertilité féminine. Les mécanismes de cette maladie restent pourtant méconnus. Une nouvelle étude, publiée dans International Journal of Molecular Sciences le 24 novembre 2023, éclaire le rôle joué par l’œstradiol, une hormone produite dans les cellules de la granulosa puis libérée dans le liquide folliculaire où elle favorise le développement folliculaire et l’ovulation. Chez les femmes ayant un SOPK, les follicules semblent insensibles à cette hormone, selon les résultats de cette étude française, ce qui expliquerait l’accumulation de follicules immatures dans les ovaires des patientes.
L’étude a été menée sur 27 patientes ayant un SOPK, en surpoids mais sans hyperandrogénie, avec une comparaison à 54 femmes contrôles. Les chercheurs ont observé que la concentration de l’œstradiol dans les cellules de la granulosa était la même pour toutes les femmes, atteintes ou non du SOPK. « L’hormone est donc biosynthétisée de façon normale, décrit Stéphanie Chauvin, chargée de recherche Inserm dans l’équipe Physiologie de l’axe gonadotrope. Ce qui va à l’encontre de l’idée qu’on avait d’une mauvaise production de l’œstradiol au sein des cellules de la granulosa. »
Une dégradation de l’œstradiol dans le liquide folliculaire
Dans le liquide folliculaire, en revanche, les concentrations en œstradiol et en progestérone étaient bien inférieures aux concentrations mesurées chez des femmes qui n’ont pas ce syndrome. Pour la progestérone, elle est moins bien synthétisée dans les cellules de la granulosa, ce qui explique sa concentration faible dans le liquide folliculaire. En revanche, il semblerait que l’œstradiol soit dégradé au niveau du liquide folliculaire. Une des pistes avancées par Stéphanie Chauvin serait l’implication de protéines de protection telles que la SHBG, qui a été dosée dans le cadre de l’étude et dont la concentration est moins élevée chez les femmes atteintes de SOPK. « Mais nous ne pouvons pas encore conclure à un lien significatif entre ces deux observations », nuance-t-elle.
D’autre part, les chercheurs ont noté que l’œstradiol n’a pas d’effet rétroactif sur les cellules de la granulosa des patientes atteintes du SOPK. En observant certaines de ces cellules, récupérées avec l’accord des patientes puis mises en cultures et traitées avec de l’œstradiol, « nous avons constaté qu’elles étaient incapables d’induire l’expression d’une dizaine de gènes chez les femmes avec SOPK. Les cellules semblent insensibles. Les récepteurs sont bien présents mais semblent inactifs », explique Stéphanie Chauvin. La voie de signalisation intracellulaire activée par cette hormone semble bloquée, explique-t-elle dans le communiqué de presse associé à la publication. Les raisons sont encore à découvrir.
De nombreuses pistes restent à explorer
Elle émet une hypothèse, en prenant de grandes pincettes : « Pour que les récepteurs de l’œstradiol fonctionnent, ils nécessitent des coactivateurs qui sont les mêmes que pour les récepteurs d’hormones androgènes. Or les femmes atteintes de SOPK ont un nombre important de ces récepteurs. Il pourrait donc y avoir une compétition et les récepteurs de l’œstradiol n’auraient plus accès à ces coactivateurs ».
Une autre piste lui semble pertinente à étudier : les exosomes dans le liquide folliculaire, dont la composition est différente entre les femmes avec et sans SOPK, ont sûrement, selon elle, un lien avec les observations issues de son étude.
La chercheuse indique avoir commencé une nouvelle étude chez les femmes obèses atteintes de SOPK. « Est-ce que l’obésité est un facteur aggravant ou un élément moteur de la maladie ? », questionne-t-elle. Le SOPK n’a pas encore livré tous ses secrets.
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