Qui sont exactement les enfants les plus à risque de bronchiolite sévère ? Telle est la question à laquelle propose de répondre une vaste étude scandinave publiée dans le Lancet Digital Health ce mois de novembre, alors que l'épidémie de bronchiolite s'étend en France, et touche désormais six régions en métropole (deux de plus que mi- octobre) et trois en Outre-mer.
« Les infections à VRS sont la cause principale de (…) morbidité, d’hospitalisations et de décès chez les jeunes enfants dans le monde entier », rappellent les auteurs du présent travail. Et si la prophylaxie a récemment marqué des progrès avec l’arrivée du nirsévimab (Beyfortus), les chercheurs estiment qu'identifier les enfants à risque de forme sévère de bronchiolite reste un enjeu important, notamment pour cibler au mieux les patients éligibles au traitement. Car l’accès à cet anticorps monoclonal anti-VRS à longue durée d’action théoriquement indiqué chez tous les nouveau-nés et nourrissons au cours de leur première saison de circulation du virus reste en pratique limité dans divers pays. Ainsi, en France, les sociétés savantes de pédiatrie faisaient état, le mois dernier, de tensions d’approvisionnement imposant de « restreindre pour l'instant les injections aux enfants les plus à risque de formes graves et réanimatoires de bronchiolite ».
Une étude conduite sur plus de 2,7 millions d’enfants
Problème : identifier les enfants concernés reste difficile. Certes, certains facteurs de risque ont déjà été décrits, à l’instar de l’âge (moins de 6 mois), de la prématurité ou de malformations cardiaques congénitales sévères. Cependant, « l’effet combiné des prédicteurs d’admission à l’hôpital est mal compris, et peu d’études ont évalué et comparé un large panel prédicteurs », déplorent les auteurs.
Ainsi, cette équipe finno-suédoise a décidé de se repencher sur les facteurs de risque d’hospitalisation pour bronchiolite grave, et de développer un algorithme prédictif utilisable en pratique clinique.
Pour ce faire, les chercheurs se sont appuyés sur les registres nationaux de santé de Finlande et de Suède. Plus précisément, les données concernant la première année de vie de 2,71 millions de nourrissons nés entre 1997 et 2020 en Finlande ou entre 2006 et 2020 en Suède ont été analysées.
De nouveaux facteurs de risque identifiés
Résultat, l’étude confirme le poids de certains facteurs de risque déjà pointés : âge au pic épidémique, présence d’autres enfants de moins de 4 ans dans la fratrie, prématurité. « Par exemple, les enfants âgés de 2 mois au pic épidémique présentaient un risque 5,3 fois plus élevé d'hospitalisation pour le VRS que ceux âgés de 11 mois au moment du pic », illustrent les auteurs.
Mais ce travail remet aussi en cause le poids de certaines comorbidités fréquemment citées comme des facteurs de risque. « La dysplasie bronchopulmonaire (pourtant mentionné par la HAS dans ses recommandations, ndlr) n’augmentait pas le risque dans les présentes modélisations », affirment à ce titre les chercheurs, évoquant un odds ratio (OR) de 0,74.
Surtout, cette étude suggère que des facteurs de risque classiquement moins cités parmi les éléments les plus péjoratifs en cas d’infection à VRS seraient en fait déterminants, à l’instar des malformations œsophagiennes (OR = 3,11), ou d’antécédents familiaux d’asthme. À noter par ailleurs que si les malformations cardiaques congénitales significatives sur le plan hémodynamique comptent bien parmi les facteurs de risque majeurs d’hospitalisation (OR = 2,89), « nous avons aussi identifié comme des facteurs prédictifs importants des malformations cardiaques congénitales de moindre complexité (OR = 1,43) », indiquent les auteurs. Autres facteurs de risque identifiés : les antécédents familiaux de maladie mentale ou d’addiction aux substances et faibles revenus familiaux.
Un calculateur de risque en ligne
Au total, les auteurs proposent un algorithme et un calculateur de risque prenant en compte les principaux facteurs de risque d’hospitalisation identifiés – à l’exception des antécédents familiaux de maladie mentale et d’addictions, et des revenus familiaux, difficiles à déterminer en contexte clinique. Pour convaincre de la pertinence de leur outil, les chercheurs avancent que « pour les 10 % de nourrissons (…) présentant le risque prévu d'hospitalisation pour le VRS le plus élevé, le risque d'admission observé était 3,3 fois plus élevé (7,3 % contre 2,2 %) par rapport à tous les nourrissons ».
Augmentation de l'activité liée à la bronchiolite chez les moins de deux ans
Entre le 23 et le 29 octobre, l'activité liée à la bronchiolite « était toujours en augmentation en médecine de ville et en milieu hospitalier chez les enfants de moins de deux ans », résume le dernier bilan hebdomadaire de Santé publique France.
Le Centre-Val de Loire et le Grand Est sont désormais passés en phase épidémique, rejoignant en métropole la Bretagne, l'Île-de-France, la Normandie et les Pays de la Loire. Outre-mer, la Guadeloupe, la Martinique, et la Guyane restent en phase épidémique.
Chez les moins de deux ans, 3 189 passages aux urgences pour bronchiolite ont été enregistrés, soit 13 % des passages dans cette classe d'âge (versus 10,5 % la semaine précédente). Le nombre d’hospitalisations après passage aux urgences pour bronchiolite était de 1 042 (soit 27,6 % des hospitalisations versus 23,7 % mi-octobre). Des niveaux toutefois inférieurs à ceux de l'an dernier à la même date.
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