Comme chaque été, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) publie une édition actualisée de ces recommandations sanitaires pour les voyageurs destinées aux professionnels de santé : médecins, mais aussi infirmiers, sages-femmes et pharmaciens. Quelques nouveautés ont été ajoutées par rapport à 2022, en particulier concernant le paludisme ou la leptospirose.
Au chapitre des vaccinations, le HCSP rappelle que depuis le 7 novembre 2022, les pharmaciens et les infirmiers sont autorisés à vacciner, sur prescription médicale, les personnes de 16 ans et plus, contre 14 maladies : diphtérie, tétanos, poliomyélite, coqueluche, hépatite A, hépatite B, infections invasives à pneumocoque, infections invasives à méningocoques A, C, W, Y et B, rage et papillomavirus.
Un point sur la leptospirose a été ajouté. Cette maladie est particulièrement fréquente dans les pays en zone tropicale lors d’activités en eau douce, d’activités agricoles (pisciculture) et en ville par contact direct avec de l’urine de rat infectée. « Le voyageur, dont la durée de séjour est par nature limitée, s’il a une activité de loisirs en eau douce peu intense, est de fait peu exposé », précise le HCSP, qui ne recommande pas une vaccination systématique. Cependant, une vaccination chez l'adulte avec le vaccin Spirolept est préconisée « si le sérovar Icterohaemorrhagiae circule dans la région donnée, en l’absence de mesures de protection, lors de la pratique régulière d’activités en eau douce, en contacts fréquents avec les lieux infestés par les rongeurs ».
L'épidémiologie de la méningite A fortement modifiée en Afrique subsaharienne
Pour ce qui est de la grippe saisonnière, la vaccination reste recommandée pour les personnes ciblées par les recommandations en vigueur, en particulier pour les touristes ou le personnel participant à un voyage en groupe ou en bateau de croisière. Le vaccin vivant atténué intranasal Fluenz Tetra vient compléter l'arsenal vaccinal et peut être utilisé chez les 2-17 ans révolus. « La disponibilité de ce vaccin sera à vérifier pour la campagne de vaccination 2023 », précise le HCSP, alors qu'il n'était pas encore disponible en mai.
De nouveaux pays ont par ailleurs été ajoutés à la liste des pays pour lesquels la vaccination antiamarile contre la fièvre jaune est recommandée. Il s'agit de Djibouti, des Philippines et du Qatar. En revanche, pour le Belize, l'Irak, la Géorgie du Sud-et-les Îles Sandwich du Sud, la Jordanie, le Kosovo et l'Uruguay, elle n'est plus recommandée.
Pour les infections invasives à méningocoque, le HCSP souligne que l’introduction du vaccin conjugué de sérogroupe A MenAfriVac entre 2010 et 2020 a fortement bouleversé l’épidémiologie de la méningite A en Afrique subsaharienne, en réduisant « de façon spectaculaire l’incidence des infections invasives ».
Concernant le Covid, le HCSP invite à consulter la rubrique « Conseils aux voyageurs » du site du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Et pour la poliomyélite, la liste des pays où circulent les poliovirus sauvages et ceux dérivés de souches vaccinales est à consulter sur le site polioeradication.org.
La chimioprophylaxie antipaludique pas systématique en Asie
Le paludisme fait l'objet de deux chapitres. La situation est relativement stable depuis 2015 à l'échelle mondiale en termes de nombre de cas et de décès. En France, 98 % des contaminations ont lieu en Afrique subsaharienne. « Un des principaux facteurs de risque des formes graves (14 % de cas) et de décès du paludisme demeure le retard au diagnostic, souvent lié à une prise en soin inadaptée des patients lors d’une première consultation », estime le HCSP, soulignant l'importance « de prescrire une prévention adaptée ».
La prévention repose principalement sur le recours à des répulsifs cutanés et à une moustiquaire imprégnée d’insecticide la nuit. La chimioprophylaxie antipaludique - atovaquone-proguanil et doxycycline sont à privilégier - est toujours recommandée pour les séjours en Afrique subsaharienne, quel que soit le profil des voyageurs. En revanche, en Asie et en Amérique tropicale, où la transmission a significativement baissé, la prescription n'est pas systématique. La balance bénéfice/risque est à évaluer au regard du type de séjour et du pays. « Pour la première fois, des cartes OMS traduisant le niveau d’incidence du paludisme au sein des populations autochtones sont mises à disposition, note le HCSP. Elles sont une aide à la décision bien que le risque soit différent et le plus souvent plus faible pour le voyageur. »
Le HCSP préconise de porter « une attention particulière à la prévention du paludisme d’importation chez les personnes issues de l’immigration retournant au pays pour visiter leurs proches car ce sont elles qui en payent le plus lourd tribut ». L'agence sanitaire rappelle aussi qu'il est essentiel d'informer les voyageurs de l’importance de consulter sans délai en cas de fièvre dans les trois mois après le retour. Enfin, le HCSP estime que les freins financiers sont à aborder avec les patients pour prioriser les approches.
L’azithromycine en première intention pour la diarrhée du voyageur en Asie
Plusieurs autres thématiques sont mises en avant par le HCSP dans cette nouvelle édition. Concernant la diarrhée du voyageur et autres risques liés au péril fécal, les indications et modalités de l’antibiothérapie curative présomptive ont été actualisées. « L’azithromycine est le traitement de première intention, en particulier dans les syndromes dysentériques et les diarrhées graves non dysentériques au cours ou au décours d’un séjour en Asie », est-il précisé.
Quant à la mélatonine en prévention des effets du décalage horaire, le HCSP précise qu'il n’y a pas de bénéfice apparent à prendre des doses supérieures à 5 mg et que « le bénéfice semble plus important si le décalage horaire est de plus de cinq heures et pour les déplacements vers l’Est ». Des précautions sont à prendre chez les personnes souffrant d'épilepsie et certaines interactions médicamenteuses sont à prendre en compte, notamment pour les anti-vitamine K comme la warfarine. L’administration préventive de mélatonine deux à trois jours avant le départ ne fait en revanche pas consensus.
La partie consacrée à la pollution atmosphérique a aussi été enrichie. Il y est préconisé de se renseigner sur les niveaux de pollution en fonction de la saison et de la localité, à partir des sites internet des pays considérés et des consulats français ou de consulter la page de l’OMS sur la qualité de l’air.
Le HCSP alerte par ailleurs sur l'ichtyosarcotoxisme (ciguatera), une intoxication alimentaire liée à la consommation de poissons de récifs contaminés par une neurotoxine (la ciguatoxine) produite par une microalgue proliférant sur des substrats coralliens dégradés. Le HCSP recommande en prévention d’éviter de consommer des poissons prédateurs et de se renseigner auprès des pêcheurs/poissonniers/restaurateurs locaux sur l’origine des poissons que l'on n'a pas l'habitude de consommer. La consommation de viscères, de foie et de tête de poissons est à éviter dans les zones à risque.
Des recommandations détaillées pour les publics vulnérables
Les précautions générales à prendre pour les personnes atteintes d’affections chroniques, les enfants, les femmes enceintes ou allaitantes et les personnes âgées sont largement détaillées. Le HCSP recommande fortement à ces publics de disposer d’une assurance rapatriement/frais d’hospitalisation couvrant l’ensemble des risques et la zone géographique concernée.
Les personnes souffrant d'affection chronique doivent impérativement consulter leur médecin pour préparer et adapter leur voyage. Pour les enfants, des spécificités sont présentées selon l'âge et d'éventuelles pathologies. Et « la décision de voyager durant la grossesse doit être réfléchie en raison d’une exposition possible à des risques accidentels ou infectieux », estime le HCSP. Quant aux plus de 65 ans, étant donné le risque accru de maladies chroniques, une consultation avec le médecin traitant est aussi recommandée avant le départ.
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