Suivre à distance la glycémie d’une femme atteinte de diabète gestationnel, les effets indésirables d’une chimiothérapie ou un patient implanté cardiaque… Depuis 2014, la télésurveillance était expérimentée en France dans le cadre du programme ETAPES et, pour l'heure, remboursée pour cinq pathologies seulement. L'exécutif a décidé de changer de braquet. À partir du 1er janvier, le suivi à distance des malades chroniques entrera dans le droit commun, à la faveur de l’article 26 du projet de loi de financement de la Sécu (PLFSS 2022).
« Nous proposons de généraliser la télésurveillance pour qu'elle soit prise en charge par l'Assurance-maladie, quelle que soit la pathologie dont souffre le patient, et quand un dispositif médical permet de récolter des données cliniques ou de mieux organiser les soins, détaille le ministère de la Santé. Le professionnel de santé sera rémunéré pour analyser les données ou rappeler son patient si besoin ». Objectif du gouvernement : « créer un lien médical qui n’existe pas dans certaines zones, et agir plus rapidement en cas d’alerte ».
Rémunération forfaitaire
Pour impliquer la médecine de ville dans le suivi à distance des pathologies chroniques, le PLFSS prévoit une rémunération forfaitaire des « organisations de télésurveillance ». Des organisations qui pourront « regrouper des professionnels de santé exerçant en libéral, ou au sein d’un établissement de santé, d’un centre de santé, d’une maison de santé pluri professionnelle, ou d’un établissement ou un service médico-social. Lorsque des indications le permettent, elle peut être constituée d’un seul professionnel de santé médical », précise le projet de loi que « Le Quotidien » s'est procuré. En pratique, un praticien qui souhaiterait bénéficier du remboursement de ses activités de télésurveillance par le régime obligatoire devra se déclarer au préalable à son agence régionale de santé (ARS).
Si le montant de la rémunération allouée reste à définir par arrêté, le PLFSS précise déjà qu’elle s’effectuera « sur une base forfaitaire périodique, le cas échéant modulable en fonction des caractéristiques de la prise en charge ». Un forfait qui tiendra compte, entre autres, de la fréquence du suivi réalisé ou de sa complexité. Autre précision : la rémunération sera subordonnée « à l’utilisation effective du dispositif médical numérique par le patient ».
Lors du programme ETAPES, la rémunération était déjà versée sur une base forfaitaire, complétée souvent d’une prime de performance. À titre d'exemple, pour le télésuivi d’une insuffisance cardiaque, le forfait pour le professionnel de santé est fixé à 110 euros par patient et par semestre, auxquels s’ajoutent 110 euros de paiement à la performance par patient et par an, pour un objectif de baisse de 20 % des hospitalisations pour insuffisance cardiaque.
Quelque 22 millions d’euros seront alloués en 2022 au remboursement de la télésurveillance, « et plus de 44 millions en 2023. Nous nous adapterons ensuite en fonction de l’offre et la demande », souligne le ministère.
Généralisation en douceur
Pour être éligibles à un remboursement à partir du 1er janvier, les dispositifs médicaux (DM) connectés devront avoir fait la preuve de leur intérêt clinique et correspondre aux référentiels de la Haute Autorité de santé (HAS).
Pour l’heure, seuls deux dispositifs de télésurveillance sont inscrits dans la LPPR (liste des produits et prestations remboursables). Le suivi à distance des pacemakers d’abord, mais également Moovcare, une appli de suivi des risques de récidive de cancers du poumon. En réalité, « les dispositifs qui sont déjà remboursés, dont ceux du programme ETAPES, le seront toujours », précise le ministère. Courant 2022, de nouveaux DM devraient rejoindre la liste « même s’il est impossible de prédire combien obtiendront un remboursement ».
Pour éviter que les délais de remboursement s’éternisent, le PLFSS prévoit une mesure de prise en charge transitoire d’un an de ces dispositifs. Par ailleurs, après les annonces d’Emmanuel Macron dans le cadre du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS), 650 millions d’euros devraient être consacrés à la santé numérique, dont 100 millions d’appels à manifestation d’intérêt, pour aider les industriels à mettre en place des essais cliniques.
En lien avec la stratégie Paris Santé Campus, Olivier Véran s’est rendu ce lundi dans les locaux de l’Hôtel-Dieu (AP-HP), précisément pour échanger avec six start-up de suivi à distance. Le gouvernement souhaite faire du CHU francilien « un incubateur, pour offrir aux start-up un terrain de jeu : qu’elles construisent leur innovation au plus proche des besoins des professionnels de santé », indique Ségur. L'objectif est que les établissements hospitaliers investissent directement dans ces DM connectés pour répondre plus rapidement aux besoins médicaux des patients.
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