Le DMP a-t-il un réel avenir ?

Publié le 03/12/2018

À l’initiative de notre ministre de tutelle, et sous la responsabilité du directeur de la CNAM, le chantier DMP va être relancé. Le DMP a fait couler beaucoup d’encre et de millions d’euros depuis de nombreuses années. Or jusqu’à présent quelques tentatives de développement ont conduit à un « succès très limité ».

Dire que les professionnels de santé sont vent debout contre cette nouvelle « donne » est tout à fait faux pour plusieurs raisons. Le DMP permettrait de réduire les examens redondants qui sont souvent effectués par méconnaissance du dossier médical. Le DMP améliorerait les finances de la Sécurité Sociale en évitant des erreurs dans la prise en charge des patients (iatrogénie par exemple…). À ce titre on oublie souvent que le médecin est également le contribuable.

Des préalables à déterminer

Cependant, il ne faut pas perdre de vue que, pour que le DMP arrive à devenir légion, il va falloir bien réfléchir, et déterminer plusieurs points. Quel(s) sera ou seront les acteurs responsables dans le téléchargement des données de la carte ? Cela se fera-t-il moyennant une rémunération ?

À quel moment les médecins pourront-ils alimenter les données des cartes des patients ? Les politiques de tout bord, et autres directeurs d’organismes sociaux, oublient souvent que la charge de travail des médecins est démesurée, et qu’il sera difficile de charger plus la mule au risque de voir toute une frange de praticiens en burn out.

De quelle façon les cartes devront être alimentées ? Les médecins devront-ils respecter une trame imposée par les organismes sociaux, ou les sociétés savantes ?

Sera-t-il facile de transférer les données de son logiciel sur les cartes vitales ? Les sociétés de logiciels ne vont-elles pas demander un petit plus financier pour pouvoir obtenir le passe de transmission ? Le médecin devra-t-il payer ce surplus, probablement assez élevé aux éditeurs de programmes (ce ne sont pas des philanthropes) ?

Les données incluses dans la carte vitale seront-elles sécurisées ? Quels professionnels et quels organismes auront la possibilité de regarder les dossiers des patients ? Quid du secret médical ? Qu’adviendra-t-il si le patient perd sa carte vitale téléchargée ? Faudra-t-il retransférer les données du dossier médical ?

Bref, beaucoup de questions se posent avant la mise en service du DMP à grande échelle. Le plus inique dans cette situation est résumé dans une des phrases du directeur de la CNAM sur ce sujet : « Le DMP ne fonctionnera vraiment bien que si professionnels et patients jouent le jeu ». De tels propos me font quelque peu réfléchir sur l’avenir du DMP…

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Dr Pierre Frances, Médecin généraliste, Banyuls-sur-mer (66)
DMP

Source : Le Quotidien du médecin: 9707