Trois exemples de prise en charge efficace

Le télésuivi des maladies chroniques veut dépasser le cadre des expérimentations

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Publié le 24/03/2016
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CARDIO

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Crédit photo : PHANIE

Depuis quatre ans, le dispositif CardiAuvergne propose aux patients auvergnats souffrant d'insuffisance cardiaque un service de télésurveillance à domicile.

« Les demandes d'admission sont effectuées par l'hôpital et le dispositif repose sur les professionnels de santé de proximité », explique le Pr Jean Cassagnes, directeur du groupement de coordination sanitaire (GCS) CardiAuvergne. Les résultats obtenus sur les 1 084 patients inclus en Auvergne sont encourageants. « À six mois, le taux de mortalité s'élève à 5,8 %, contre 16,9 % dans une cohorte témoin de 3 845 patients », souligne le Pr Cassagnes. À un an, il atteint 13,5 % contre 25 % dans le groupe témoin. « Nous avons pratiquement divisé par deux la mortalité », se félicite le cardiologue. Les réhospitalisations pour une nouvelle poussée d'insuffisance cardiaque ont diminué : elles atteignent 13,8 % contre 21 % dans le groupe témoin. Par ailleurs, la durée de séjour est plus courte (9,4 jours au lieu de 11,5), tandis que le délai entre l'inclusion dans l'expérimentation et la première réhospitalisation est passé à 215 jours contre 94 en temps normal. « Nous avons aussi noté une réduction des passages en service d'urgence, car les patients sont admis directement en cardiologie », ajoute le Pr Cassagnes. Une évaluation médico-économique réalisée sur l'année 2013 sur 246 patients estime le gain potentiel à 1 336 000 euros par an, soit 5 430 euros par patient, à comparer aux 672 euros de coût annuel d'inclusion dans Cardiauvergne et 79 euros pour la surveillance infirmière. Pour le directeur de CardiAuvergne, tous ces éléments démontrent que « la période expérimentale est terminée » et qu'il faudrait passer à « un financement pérenne ».

Améliorer la qualité de vie

Chez l'insuffisant rénal chronique, le projet Nelly permet un télésuivi de plus de 200 patients, en dialyse, en insuffisance rénale non dialysée ou ayant bénéficié d'une transplantation. Il comprend une application numérique gratuite, disponible sur tablette, smartphone ou Internet et des interfaces de suivi personnalisées pour les patients et les professionnels de santé. Là encore, l'expérimentation s'appuie sur les acteurs de santé de proximité. « Pour les professionnels de santé, le projet permet une vue globale du patient, il facilite le suivi et met en cohérence l'action des différents acteurs », détaille Jean-Pierre Grangier, cadre de santé de l'association Calydial (centre associatif lyonnais de dialyse). Selon lui également, « le temps des expérimentations est révolu et de nouveaux modèles économiques sont à définir ».

Limiter les déplacements

Afin de mesurer l'intérêt de la téléconsultation en transplantation, une étude randomisée d'évaluation doit avoir lieu dans trois centres à Nantes, Lyon et Paris. Elle doit durer six ans et inclure 250 patients. Bien que le protocole ait été accepté en 2012, l'étude a seulement démarré à Nantes l'année dernière et n'a pas encore commencé à Paris et Lyon. En août 2015, 91 patients étaient inclus. 235 visioconsultations ont été déjà réalisées. « La télémédecine en transplantation offre plusieurs intérêts, note le Pr Emmanuel Morelon, chef de service transplantation à l'hôpital Edouard-Herriot à Lyon : elle limite les déplacements du patient, augmente la fréquence des consultations, améliore la prévention, réduit le délai d'intervention médicale en cas d'appel urgent et fournit une aide à la décision médicale ou une consultation à distance. » En revanche, « la téléconsultation ne diminue pas le temps médical », prévient-il. Le Pr Morelon observe plusieurs freins au déploiement de cette nouvelle forme de consultation. Le modèle économique reste à définir, ainsi que les responsabilités médicales de chacun des acteurs. « Il faut aussi veiller à éduquer les patients pour éviter l'utilisation abusive du recours direct au spécialiste », conclut-il.

De notre correspondante Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin: 9482