Les données croisées du PMSI (programme de médicalisation des systèmes d'information) et de la base de données individuelle des bénéficiaires (DCIR) du SNIIRAM ont confirmé le surrisque d'endocardite infectieuse associé aux soins buccodentaires.
Ces résultats ont été publiés par les chercheurs de l'INSERM (UMR 1137, Université Paris Diderot), en association avec des statisticiens de l'assurance maladie, dans le « BMJ ». Il en ressort que les patients porteurs de valves prothétiques cardiaques souffrant d'endocardites ont de fortes chances d'avoir subi une intervention dentaire au cours des 3 mois qui ont précédé l'apparition de la maladie.
L'analyse porte sur 138 876 adultes porteurs de valves prothétiques, chez qui 396 615 soins buccodentaires ont été pratiqués, dont 103 463 (26 %) étaient invasifs. Les patients de cette cohorte ont été suivis pendant une période de 20 mois au cours de laquelle 267 patients ont été hospitalisés pour une endocardite à streptocoques d'origine bucco-dentaire, soit un taux d'incidence de 93,7 cas pour 100 000 personnes année.
Une méthode originale
« Notre méthodologie a ceci d'originale qu'il s'agit d'une étude cas témoins dans laquelle les patients sont leur propre témoin », explique le Pr Xavier Duval, directeur du centre d'investigation clinique de l'hôpital Bichat (AP-HP), qui a dirigé l'étude. « Cela nous permet notamment d'éliminer tous les facteurs confondants difficiles à quantifier, comme l'hygiène bucco-dentaire individuelle de la santé bucco dentaire », complète le Dr Sarah Tubiana, de l'hôpital Bichat-Claude-Bernard.
Les patients hospitalisés pour endocardite infectieuse avaient 66 % de chances en plus d'avoir subi une opération dentaire invasive au cours des 3 mois précédant, comparés à un groupe contrôle de patients, porteurs de valves mais n'ayant pas souffert d'endocardite. Bien que rares, les endocardites à streptocoque d'origine bucco-dentaire sont associées à une lourde morbimortalité, puisque 20 % d'entre elles ont une issue fatale.
Un débat mordant
Ces résultats s'inscrivent dans le débat lancé au début des années 2000 sur les rôles respectifs des soins dentaires et de la bactériémie quotidienne provenant de la mastication ou de l'excès d'hygiène buccodentaire, comme l'usage trop fréquent de fil dentaire. En septembre 1999, Graham Roberts, de l'institut dentaire Eastman avait publié, dans « Pediatric Cardiology », un texte dans lequel il affirmait que « les dentistes sont innocents, c'est la bactériémie quotidienne qui est la principale cause des endocardites bactériennes chez l'enfant ». Le débat qui avait suivi avait conduit les recommandations anglaises à ne plus imposer une antibiothérapie prophylactique avant chaque geste invasif.
« Notre étude confirme que les soins dentaires invasifs sont associés à un surrisque d'endocardites, au même titre que la bactériémie quotidienne », affirme le Dr Tubiana. Ces résultats s'ajoutent à ceux publiés en juin dernier par les mêmes auteurs dans « Clinical Infectious Disease ». Cette étude cas-contrôle incluait 265 personnes et montrait que les patients souffrant d'endocardites avaient 3,31 fois plus de chance d'avoir eu une intervention dentaire dans les 3 mois précédant la maladie que les patients du groupe contrôle, et 3,48 fois plus de chance d'avoir une hygienne dentaire excessive.
Une antibioprophylaxie dans la moitié des cas seulement
En France, l'antibioprophylaxie est toujours recommandée par l'ANSM et la Société française de chirurgie orale chez les patients à haut risque d’endocardite, dont les porteurs de valves prothétiques font partie (2 g d'amoxicilline en une prise, une heure avant les soins en l'absence d'allergie, 600 mg de clindamycine en cas d'allergie). Pour autant, seule la moitié des patients de l'étude ayant subi un geste dentaire invasif en ont effectivement bénéficié.
À ce jour, aucune étude n'a pu confirmer en vie réelle l'efficacité de l'antibioprophylaxie pour diminuer le risque d'endocardite, et les auteurs de l'étude du « BMJ » précisent que la puissance de leur étude ne permet pas non plus de répondre à cette question. En effet, le risque d'endocardite était augmenté de 25 % dans les 3 mois qui suivent une opération dentaire, et de 57 % après une opération sans antibioprophylaxie. Ces deux chiffres ne sont pas statistiquement significatifs et ne sont pas non plus significativement différents entre eux.
Pas de surrisque pendant la grossesse, mais un taux d’infertilité élevé pour les femmes médecins
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols