SI L’ON SE FIE aux propos d’Andrews vont Eschenbach, la crise que traverse la FDA est sérieuse et ancienne. Spécialiste d’oncologie, il a recours à la métaphore du processus cancéreux pour décrire la situation de l’agence fédérale américaine qu’il a dirigé pendant trois ans : « Au moment de l’annonce d’un cancer, le choc et la surprise peuvent être immenses... En réalité le processus s’est installé bien longtemps avant l’apparition des premiers symptômes », explique le Dr Susan Okie dans l’article qu’elle signe dans le « New England of Medicine » (à paraître le 2 avril et mis en ligne sur le site de la revue), où elle recense les nombreux défis que devra relever la nouvelle directrice.
Nommée par le président américain Barack Obama, Margaret Hamburg prend la tête d’une institution dont un rapport très critique de 2007 dénonçait l’incapacité structurelle à assurer ses missions : expertise scientifique défaillante, manque de ressources et de personnels. « Nous avons conclu que la vie des Américains était menacée et qu’il y avait urgence à corriger ces insuffisances », assurait un des rapporteurs, Gail Cassell.
Au cours des dernières années la FDA a été accusée d’être trop proche des intérêts des laboratoires alors que plusieurs affaires concernant la sécurité des médicaments ou des produits alimentaires ont grandement altéré sa crédibilité même. En 2005, un bureau indépendant chargé de suivre les médicaments déjà commercialisés et de s’assurer de leur innocuité a été créé ; en 2007, le Food and Drug Administration Amendments Act obligeait la diffusion tous les essais - y compris lorsque les résultats étaient négatifs, sur un portail internet (clinicaltrials.gov).
Modernisation.
La nomination de Margaret Hamburg s’inscrit dans cet effort de plus grande transparence. Le président américain a aussi annoncé la création d’un groupe de travail intergouvernemental pour la sécurité alimentaire, lequel serait présidé par les secrétaires d’État à la Santé et à l’Agriculture. « J’attends que ce groupe me fasse des propositions aussi vite que possible », a-t-il indiqué, précisant que tout statu quo serait « inacceptable ». Un milliard de dollars devrait être consacré au renforcement de la sécurité alimentaire et à la modernisation de la FDA.
Spécialiste de la santé publique, Margaret Hamburg, 54 ans, après des études de médecine à Harvard Medical School, a occupé plusieurs postes au NIH (Département Health and human services). Elle a notamment été l’assistante d’Anthony Fauci, spécialiste du VIH, à la fin des années 1980 : « Elle était à mes côtés lorsque nous avons gagné la bataille des antirétroviraux », a expliqué ce dernier, à propos des autorisations à titre compassionnel réclamées par les associations. En 1991 à 1997, elle a été responsable des questions de santé auprès du maire de New York et est parvenue à imposer un programme d’échanges de seringues destiné à réduire la circulation du virus parmi les usagers de drogue injectable ; elle a également eu à gérer l’épidémie de tuberculose multirésistante que connut la ville durant cette période. Les différentes actions qu’elle a conduites (suivi thérapeutique, dépistage ciblé des sans domiciles fixes et dans les prisons) ont permis de réduire de 21 % les cas de tuberculose. Elle fut ensuite en charge, sous la présidence Clinton, de la préparation aux pandémies et maladies émergentes avant de se consacrer au bioterrorisme (menace nucléaire et biologique).
Le Dr Hamburg est aussi fille de médecins, psychiatres tous les deux, connus pour leur engagement public. Son père a été président de la Carnegie corporation, une association créée en 1911 pour le progrès et la diffusion du savoir, sa mère, ancienne présidente de la Fondation William T. Grant tournée vers les jeunes, est une des premières femmes noires a intégrer l’Université de Yale.
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