UNE « alerte qui appelle une forte réaction ». C’est ainsi que Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, a présenté un rapport cinglant sur les médecins et hôpitaux des armées. En 2002 déjà, la Cour avait ausculté le service de santé des armées qui emploie 15 600 personnels (dont plus de 2000 médecins et internes et 4 500 infirmiers) pour un budget global de 1,3 milliard d’euros. Mais cette fois la critique est vigoureuse. Florilège.
• Formation : sur-encadrement
Le rapport coût/efficacité du système de formation est « peu satisfaisant ». Les écoles de formation des praticiens des armées sont « sur-encadrées » (un personnel administratif pour 2,8 élèves à Lyon et Bordeaux) et donc « très coûteuses », alors même que les futurs médecins des armées sont à l’université pour 93 % de leur formation. Le regroupement des écoles de Bordeaux et Lyon (qui a abouti fin 2009) devrait permettre de réduire ces coûts de fonctionnement. Autre grief : la mission de formation militaire des écoles « doit être renforcée ».
• Dans les régiments, 6 consultations par jour…
La préparation opérationnelle des médecins et des infirmiers d’unité « est loin d’être optimale », lit-on dans le rapport. Les magistrats épinglent la « faible activité médicale déclarée, de l’ordre de 6 à 7 consultations par jour ». Près des trois quarts des consultations de soins des militaires et de leurs familles « se font pour des motifs ne relevant pas du service ». Des soins non facturés au demeurant… Quant aux actes d’urgence, pourtant appropriés pour des praticiens militaires, ils sont « assez rares ». Enfin, le service de santé des armées s’adapte de façon tardive aux conditions d’engagement des forces, notamment en ce qui concerne le soutien « psychique » aux troupes.
• Hôpitaux militaires : faible productivité, coût « exorbitant »
C’est le chapitre le plus accablant. Pour la Cour, le maintien d’un réseau de neuf hôpitaux d’instruction des armées (Bordeaux, Brest, Lyon, Marseille, Metz, Toulon, Clamart, Saint-Mandé et Paris) totalement autonome « montre ses limites ». Les civils représentent 90 % des patients des hôpitaux militaires. Or, malgré l’adoption d’une mission de service public, « le service de santé n’a pas joué le jeu de la coopération avec les autorités civiles ». Le taux d’occupation des lits ? Il est de 52 % contre des normes civiles de 75 à 85 %. L’activité chirurgicale ? « Trop faible » avec 140 séjours chirurgicaux par an et par chirurgien (243 dans les établissements civils comparables). En résumé, « les hôpitaux militaires se placent parmi les 20 % d’établissements hospitaliers les moins productifs ».
Du coup, ce réseau d’hôpitaux « a un coût exorbitant ». « C’est le premier déficit hospitalier de France », insiste Didier Migaud, un déficit « hors norme » de 280 millions d’euros par an.
Que faire ? La Cour préconise la fin de l’autonomie complète des hôpitaux militaires (ce qui signifie l’intervention du ministère de la Santé et des ARS), l’adossement de ce réseau au dispositif civil de soins (Centre 15) et une mutualisation des équipements avec le parc hospitalier civil. « Attention, on ne recommande pas la fermeture du Val-de-Grâce ! », précise Didier Migaud, reconnaissant même le caractère « particulier » de ce très célèbre hôpital militaire parisien qui accueille en toute discrétion les VIP et têtes couronnées…
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