Alors que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 a été adopté le 2 décembre – à l’issue d’un nouveau 49.3 –, un amendement surprise à destination des radiologues s'est glissé dans le texte, provoquant le courroux des officinaux. Sur proposition du gouvernement, il favorise l'achat direct par les cabinets d'imagerie des produits de contraste à administrer aux patients, en les intégrant aux forfaits techniques.
Dans le détail, l’amendement adopté élargit « les coûts financés par les forfaits techniques en intégrant les produits de contraste aujourd’hui achetés par le patient en pharmacie », indique l’exécutif. Un arrêté fixera les tarifs de ces forfaits techniques élargis pour une mise en application « au plus tard » au 1er juillet 2023.
Économies et limitation du mésusage
L'intégration des produits de contraste dans les forfaits techniques des radiologues est une mesure à la fois économique et de « bon usage », justifie Thomas Fatôme. Auditionné au Sénat mi-octobre, le patron de l'Assurance-maladie soulignait qu'en France, « les dépenses liées aux produits de contraste sont deux à quatre fois plus importantes que celles constatées dans les autres pays européens ».
Dans son rapport « charges et produits » publié en juillet, la Cnam recommandait déjà de limiter le « mésusage » des produits de contraste pour tendre vers davantage « d'efficience ». L'Assurance-maladie souhaitait « simplifier le parcours de soins des patients qui, aujourd’hui, passent par l’officine pour se procurer ces produits » tout en évitant « le gaspillage de produits achetés par les patients, mais non utilisés ».
Manque à gagner pour les pharmaciens
Mais cette mesure « de dernière minute » est « extrêmement contrariante », pour Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Le pharmacien de Limoux craint que des patients désertent les pharmacies alors qu’« il semble se dessiner que désormais les radiologues – comme les dentistes – devront acheter les produits de contraste, sans les prescrire aux patients ». Selon Philippe Besset, les radiologues « ont préféré dire qu’ils allaient acheter les produits eux-mêmes, plutôt que de voir une diminution de la cotation de leurs actes », envisagée par l'exécutif.
Si le pharmacien concède que cette évolution peut aller dans le sens « d’une rationalisation du parcours de soins, comme cela se fait partout dans le monde », il craint un manque à gagner pour l’officine de 290 millions d’euros. « Nous devons avoir des compensations financières », avance-t-il. « Ce qui est sûr, c’est que je n’entendrais plus des syndicats de médecins qu’on transfère des actes sans étudier la participation financière des autres professions », tacle Philippe Besset.
Cette « perte du monopole sur les produits de contraste » a « abasourdi » l'Union nationale des pharmacies de France (UNPF), qui pose la question : « Est-ce aux pharmaciens de payer pour l’apaisement de négociations conventionnelles tendues entre les médecins et l’Assurance-maladie ? »
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