« Cher confrère, je vous adresse ce patient pour… » Dans le monde idéal du parcours de soins coordonnés, tout devrait commencer de la même manière. Par une belle lettre détaillée, adressée au médecin traitant au spécialiste correspondant. Et tout devrait se terminer de manière aussi idyllique. Par un courrier tout aussi complet et précis, envoyé rapidement par le spécialiste au généraliste.
Parfois, quand on évoque le sujet avec des médecins, on a l’impression que ce monde idéal n’existe pas vraiment. Certains se montrent volontiers râleurs sur la qualité ou la rapidité de la correspondance échangée dans le cadre du parcours de soins. « On reçoit les compte-rendus trop tard », disent des généralistes. « Certains hospitaliers sont injoignables », affirment d’autres. « On n’a pas toujours les infos du généraliste », rétorquent parfois les spécialistes.
La réalité ne semble pas si négative. C’est ce que montre une enquête rendue publique en juin 2014 par l’URPS des médecins libéraux d’Ile-de-France. Au total, 802 généralistes ont été interrogés sur le parcours de soins de leurs patients et sur leurs relations avec leurs confrères spécialistes libéraux. « Ce qui fait plaisir, c’est d’abord ce constat global : 95 % des généralistes se déclarent satisfaits de la coordination des soins avec les spécialistes de ville. Dans 97 % des cas, ils déclarent recevoir un compte-rendu de consultation, sous 15 jours maximum dans 75 % des cas », se félicite le Dr Patrick Assyag, membre de l’URPS et président du Syndicat des cardiologues d’Ile-de-France. « La rapidité de l’information transmise au médecin traitant est essentielle. Dans le cabinet où j’exerce, nous avons instauré un principe simple : une consultation, une lettre. Chaque patient repart systématiquement avec une lettre rédigée à l’attention de son généraliste », explique le Dr Assyag.
Autre enseignement : pour communiquer entre confrères, le courrier reste le moyen de communication le plus fréquemment utilisé aussi bien lors de l’adressage (53 %) que du compte rendu (61 %). Le téléphone conserve une place de choix : 40 % des généralistes appellent directement leurs correspondants libéraux lors de l’adressage d’un patient. Les échanges par mail restent encore anecdotiques surtout dans la demande (5 %) alors qu’ils ont tendance à plus se développer en réponse (23 %).
C’est également un constat globalement plutôt positif qui se dégage de la thèse de médecine du Dr Hortense Binart Ecale, soutenue en novembre 2012 à Bobigny. Dans une très majorité des cas (80 %), le contenu des courriers reçus par les généralistes sont conformes à leurs attentes, selon cette thèse consacrée à la communication entre généralistes et spécialistes. Pour mener ce travail, le Dr Binard Ecale a interrogé, via Internet, 220 généralistes : 202 sociétaires de la Société française de médecine générale (SFMG) et 18 maîtres de stage de la faculté de Bobigny.
Dans 87 % des cas, ces généralistes indiquent rédiger systématiquement un courrier à l’attention du collègue auquel ils envoient leur patient. Dans 81 % des cas, il s’agit de dossiers jugés « détaillés », qui reprennent au minimum les antécédents et l’histoire de la maladie du patient. « Plus de la moitié sont rédigés informatiquement (50 %), avec un logiciel médical. Ce mode de rédaction est corrélé à la complexité du courrier : plus les médecins ont recours à des logiciels médicaux pour rédiger, plus le contenu des courriers est détaillé », souligne la thèse.
Un parcours à effet neutre ?
À 71 %, les généralistes se disent satisfaits de la fréquence de leurs échanges avec leurs confrères. Ils sont 4 % à trouver que le délai de réponses reste trop long. « Ces délais trop longs concernent essentiellement les hôpitaux, avec des compte-rendus d’hospitalisation reçus parfois plusieurs semaines ou mois après la sortie du patient », souligne la thèse. Ils sont assez peu nombreux (3 %) à mentionner l’utilisation d’une messagerie électronique comme un moyen d’améliorer la fréquence de ces échanges.
Autre élément à noter : la notion de parcours de soin n’a rien changé aux échanges d’informations pour 68 % des médecins interrogés. « Une minorité de médecins (32 %) a noté un changement dans ses échanges depuis que le concept de parcours de soin a été redéfini. Et parmi eux, 79 % notent une amélioration de la situation, concernant la communication avec les autres professionnels de santé. 13 médecins restent cependant déçus de ce changement, trouvant que cette situation s’est détériorée », souligne la thèse. « On remarque que pour la plupart des médecins, qu’ils travaillent ou pas avec des réseaux de soins formels, la notion de parcours de soins n’a rien changé à leurs échanges avec leurs partenaires de soins », ajoute le Dr Binart Ecale.
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