La visite d'Emmanuel Macron jeudi au controversé professeur marseillais Didier Raoult, héraut du traitement à l'hydroxychloroquine contre le Covid-19, illustre la volonté du président de consulter tous azimuts avant de nouvelles décisions dans la crise du coronavirus.
Devenu l'une des personnalités les plus médiatisées depuis le début de l'épidémie, Didier Raoult a accueilli en milieu d'après-midi le chef de l'État dans son Institut Hospitalo-Universitaire (IHU) Méditerranée Infection.
Devant les grilles de l'établissement, des policiers ont été déployés pour cette visite qui n'avait pas été annoncée, tandis que quelques Marseillais arrivaient au compte-gouttes pour se faire dépister du virus, a constaté un journaliste de l'AFP. L'affluence n'avait cependant rien à voir avec les longues files d'attente qui ont pu être constatées devant l'IHU au cours des dernières semaines.
Au cours de l'entretien, le professeur Raoult devait présenter à Emmanuel Macron les résultats de ses études qui montrent, selon lui, l'efficacité de l'hydroxychloroquine dès l'apparition des premiers symptômes du coronavirus. Des résultats dont un certain nombre de médecins et de scientifiques mettent la portée en doute.
Emmanuel Macron n'a jusqu'à présent pas pris position sur cette controverse, qui agite aussi l'opinion et la classe politique. Mais, comme le ministre de la Santé Olivier Véran, il s'est déjà entretenu avec le professeur Raoult depuis le début de la crise.
Ce déplacement s'inscrit dans une séquence de consultations que mène le chef de l'État afin de préparer l'allocution télévisée qu'il prévoit de faire lundi soir, notamment en vue de confirmer la prolongation du confinement.
L'Élysée a expliqué mercredi que le président allait, avant ce rendez-vous avec les Français, « consulter un grand nombre d'acteurs publics et privés, français, européens et internationaux, afin d'échanger avec eux sur les grands enjeux relatifs au Covid-19 et de préparer les décisions qui seront annoncées lundi aux Français ».
Soutiens des politiciens locaux
Emmanuel Macron a effectué jeudi matin, également sans journaliste, un premier déplacement à l'hôpital du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne) où il a rencontré des équipes hospitalo-universitaires impliquées dans la recherche clinique sur le coronovarus.
Pour l'expert Frédéric Dabi, la rencontre avec le professeur Raoult est « un acte fort » qui montre qu'Emmanuel Macron « consulte tout le monde » et pas seulement les membres du Conseil scientifique ou du CARE.
C'est à la fois « une manière de contrôler la parole de Didier Raoult parce qu'il ne pourra pas dire qu'il n'a pas été écouté » mais aussi « une formidable légitimation de ce chercheur » pourtant controversé, précise pour l'AFP le directeur général adjoint de l'institut de sondage Ifop.
Dès l'annonce de la visite à Marseille, plusieurs élus de droite qui avaient pris fait et cause pour le protocole du professeur Raoult ont réagi. À l'image de Renaud Muselier, président LR de la Région Sud Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui s'est réjoui de la « reconnaissance de l’État pour ce grand médecin, ce chercheur de dimension mondiale ».
La députée LR des Bouches-du-Rhône Valérie Boyer, qui a été touchée par le Covid-19 et traitée par le protocole du professeur Raoult, a assuré sur BFMTV « ne pas comprendre » cette visite tardive mais attend « du respect » pour ce médecin.
« En ce jeudi saint, ll faudra ensuite analyser s'il (Emmanuel Macron) est venu lui laver les pieds ou s'en laver les mains », a ironisé le député du Vaucluse Julien Aubert (LR). « J'espère que la venue d'Emmanuel Macron accélérera la reconnaissance de son traitement à base de chloroquine contre le virus », a réagi de son côté Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR.
Face aux pressions, le ministre de la Santé Olivier Véran a appelé le week-end dernier à ne pas brûler les étapes, en soulignant qu'on connaitrait prochainement les premiers résultats intermédiaires d'études cliniques, qui visent à déterminer si la chloroquine mais aussi "d'autres médicaments prometteurs" sont efficaces quand ils sont pris dès le début de la maladie.
Par rapport à d'autres molécules, la chloroquine et l'hydroxychloroquine ont l'avantage d'être déjà disponibles, bon marché et bien connues.
Après deux burn-out, une chirurgienne décide de retourner la situation
La méthode de la Mutualité pour stopper 2,4 milliards d’euros de fraude sociale
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
À la mémoire de notre consœur et amie