Le président de la République est beaucoup moins puissant que ses opposants veulent nous le faire croire. Pour commencer, il n'a pas l'intention, comme l'auraient fait le Front national ou la France insoumise, de modifier les institutions ou de changer de république. Par opposition aux projets d'extrême droite ou d'extrême gauche, celui de M. Macron n'est pas révolutionnaire. Or il est infiniment plus facile de faire descendre les gens dans la rue, de laisser les casseurs incendier des voitures ou les syndicats bloquer l'économie par voie de grève que de lever les tabous qui freinent notre développement économique. On ne sait pas trop par quel tour de magie Macron l'enchanteur associera les syndicats à ses réformes, mais il vaut mieux se préparer à des conflits sociaux d'ici à l'automne. La formidable majorité politique dont il bénéficiera, si décriée par d'autres partis qui, dans les mêmes circonstances, n'eussent rien lâché de leur pouvoir, eux qui dénoncent à grands cris le monolithisme de la prochaine Assemblée nationale, ne lui sera d'aucun secours sur le plan social, la seule entorse au système démocratique étant la certitude des syndicats que la volonté du peuple s'arrête aux avantages acquis.
Ensuite, ce chef d'Etat surpuissant devra gouverner avec une majorité dont la biodiversité foisonne comme la végétation tropicale et dont nombre de députés, venus de la vie civile ou dépourvus d'expérience, n'auront pas les codes qui permettent de légiférer. Bien sûr, il n'est pas impossible que, ivres de leur succès fulgurant, ils aient tendance à manifester très vite leur indépendance du pouvoir. Mais d'une part cela devrait suffire à apaiser les craintes, quelque peu exagérées, de ceux qui voient dans la même majorité une forme de totalitarisme. Et d'autre part, il serait surprenant que les nouveaux élus REM, qui se sont lancés dans l'aventure parce qu'ils voulaient partager un projet novateur, se risquent, au moins pendant un an ou deux, à se dresser contre celui qui leur a donné une si belle chance.
Une discipline extraordinaire
Ils ne connaisent peut-être pas le labyrinthe des us et coutumes parlementaires, mais ils auront sûrement à cœur de soutenir leur président contre les aléas de sa gouvernance. L'une des choses remarquables de l'aventure REM, c'est l'extraordinaire discipline du groupe des partisans de M. Macron, à commencer par le Premier ministre, Edouard Philippe, venu de la droite mais capable de se fondre dans le projet au point de s'y sentir aussi à l'aise que dans un costume sur mesures. A ce jour, on n'a pas entendu un seul couac entre l'Elysée et Matignon. Ainsi les problèmes judiciaires de Richard Ferrand et ceux du MoDem ont-ils été minimisés par le chef du gouvernement, qui n'a pas, avec les ministres de la Cohésion territoriale et de la Justice des relations aussi étroites que celles qu'ils ont avec le président. Peut-être y aura-t-il plus tard des bisbilles entre les deux hommes, mais pour le moment M. Macron préside et M. Philippe gouverne. De la même manière, la vaste opposition de droite et de gauche feint de s'inquiéter du comportement des nouveaux venus à l'Assemblée, mais elle ne peut pas nier qu'ils adhèrent profondément à cette politique « et de droite et de gauche » censée être le talisman du succès.
Le pouvoir ne se débite pas en rondelles et sa puissance dépend beaucoup de ce qu'on en fait. Cette analyse serait sans doute moins sereine si Mme Le Pen ou M. Mélenchon avaient été élus à la tête du pays avec des majorités comparables. Ne reprochons pas à celui qui nous a préservés de cette sinistre éventualité d'affirmer sa force en créant un mouvement irrésistible.
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