Petite révolution dans la déontologie. Un décret publié le 24 décembre assouplit les règles applicables aux médecins en matière de communication professionnelle. C'est la fin de l'interdiction générale et absolue de publicité (directe ou indirecte) pour la profession au profit d'un principe de libre communication, liberté qui reste encadrée.
Désormais, le médecin est libre de communiquer au public, « par tout moyen », y compris sur un site internet, « des informations de nature à contribuer au libre choix du praticien par le patient ». Il pourra mentionner ses compétences et pratiques professionnelles, son parcours professionnel et ses conditions d'exercice.
Cette communication reste cadrée pour éviter toute dérive commerciale : elle devra être « loyale et honnête », ne pas faire appel à des témoignages de tiers ou reposer sur des comparaisons avec d'autres médecins ou établissements. Surtout, elle ne devra pas porter atteinte « à la dignité de la profession » ou induire le public en erreur. Le médecin aura interdiction de payer pour être référencé de façon prioritaire sur internet.
Discrétion sur la plaque
Le médecin pourra communiquer au public des informations « scientifiquement étayées » sur des questions relatives à sa discipline ou à des enjeux de santé publique, « en se gardant de présenter comme des données acquises des hypothèses non encore confirmées ». Mais un praticien qui présente son activité au public, notamment sur un site, devra y inclure « une information sur les honoraires pratiqués, les modes de paiement acceptés et les obligations posées par la loi pour permettre l'accès de toute personne à la prévention ou aux soins sans discrimination ». Là encore, l'information doit être claire, honnête, précise et non comparative.
Le décret prévoit que le médecin mentionne sur ses feuilles d'ordonnance et documents professionnels ses « nom, prénoms, adresse professionnelle postale et électronique, numéro de téléphone et numéro d'identification au répertoire partagé des professionnels de santé », mais aussi sa situation conventionnelle, sa spécialité ou qualification. Il peut aussi faire figurer les distinctions honorifiques reconnues par la République, ses titres, diplômes et fonctions validés par l'Ordre. Dans un annuaire, le médecin peut ajouter les jours et heures de consultation. Ces informations pourront être reprises sur sa plaque, à son lieu d'exercice, où là encore, la « discrétion » sera de mise.
Ces changements doivent être entérinés dans le code de déontologie lors de la prochaine session du conseil de l'Ordre des médecins, début février. En octobre, alors que le projet de décret avait été envoyé pour avis à la commission européenne, l'Ordre avait exprimé sa satisfaction, estimant que ses recommandations avaient été « prises en compte ».
Pas de pub tapageuse
Ces dispositions ne vont pas bouleverser la jurisprudence et les contentieux entre médecins, analyse Me Maud Geneste, avocate à Montpellier*. Depuis 2017 déjà, la Cour de justice de l'UE s’oppose à ce qu’une législation nationale interdise « de manière générale et absolue » toute publicité relative à des prestations de soins. Le droit européen prévalant, les juridictions nationales ont adopté cette règle depuis fin 2017. « Le Conseil d'État, dernière instance pour contester une décision disciplinaire ordinale, censure depuis cette date les décisions qui interdisent la publicité », explique Me Geneste.
Pour les médecins qui peinent à s'y retrouver, l'avocate conseille une communication « informative ». « Le praticien ne pourra pas utiliser de procédés laudatifs, ni se mettre en avant. Tout ce qui est trop tapageur est à éviter, souligne le conseil. Une photo et un numéro sur un grand panneau ne seront pas dans les clous, mais un encart informatif dans un magazine pourra être accepté, par exemple dans un hebdomadaire professionnel. L'appréciation se fera de manière empirique, et au cas par cas. »
* Partenaire du « Quotidien » au sein de la rubrique « Le droit & vous ».
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