Six semaines après la suspension par le Conseil d’État de l’arrêté instaurant la téléobservance systématique (avec remboursement conditionnel de la Sécu) du traitement de l’apnée du sommeil par masque à pression positive continue (PPC), le débat sur les enjeux médicaux et financiers de ce type de suivi reste vif entre patients, médecins, fabricants et autorités.
Satisfaites de la décision du Conseil d’État, plusieurs associations de patients ont fustigé lors d’une table ronde (1) le fait de conditionner le remboursement du traitement à son bon usage (utilisation minimale, durée, régularité), c’est-à-dire à l’observance. Sur les 550 000 patients apnéiques diagnostiqués, 150 000 portent un masque à PPC équipé d’un boîtier de télésuivi, qui permet de récupérer les données collectées.
La vice-présidente du collectif interassociatif sur la santé (CISS, usagers), Claude Rambaud, condamne sans fard ce mécanisme qui « installe Big Brother dans le lit des patients » au bénéfice de prestataires de service et de tutelles « plus soucieuses de réguler la prise en charge d’un secteur en croissance que de la santé des Français ».
Quelle place pour le médecin ?
Les fédérations de patients insuffisants respiratoires (FFAAIR) et diabétiques (AFD) ont condamné de leur côté le « désinvestissement » des praticiens (pneumologues, médecins traitants) du champ thérapeutique de la téléobservance, dès lors qu’ils ne reçoivent pas systématiquement les données du patient. Or, sans caution médicale, les patients rejettent catégoriquement cette « téléobservance de la Sécu », telle qu’elle avait été imaginée dans l’arrêté litigieux élaboré par le comité économique des produits de santé (CEPS).
Cet organisme, chargé de fixer les prix des médicaments, se défend de toute mauvaise intention. Le discours des patients « n’est pas la réalité », assure André Tanti, vice-président du CEPS. Il ne serait pas question de « dérembourser » le traitement, mais de s’assurer de son bon usage systématique par le malade. « Dans la vie, le médecin ne represcrit pas un médicament que le patient n’a jamais pris. C’est pareil ici ! Chacun ses responsabilités ».
Prudente, la Fédération française de pneumologie refuse d’alimenter la polémique autour du « flicage » supposé du patient. « La téléobservation est utile pour les médecins car elle permet une meilleure connaissance de la maladie », relève le Dr Yves Grillet, vice-président de la Fédération, déçu de la suspension de l’arrêté.
*Colloque organisé par le cabinet de consultant Nile
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