Dans un amphithéâtre de l'hôpital Cochin à Paris, ils étaient entre 150 et 200 médecins venus de toute la France à avoir répondu samedi, à 15 heures, à l'appel de l'UFML, de la FMF, du SML du BLOC et du Mouvement pour la santé de tous (MST*). Tous remontés à bloc contre le projet de loi de santé de Marisol Touraine, et désireux d'en découdre.
L'objet de cette assemblée générale était de rendre compte des différentes actions menées en province par les coordinations, et de décider d'une action commune nationale à la rentrée. Sur ce deuxième point, il faudra attendre encore un peu. Écartelés entre le calendrier législatif et celui des élections professionnelles, parfois divisés sur l'attitude à adopter (même si les partisans du blocage sanitaire ont incontestablement marqué des points), les praticiens ont choisi de ne pas choisir. Une action nationale aura bien lieu à la rentrée, mais aucune décision n'a été prise sur sa forme ni sur sa date.
Pour chauffer la salle, le Dr Eric Blondet, trésorier de l'UFML, rappelle les points de crispation vis-à-vis du projet de loi. Avec le tiers payant généralisé, et le DMP (partagé et non plus personnel), « c'est la mise sous contrainte des praticiens et la mise sous contrôle des patients » prévient-il.
Jérôme Marty, président de l'UFML, revient sur les propos de l'économiste de la santé Brigitte Dormont et sur ceux de Catherine Lemorton. « Elles sont une insulte à la profession », lance-t-il à la salle totalement acquise à la cause, et qui acquiesce bruyamment. Christian Lehmann, le médecin blogueur très actif, harangue la foule et s'en prend lui aussi à « la pathétique Madame Dormont », qui illustre à ses yeux cette spécificité bien française qui consiste à « s'essuyer les pieds sur la gueule des médecins de ville ». La salle est chauffée à blanc.
Même Alexandre Jardin, célèbre romancier, est de la partie, à l'invitation de Jérôme Marty. Initiateur du mouvement citoyen « Bleu, blanc, zèbre », il invite les praticiens à accompagner leur mouvement de protestation par une action citoyenne.
« Faites quelque chose d'utile, de visible, qui rende service aux gens, comme faire de la prévention sur les lieux de vacances, pour gagner la bataille du crédit moral, lance-t-il aux médecins galvanisés. La classe politique ne vous mettra à genoux que si vous êtes faibles moralement ». Les médecins se lèvent pour applaudir.
L'heure est au compte-rendu des actions de terrain menées en régions. Une quinzaine de porte-parole de départements viennent s'exprimer, comme ceux de Saône-et-Loire, du Vaucluse, de l'Ain, des Hautes Pyrénées, de Côtes d'Armor et du Finistère, des Alpes Maritimes, des Yvelines, du Val d'Oise, de Seine-Saint-Denis, du Nord, ou encore d'Ardèche.
Grèves surprises, menaces de déconventionnement, chartes de soutien mutuel, chaque département a sa recette pour maintenir la pression. Des actions sont en préparation, comme à Roanne qui organise samedi 20 juin une marche associant médecins, patients et tous les professionnels de santé. Le Dr Eric Lion, meneur départemental, s'époumone dans son micro : « nous espérons une action nationale, il faut durcir notre mouvement, c'est un bras de fer qui s'engage, nous sommes d'accord pour engager une fermeture illimitée des cabinets ».
Le Dr Patrick Guénébeaud, des Hautes-Pyrénées, se dit favorable à un « blocage sanitaire national », mais il reconnaît la difficulté de sa mise en œuvre.
Le Dr Nikan Mohtadi, de Quimper, explique à ses confrères comment mettre en place une charte de soutien mutuel. Le principe est simple : tous les praticiens d'un même territoire s'engagent par écrit à se déconventionner si l'un des leurs est poursuivi par les caisses pour non application des dispositions de la loi de santé.
La Bretagne, très en pointe dans le combat contre le projet de loi, organise mardi et mercredi à Quimper (Finistère) deux journées Santé morte. 95% des cabinets de généralistes libéraux seront fermés à cette occasion, et SOS médecins suit le mouvement. La permanence des soins sera tout de même assurée grâce à un point de consultation bénévole mis en place en ville. Les praticiens en grève en profiteront pour animer dans la rue des stands de prévention avec prise de tension et contrôle de glycémie. La préfecture et l'ARS ne seront informés que lundi 15 juin.
Dans le Nord, le Dr Michel Biland assure qu’« il y a unanimité pour aller jusqu'au déconventionnement s'il le faut ». Une grève d'une semaine se profile d'ici à l'été. L'ARS ne sera prévenue que le jour même, « pour éviter les réquisitions ». But avoué : « créer la panique à l'ARS. »
Jérôme Marty reprend la parole. Il relève que le mouvement de contestation a déjà trois victoires à son actif. Tout d'abord, la loi n'a toujours pas été définitivement adoptée, contrairement à ce qui était prévu dans le calendrier initial. Ensuite, des coordinations se lèvent un peu partout, enfin, « les patients commencent à comprendre l'impact de cette loi, nous avons retourné l'opinion publique ».
Le patron de l'UFML harangue les médecins : « d'ici à octobre, il nous faut être en capacité de créer un mouvement national et illimité de fermeture des cabinets, sans PDS et sans réquisitions. Pas de cadeaux, ça suffit », lance-t-il à la salle.
Eric Henry du SML propose de faire cette grève dès fin juillet ou début août mais cette proposition n'emporte guère d'adhésion. « Après la grève de Mégève de Noël dernier, on ne va quand même pas faire la grève de l'Ile de Ré cet été » grommelle un praticien dans la salle.
Le Dr Hamon (FMF), propose plutôt aux médecins de « maintenir la pression en régions pendant tout l'été, on verra en septembre pour une action nationale ». Jérôme Marty acquiesce : « ce n'est pas aujourd'hui qu'on va choisir la date car on n'a pas encore le calendrier législatif du projet de loi. »
Dans la salle, un praticien demande aux partisans « d'une grève illimitée dès demain » de lever la main. Aucun décompte n'est effectué, mais la salle semble à peu près également répartie entre les partisans de la méthode forte (blocage sanitaire national) et ceux qui penchent pour un mouvement plus perlé et progressif.
Le Dr Philippe Cuq, du BLOC, clôture la séance de défouloir collectif. Lui aussi penche pour « le blocage sanitaire national, seule façon de faire plier » le gouvernement. « Nous avons la solution entre nos mains, si on ne le fait pas, on va mourir. »
Philippe Cuq propose lui aussi de continuer la mobilisation pendant l'été. « Ensuite, à la rentrée, on se met d'accord sur une date de début du mouvement de grève, sans fixer de date de fin. La France médicale s'arrête. »
Vers 19 heures, la réunion se termine. Mais elle continuera un bon moment dans les couloirs de l'hôpital et dans la rue, face à Cochin.
Pas de date pour une grève nationale
L'objet de cette assemblée générale était de rendre compte des différentes actions menées en province par les coordinations, et de décider d'une action commune nationale à la rentrée. Sur ce deuxième point, il faudra attendre encore un peu. Écartelés entre le calendrier législatif et celui des élections professionnelles, parfois divisés sur l'attitude à adopter (même si les partisans du blocage sanitaire ont incontestablement marqué des points), les praticiens ont choisi de ne pas choisir. Une action nationale aura bien lieu à la rentrée, mais aucune décision n'a été prise sur sa forme ni sur sa date.
Pour chauffer la salle, le Dr Eric Blondet, trésorier de l'UFML, rappelle les points de crispation vis-à-vis du projet de loi. Avec le tiers payant généralisé, et le DMP (partagé et non plus personnel), « c'est la mise sous contrainte des praticiens et la mise sous contrôle des patients » prévient-il.
Jérôme Marty, président de l'UFML, revient sur les propos de l'économiste de la santé Brigitte Dormont et sur ceux de Catherine Lemorton. « Elles sont une insulte à la profession », lance-t-il à la salle totalement acquise à la cause, et qui acquiesce bruyamment. Christian Lehmann, le médecin blogueur très actif, harangue la foule et s'en prend lui aussi à « la pathétique Madame Dormont », qui illustre à ses yeux cette spécificité bien française qui consiste à « s'essuyer les pieds sur la gueule des médecins de ville ». La salle est chauffée à blanc.
Un romancier en soutien
Même Alexandre Jardin, célèbre romancier, est de la partie, à l'invitation de Jérôme Marty. Initiateur du mouvement citoyen « Bleu, blanc, zèbre », il invite les praticiens à accompagner leur mouvement de protestation par une action citoyenne.
« Faites quelque chose d'utile, de visible, qui rende service aux gens, comme faire de la prévention sur les lieux de vacances, pour gagner la bataille du crédit moral, lance-t-il aux médecins galvanisés. La classe politique ne vous mettra à genoux que si vous êtes faibles moralement ». Les médecins se lèvent pour applaudir.
L'heure est au compte-rendu des actions de terrain menées en régions. Une quinzaine de porte-parole de départements viennent s'exprimer, comme ceux de Saône-et-Loire, du Vaucluse, de l'Ain, des Hautes Pyrénées, de Côtes d'Armor et du Finistère, des Alpes Maritimes, des Yvelines, du Val d'Oise, de Seine-Saint-Denis, du Nord, ou encore d'Ardèche.
Grèves surprises, menaces de déconventionnement, chartes de soutien mutuel, chaque département a sa recette pour maintenir la pression. Des actions sont en préparation, comme à Roanne qui organise samedi 20 juin une marche associant médecins, patients et tous les professionnels de santé. Le Dr Eric Lion, meneur départemental, s'époumone dans son micro : « nous espérons une action nationale, il faut durcir notre mouvement, c'est un bras de fer qui s'engage, nous sommes d'accord pour engager une fermeture illimitée des cabinets ».
Le Dr Patrick Guénébeaud, des Hautes-Pyrénées, se dit favorable à un « blocage sanitaire national », mais il reconnaît la difficulté de sa mise en œuvre.
Journée Santé morte en Bretagne
Le Dr Nikan Mohtadi, de Quimper, explique à ses confrères comment mettre en place une charte de soutien mutuel. Le principe est simple : tous les praticiens d'un même territoire s'engagent par écrit à se déconventionner si l'un des leurs est poursuivi par les caisses pour non application des dispositions de la loi de santé.
La Bretagne, très en pointe dans le combat contre le projet de loi, organise mardi et mercredi à Quimper (Finistère) deux journées Santé morte. 95% des cabinets de généralistes libéraux seront fermés à cette occasion, et SOS médecins suit le mouvement. La permanence des soins sera tout de même assurée grâce à un point de consultation bénévole mis en place en ville. Les praticiens en grève en profiteront pour animer dans la rue des stands de prévention avec prise de tension et contrôle de glycémie. La préfecture et l'ARS ne seront informés que lundi 15 juin.
Dans le Nord, le Dr Michel Biland assure qu’« il y a unanimité pour aller jusqu'au déconventionnement s'il le faut ». Une grève d'une semaine se profile d'ici à l'été. L'ARS ne sera prévenue que le jour même, « pour éviter les réquisitions ». But avoué : « créer la panique à l'ARS. »
Jérôme Marty reprend la parole. Il relève que le mouvement de contestation a déjà trois victoires à son actif. Tout d'abord, la loi n'a toujours pas été définitivement adoptée, contrairement à ce qui était prévu dans le calendrier initial. Ensuite, des coordinations se lèvent un peu partout, enfin, « les patients commencent à comprendre l'impact de cette loi, nous avons retourné l'opinion publique ».
Le patron de l'UFML harangue les médecins : « d'ici à octobre, il nous faut être en capacité de créer un mouvement national et illimité de fermeture des cabinets, sans PDS et sans réquisitions. Pas de cadeaux, ça suffit », lance-t-il à la salle.
Mégève, Ile de Ré
Eric Henry du SML propose de faire cette grève dès fin juillet ou début août mais cette proposition n'emporte guère d'adhésion. « Après la grève de Mégève de Noël dernier, on ne va quand même pas faire la grève de l'Ile de Ré cet été » grommelle un praticien dans la salle.
Le Dr Hamon (FMF), propose plutôt aux médecins de « maintenir la pression en régions pendant tout l'été, on verra en septembre pour une action nationale ». Jérôme Marty acquiesce : « ce n'est pas aujourd'hui qu'on va choisir la date car on n'a pas encore le calendrier législatif du projet de loi. »
Dans la salle, un praticien demande aux partisans « d'une grève illimitée dès demain » de lever la main. Aucun décompte n'est effectué, mais la salle semble à peu près également répartie entre les partisans de la méthode forte (blocage sanitaire national) et ceux qui penchent pour un mouvement plus perlé et progressif.
Le Dr Philippe Cuq, du BLOC, clôture la séance de défouloir collectif. Lui aussi penche pour « le blocage sanitaire national, seule façon de faire plier » le gouvernement. « Nous avons la solution entre nos mains, si on ne le fait pas, on va mourir. »
Philippe Cuq propose lui aussi de continuer la mobilisation pendant l'été. « Ensuite, à la rentrée, on se met d'accord sur une date de début du mouvement de grève, sans fixer de date de fin. La France médicale s'arrête. »
Vers 19 heures, la réunion se termine. Mais elle continuera un bon moment dans les couloirs de l'hôpital et dans la rue, face à Cochin.
* MST, qui fédère une trentaine de syndicats de professionnels de santé
À la mémoire de notre consœur et amie
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