Pour économiser sur les produits pharmaceutiques, tous les moyens sont bons, relève l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) qui détaille dans une revue de littérature internationale* les méthodes de « désinvestissement ».
Radiation de la liste des produits remboursables, traitements limités à des sous-groupes de patients, baisses de prix ou de taux, génériques… : l'IRDES a inventorié les principaux leviers utilisés par l'Australie, le Canada, la France, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni.
La radiation pure et simple de la liste des produits remboursables n'est pas la solution la plus couramment utilisée. L'Australie, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande n'ont fait que rarement usage de cette arme. La France en revanche a radié 525 médicaments au cours des années 2000. La méfiance des États vis-à-vis de la radiation tient aux effets collatéraux qu'elle peut engendrer : opposition frontale des patients, prescripteurs et laboratoires, voire report de prescription vers des produits plus onéreux.
Le Royaume-Uni cible les populations
D'autres stratégies radicales sont privilégiées, comme les restrictions de traitement. Il s'agit de réserver le remboursement d'un produit à un sous-groupe identifié pour qui le traitement s'avère cliniquement plus efficace (des stratégies médico-économiques entrent également en ligne de compte). Le Royaume-Uni, coutumier de cette méthode, a obtenu pour certains médicaments des baisses de prescription de l'ordre de 78 %. En France, la méthode est plus subtile : depuis fin 2014, la prescription initiale de certaines statines est soumise à accord préalable de l'assurance-maladie. En Australie, la poursuite du traitement de certains médicaments est réservée « aux seuls patients dont la santé s'est améliorée ».
Autre voie – plus classique – explorée dans les pays étudiés : les baisses directes de prix (princeps ou génériques) ou de taux de remboursement. En 2010 en France, les pouvoirs publics ont baissé de 35 % à 15 % le taux de remboursement de certains médicaments à SMR faible. Autre solution tricolore : le tarif forfaitaire de remboursement (TFR), qui consiste à rembourser le princeps sur la base du prix moyen du générique.
Accords prix/volume
L'Australie a adopté une méthode plus complexe. Les laboratoires y sont tenus de rendre publics les prix de vente de leurs médicaments aux pharmacies, incluant les rabais consentis. Les pouvoirs publics calculent ensuite un prix moyen de vente incluant ces remises, et adaptent le remboursement consenti aux officinaux.
De son côté, le Canada négocie volontiers des accords prix/volume avec les fabricants. La Nouvelle-Zélande utilise de son côté la stratégie des appels d'offres (mise en concurrence de laboratoires proposant un produit similaire) et celle d'accords avec telle ou telle entreprise autour de plusieurs médicaments qu'elle produit.
Génériques et DCI
Le générique est un instrument majeur de maîtrise des dépenses. Au Royaume-Uni, certaines copies produites en grande quantité arrivent sur le marché à un prix d'à peine 10 % du tarif du princeps correspondant. La France et l'Australie ont encouragé la substitution par les pharmaciens, ou le tiers payant contre générique. Mais des freins demeurent. Dans l'Hexagone, l'obligation pour les praticiens de prescrire en DCI (dénomination commune internationale) depuis janvier 2015 n'est guère respectée, affirme l'IRDES, soulignant que « les médecins qui ne s'y conforment pas ne sont jamais sanctionnés ».
Certains États envisagent d'aller plus loin dans les économies avec le « coverage with evidence development » (CED), système qui conditionne la prise en charge à la production de données probantes ultérieures sur le médicament. Un dispositif proche de notre paiement à la performance. Cette technique a ses limites, juge l'IRDES. Aux Pays-Bas, deux traitements se sont avérés inefficients à l'aune du CED. Mais la décision de ne plus les rembourser a été abandonnée « face à la pression médiatique ».
*Questions d'économie de la santé (IRDES), n°220. « Stratégies de désinvestissement des produits pharmaceutiques : une revue de littérature internationale »
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