Pollution : le Pr Just défend l'allergologie lors d'une visite de Bernard Jomier à l'hôpital Trousseau

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Publié le 24/05/2016
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« La situation est très préoccupante », alerte le Pr Jocelyne Just, chef du service d’allergologie pédiatrique de l’hôpital Trousseau (Paris). « Il est urgent de prendre ce sujet à bras-le-corps, car c’est l’avenir et la santé de nos enfants qui est en jeu », insiste-t-elle profitant de la venue dans son service de Bernard Jomier, adjoint à la maire de Paris en charge de la santé, du handicap et des relations avec l’AP-HP. De fait, le niveau de pollution atmosphérique associé au réchauffement climatique et à l’appauvrissement de la diversité biologique dans nos villes constituent un cocktail détonant pour le système respiratoire.

En l’espace de 15 ans, rappelle le Pr Just, « on a constaté une véritable explosion du nombre de personnes touchées par les allergies respiratoires. Elles concernent de plus en plus d’enfants de plus en plus jeunes ». Si leur fréquence a clairement augmenté, leur intensité n’est pas en reste : « Ces allergies sont plus longues, souvent associées à des allergies alimentaires et on observe également des passages vers un asthme parfois sévère dans des proportions toujours plus importantes. »

Essences contre essence

Rappelant, à l’instar d’Anne Hidalgo, que « la santé doit être un déterminant et non une variable d’ajustement des politiques publiques », Bernard Jomier assure que la Mairie de Paris est particulièrement concernée par ces questions avec la mise en place en 2014 d’un plan de lutte contre la pollution chronique et, en fin d’année dernière, d’un «  Plan santé environnement ». La conduite d’études d’impact sanitaire lors des aménagements urbains, la question de la végétalisation urbaine et l’interdiction totale d’ici à 2020 des véhicules à moteur Diesel dans la capitale en sont les axes prioritaires. Des mesures nécessaires, mais pas suffisantes d’après le Pr Just.

Si elle salue l’introduction d’essences aussi diverses que possible dans l’espace urbain, à l’encontre de ce qui avait été fait après la tempête de 1995 et le reboisement systématique par des bouleaux ayant entraîné une explosion des allergies à ces pollens, le professeur est convaincu qu’il faut réduire l’ensemble du parc automobile. Certes, des études récentes montrant la présence de particules fines issues de la combustion du diesel dans les cellules pulmonaires de jeunes enfants et de nourrissons plaident en faveur d’un bannissement de ce type de motorisation, mais « les autres véhicules à essence génèrent également de la pollution atmosphérique et sont à l’origine des pics d’ozone aux conséquences extrêmement néfastes sur les personnes fragiles ».

Un parcours de soins inadapté

En attendant que les mesures prises par les décideurs inversent la courbe actuelle, l’accueil et le suivi des patients inquiète le Pr Just. Tout en appelant de ses vœux « une reconnaissance de l’allergologie dans notre pays », elle regrette que le parcours de soins des malades atteints par ces pathologies soit encore « mal défini et peu adapté ». Il est urgent, selon elle, de « mettre en place des centres de référence, labellisés experts », au même titre que ce qui a été fait pour le traitement des maladies rares. Aujourd’hui, ajoute-t-elle, « les patients arrivent soit trop tôt, soit trop tard faute de structures et d’orientation adaptées ».

Le fait que le service d’allergologie pédiatrique de Trousseau soit le plus sollicité de l’hôpital, avec une liste d’attente allant jusqu’à 6 mois et des malades qu’il faut refuser après examen de tous les cas, est le symptôme des lacunes du système en la matière. Sans compter que Paris ne compte aucun service d’allergologie pour adultes. « Il faut qu’une réflexion de fond soit menée à l’AP-HP sur ce problème, car, c’est une évidence, nous ne sommes pas assez nombreux pour faire face à l’afflux de ces patients », explique le Pr Just. Un problème qui restera insoluble « tant que les médecins ne seront pas formés en conséquence. »

Benoît Thelliez

Source : lequotidiendumedecin.fr