« SI, AU LIEU d’être victime de notre hypothétique inconscient freudien, nous étions victimes de notre conscience ? » est la question de fond de l’ouvrage de Philippe Presles, médecin, directeur de l’Institut Moncey et auteur d’ouvrages de prévention. Cette conscience, qui peut aussi être source de liberté, de contrôle de nos vies et de capacité d’arbitrer entre deux pulsions. La bonne question n’est pas forcément « Qui suis-je ? » mais « Qu’est ce qu’il me plairait de faire ou d’être ? », explique-t-il. Car si l’hyperconscience est capable de nous sauver dans des moments dramatiques, la conscience tout court nous guide chaque jour. À condition de l’exploiter au mieux, de la travailler, de l’explorer.
Mais qu’est au juste que cette fameuse conscience ? Les philosophes, les moralistes et les adeptes de la méditation en ont chacun leur définition. Les psychologues et les chercheurs en neurosciences, de Jean-Pierre Changeux à Gérald Edelman, en passant par Erich Fromm ou Csikszentmihalyi, s’y intéressent aussi à leur façon depuis quelques années, explique Philippe Presles.
Le saut de la conscience.
Nous naissons deux fois, explique l’auteur, une première fois en sortant du ventre de notre mère, une deuxième en devenant conscient de ce qui nous arrive : ce premier signe du saut de la conscience apparaît avec le dialogue intérieur vers 5 ans, l’intériorisation du langage et l’abandon du langage égocentrique. En devenant conscient, l’enfant peut se souvenir et non plus seulement mémoriser des émotions, donc devenir « le héros de sa propre histoire ». Prend forme ce que Philippe Presles appelle « l’alter ego », corollaire de cette capacité de décentration nouvellement acquise, permettant de « passer d’une pensée égocentrique à une pensée centrée sur l’autre mais aussi sur soi-même, considéré comme un autre ».
Cultiver cet alter ego.
Cette formidable étape, première porte vers la liberté, a quelques inconvénients, dont le plus douloureux est de se savoir mortel (puisqu’il est désormais possible de se projeter et de s’autoobserver dans l’avenir) mais aussi de grands avantages, parmi lesquels la possibilité de chercher et de donner un sens à sa vie. Et quelques corollaires, comme la prise de conscience de la nudité de soi et des autres (et l’acquisition de la pudeur), la découverte de l’humour et du mensonge (capacité à se projeter dans l’esprit de l’autre pour y provoquer une fausse croyance), voire l’expression d’une hyperconscience dans les situations extrêmes (accidents, maladies, contextes de vie remarquables).
Quand Philippe Presles s’électrocute en bricolant, que le haut de son corps est paralysé par le courant électrique, une petite voix calme et déterminée, qu’il reconnaît comme la sienne, lui enjoint de se servir de ses jambes encore mobiles pour s’échapper ; ce qu’il fait avec succès. Au-delà de ces expériences exceptionnelles (dont la similarité des récits est troublante), la conscience, interface autant qu’outil de régulation de nos comportements, nous rend acteur de notre propre vie et peut nous ouvrir vers une plus grande liberté à condition de savoir nous en servir.
L’auteur illustre et étaye son hypothèse d’histoires et de témoignages, de Tim Guénard à Bernard Giraudeau en passant par Mathieu Ricard ou Viktor Frankl, psychiatre rescapé de la Shoah, concepteur de la logothérapie (psychothérapie destinée à responsabiliser l’homme sur le sens de sa vie dans les moments d’épanouissement comme dans les épreuves), de données d’études de psychologie expérimentale passionnantes comme celle de Stanley Milgram, particulièrement éclairantes sur les ratés et les pièges de la conscience.
On l’aura compris, pour Philippe Presles, la conscience n’est pas pure abstraction. À nous d’en explorer et d’en exploiter toutes les facettes et les potentiels. Un plaidoyer pour la lucidité, la constance dans les actions, la valorisation de l’effort, gage de la responsabilisation de chacun. Bref, nous sommes ce que nous faisons, nous dit explicitement Philippe Presles.
Philippe Presles, « Tout ce qui n’intéressait pas Freud - L’éveil à la conscience et à ses merveilleux pouvoirs », Robert Laffont, 330 p., 20 euros.
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