Entretien avec le directeur du Centre Meary (AP-HP)

Pr Jérôme Larghero : « Les académiques vont pouvoir reprendre la main sur le développement des thérapies innovantes »

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Publié le 21/04/2020
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Avec ses 800 m 2, dont 250 m 2 de salle blanche, le Centre Meary mis en place par l'AP-HP est destiné à produire des médicaments de thérapie innovante au sein même du milieu académique. La récente autorisation de l'ANSM devrait permettre aux chercheurs académiques de reprendre la main sur le développement de ces médicaments du futur. Entretien avec le Pr Jérôme Larghero, de l'hôpital Saint-Louis et directeur du centre.
Pr Jérôme Larghero

Pr Jérôme Larghero
Crédit photo : DR

LE QUOTIDIEN : Pouvez-vous nous rappeler quel est l'objectif d'un centre tel que Meary ?

PR JÉRÔME LARGHERO : Notre centre de thérapie cellulaire et génique est une structure multi-projets, dont le but est de favoriser le développement d'essais cliniques dans le domaine des thérapies innovantes : des CAR-T cells dans le traitement des cancers hématologiques aux greffes de cellules souches mésenchymateuses dans les brûlures oculaires. Les thématiques sont très diverses. Une autre équipe va, par exemple, développer l'utilisation de lymphocytes T régulateurs en transplantation hépatique. Nous avons vocation à travailler aussi bien avec des acteurs académiques qu'avec des industriels, des start-up ou des « biotechs ».

Meary est une structure 100 % AP-HP, intégrée dans le département de biothérapie cellulaire dont les activités sont dédiées à la fabrication de greffons cellulaires et tissulaires, comprenant également l'Unité de thérapie cellulaire, la Banque de sang de cordon, le Centre d'investigation clinique en biothérapies et la Banque des tissus.

Que change pour vous l'autorisation de l'ANSM que vous venez d'obtenir ?

Avec l'autorisation de l'ANSM de produire ponctuellement des médicaments de thérapie innovante (MTI) et des MTI expérimentaux, nous sommes en mesure de produire des traitements répondant aux mêmes « bonnes pratiques de fabrication » que l'industrie pharmaceutique. Nous disposons de notre propre structure de production et de contrôle. Nous nous positionnons pour l'instant sur les étapes précoces de développement : les études de phase 1 et 2. Nous n'avons pas vocation à produire des milliers de lots par an mais à promouvoir l'innovation et le développement clinique de nouvelles biothérapies.

Plusieurs de vos collègues pointent du doigt le monopole de l'industrie sur la production de MTI et les prix qui en découlent. Une structure comme la vôtre ne serait-elle pas une opportunité pour les acteurs académiques de produire des thérapies cellulaires ou géniques à moindre coût ?

Le Centre Meary permet à des acteurs publics ou privés de poursuivre des études de phase 1, 2, voire 3, tout en bénéficiant d'un écosystème hospitalier et universitaire. Nous serons ensuite en mesure de nous tourner ensuite vers les industriels pour qu'ils assurent le développement de ce MTI à plus large échelle dont les fruits seront partagés plus équitablement.

Quelles sont les principales indications ? Vous concentrerez-vous sur des pathologies rares ?

Pas nécessairement. Depuis 20 ans, nous travaillons avec le Pr Philippe Menasché sur la thérapie cellulaire de l'insuffisance cardiaque qui touche un grand nombre de patients. A contrario, l'utilisation de lymphocytes T régulateurs est envisagée chez une population bien définie de patients transplantés hépatiques.

 

Propos recueillis par Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin