LA PRÉVENTION précoce, qui se matérialise par un ensemble d’actions mises en œuvre dès le plus jeune âge en direction d’une population présentant un risque de vulnérabilité, est, en France, un sujet à polémique. En 2005, la publication d’une expertise collective de l’INSERM sur les troubles de conduite chez l’enfant et l’adolescent avait provoqué l’ire de nombreux professionnels qui s’étaient regroupés dans un collectif, « Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans ». Les signataires de l’appel dénonçaient notamment les risques de stigmatisation ainsi qu’une conception prédictive de la délinquance juvénile. Il faut dire que la réception du rapport de l’INSERM s’articulait également avec celle d’un rapport sur la prévention de la délinquance remis au ministre de l’Intérieur.
Pour le Centre d’analyse stratégique (CAS), qui publie une note à ce sujet (strategie.gouv.fr), cet exemple de controverse s’explique d’abord par le fait que les finalités de la prévention « n’apparaissent pas toujours clairement ». « Elles oscillent entre prévention et prescription, souci du développement harmonieux des enfants et préoccupations d’ordre public par la lutte contre la délinquance juvénile ». Il importe donc de distinguer les politiques visant la promotion de l’épanouissement de l’enfant (acquisition de capital social) au sein des familles les plus vulnérables et celles dont l’objectif explicite est de prévenir la délinquance. Car même si les publics se recoupent parfois, « ils ne doivent en aucun cas être systématiquement assimilés, sous peine d’associer les publics les plus fragiles aux auteurs d’actes délinquants ». Le CAS estime que la pertinence et l’efficacité des programmes de prévention précoce reposent sur l’articulation de deux conditions : d’une part, « la complémentarité des dispositifs de prévention ciblés sur des facteurs de risques et des politiques globales à vocation universaliste » et d’autre part, « des procédures de recrutement des bénéficiaires qui garantissent leur libre adhésion et empêchent leur stigmatisation ». Les interventions précoces ciblées visent à « donner plus à ceux qui ont moins, dans une logique de compensation précoce, et à aller vers les publics qui sollicitent peu ou pas du tout les services sociaux ».
Des expérimentations.
Le CAS présente l’exemple de l’expérimentation CAPEDP (Compétences parentales et attachement dans la petite enfance : diminution des risques liés aux troubles de santé mentale et promotion de la résilience), dont le but est de favoriser le « développement harmonieux de l’enfant dans sa famille ». Initié par une équipe de recherche des hôpitaux Maison Blanche et Bichat, ce projet est né d’un double constat : l’augmentation des consultations en psychiatrie pour des enfants présentant des troubles du comportement et la corrélation statistique entre le fait de vivre dans des « contextes de vulnérabilité et l’expression d’une souffrance psychique ». L’expérimentation, commencée fin 2006, consiste à proposer une intervention précoce à domicile en direction de familles avec des risques de vulnérabilité psychosociale, depuis le troisième mois de grossesse de la mère jusqu’aux deux ans de l’enfant. Son évaluation (l’un des deux groupes de participants a bénéficié uniquement du dispositif de droit commun organisé par les services de la protection maternelle et infantile) devrait donner des premiers résultats en cours d’année.
Autre expérimentation : le programme « Parler Bambin »,qui entend intervenir de façon précoce en améliorant l’acquisition des compétences langagières des enfants de 18 à 30 mois. De nombreux travaux scientifiques montrent, en effet, que le niveau de développement des capacités langagières influe de façon importante sur la réussite scolaire. Initié et piloté par le Dr Michel Zorman, le projet (programme-parler.fr) consiste à organiser des ateliers de langage, animés par les personnels de crèches, trois fois par semaine pendant 20 minutes. L’évaluation de cette expérimentation montre une progression plus importante de l’acquisition du langage chez les enfants bénéficiaires, en particulier lorsque leur niveau de compétence initial était bas.
Trois conditions sont nécessaires pour la mise en place de ces programmes de prévention, précise le CAS : la visibilité des actions, l’évaluation de leurs effets et le respect de la diversité des personnes.
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