Le remboursement du test HPV en première intention dans le dépistage du cancer du col de l’utérus chez les femmes de 30 à 65 ans était attendu depuis plusieurs années par les professionnels de santé et les associations de patientes. Il a été officialisé en plein confinement par une parution au « Journal officiel » du 24 mars 2020, permettant la pleine application d’une recommandation émise par la Haute Autorité de santé (HAS) en juillet 2019 et d’un avis de l’Institut national du cancer (INCa) en 2016.
« Cela faisait des années que l’on attendait que les recommandations scientifiques et le remboursement convergent, se réjouit le Dr Bernard Huynh, gynécologue et trésorier de la Société française de colposcopie et de pathologie cervicovaginale (SFCPCV). Jusque-là, les recommandations étaient réservées aux femmes qui avaient les moyens de ne pas être remboursées. Nous pouvons désormais appliquer la meilleure médecine à toutes les femmes, quelle que soit leur condition économique ».
Un dépistage plus efficace
Déjà utilisé dans plusieurs pays européens, le test HPV permet en effet d’améliorer la détection des lésions précancéreuses, de détecter les précancers plus précocement que la cytologie et d’espacer l’intervalle entre deux dépistages grâce à une valeur prédictive négative de 95 à 98 %.
Concrètement, les recommandations de la HAS prévoient de maintenir le frottis cervico-utérin (FCU) comme examen de dépistage primaire pour les femmes de moins de 30 ans. Il est en revanche remplacé par le test HPV, chez les femmes de plus de 30 ans. En cas de résultat négatif, l’intervalle avant un nouveau dépistage passe de trois à cinq ans. En cas de résultat positif, un FCU sera réalisé en triage, s'il est positif, on réalise une colposcopie. En cas de FCU négatif, un contrôle HPV est recommandé à un an.
Le test HPV est également pris en charge pour décider d’une colposcopie chez les femmes présentant des atypies des cellules glandulaires (AGC), mais aussi pour la surveillance à un an après une colposcopie normale ou avec des lésions intraépithéliales de bas grade ou encore pour le suivi à six mois du traitement d’une lésion malpighienne intraépithéliale.
« Alors que l'on considère que le dépistage régulier de toute la population cible permettrait de réduire l'incidence du cancer du col de l’utérus de 90 %, le remboursement va favoriser l’accès aux tests de dépistage. C’est une excellente nouvelle », se félicite le Dr Jean-Baptiste Méric, directeur du Pôle Santé Publique et Soins de l’INCa. Selon les données de Santé publique France (1), « parmi les 17,8 millions de femmes âgées de 25 à 65 ans résidant en France, 10,4 millions avaient réalisé un FCU au cours de la période 2015-2017, soit un taux de couverture national de 58,7 % ». Le taux de couverture varie selon les territoires (de 42 % à 68 %) et diminue avec l’âge pour tomber à 44,2 % pour les femmes de 60 à 65 ans.
Passer le taux de couverture de 60 à 80 %
« Notre objectif est de faire passer le taux de couverture de 60 à 80 %, espère le Dr Jean-Baptiste Méric. Avec un meilleur taux de couverture, nous pourrons voir diminuer l’incidence et la mortalité de ce cancer ». L’Institut déploie depuis début 2019 un programme de dépistage organisé, dans le cadre duquel les femmes qui ne bénéficient pas de dépistage reçoivent une invitation par courrier.
Du côté des professionnels, un grand nombre est habilité à réaliser le prélèvement : « aussi bien les médecins traitants et les gynécologues que les sages-femmes ou les laboratoires de biologie médicale pourront effectuer le prélèvement sur prescription », rappelle le Dr Jean-Baptiste Méric.
« Il n’y a pas d’inquiétude pour la réalisation des tests HPV. L’enjeu porte sur la prise en charge des tests anormaux, estime le Dr Bernard Huynh. Il faudra faire plus de colposcopies et qu’elles soient de qualité ». La SFCPCV, qui avait exprimé des craintes quant au nombre de spécialistes expérimentés, se veut plus rassurante et s’investit dans ce domaine, à la fois dans la formation à la colposcopie et dans l’assurance qualité de ces examens.
L’INCa élabore par ailleurs un contenu et des supports de formation à destination des professionnels de santé. Des sessions de formation et d’information seront organisées dans les prochains mois, par les centres régionaux de coordination des dépistages des cancers. La communication adressée au grand public a, quant à elle, été reportée en raison de la crise sanitaire. Après un arrêt du dépistage pendant le confinement, le défi est également de reprendre la prévention, sans qu'un calendrier n'ait été encore précisé. « Les choses se remettent en place progressivement, observe le Dr Bernard Huynh. Les patientes, même les plus inquiètes ou les plus à risque face au Covid, reprennent le chemin du dépistage et de la prévention, conscientes que le dépistage leur donne un avantage ».
(1) Hamers FF, et al. Couverture du dépistage du cancer du col de l’utérus en France, 2012-2017. Bull Epidémiol Hebd. 2019;(22-23):417-23. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2019/22-23/2019_22-23_2.html
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