C’EST RELÂCHE pour les députés cette semaine, les travaux parlementaires étant suspendus jusqu’au 2 mars. Mais, après deux semaines d’examen de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) à l’Assemblée nationale, le décor de la réforme Bachelot est maintenant planté.
Les bancs du Palais Bourbon étaient clairsemés lors des discussions sur le titre I du texte, consacré à l’hôpital : une cinquantaine de députés ont ferraillé dans les bons jours. « Les élus sont surchargés par l’examen des textes qui se succèdent, plaide la députée communiste Jacqueline Fraysse. Alors rester en séance tous les jours jusque tard dans la nuit, cela demande de l’endurance ! Cela dit, la majorité [qui a déposé la majorité des amendements, NDLR] aurait pu être davantage présente pour un texte de cette importance. Un nombre non négligeable de ses amendements sont tombés du fait que les députés concernés, absents le soir, ne les avaient pas défendus en séance ». Selon Yves Bur (UMP), un tiers des amendements sont ainsi passés à la trappe, faute de combattants pour les défendre. « Le débat sur la réforme de l’hôpital est vraiment devenu l’affaire de spécialistes, et notamment d’élus praticiens hospitaliers qui évoquent leur propre expérience, avec pour corollaire d’éloigner ceux qui ne le sont pas », ajoute le député du Bas-Rhin.
Consignes à l’UMP ?
« Le présentéisme est plutôt bon pour un texte technique, rectifie Jean-Marie Rolland, député UMP de l’Yonne et rapporteur du projet de loi, mais les débats sont lents dans la mesure où l’opposition fait de la surenchère ». Les mêmes visages (des médecins, très souvent) se sont jusqu’à présent succédé pour prendre la parole, défendre un amendement, mettre leur grain de sel. Des critiques acerbes se sont fait entendre de la part de Marisol Touraine (PS), de la cardiologue Jacqueline Fraysse ou de l’urologue Bernard Debré, franc tireur de l’UMP. Ont également fusé les bons mots de Jean-Marie Le Guen (PS et médecin de santé publique), les innombrables amendements de Jean-Luc Préel (Nouveau Centre et patron de service hospitalier) Et pour la majorité ? Pas grand-chose, à vrai dire. « Une très forte majorité défend la réforme de l’hôpital », affirme Jean-Marie Rolland. Le projet de loi défendu par la ministre Roselyne Bachelot bénéficie du « soutien de l’UMP », confirme Yves Bur, « malgré les dissonances avec Bernard Debré », ce dernier s’étant souvent exprimé de concert avec des élus du Nouveau Centre et de la gauche.
Les parlementaires de l’UMP auraient-ils eu des consignes pour rejeter tous les amendements de l’opposition qui pourraient dénaturer le texte, et pour écourter les débats ? Ceux-ci s’en défendent. Pourtant, Jean-Luc Préel, député de Vendée, auteur de plus de 200 amendements avec le Nouveau Centre, a l’impression que « l’UMP ne veut rien changer à la ligne directrice de son texte qu’elle trouve excellent ». « Le gouvernement a repoussé tous les amendements sur les CME, souligne pour sa part le socialiste Jean-Marie Le Guen, si bien que le texte, chimiquement pur, donne un pouvoir exorbitant au directeur d’établissement - avec la normalisation financière pour unique mandat -, et marginalise les CME et les usagers. L’objectif de la loi n’est donc pas la qualité des soins ! ».
« Il n’y a aucun rejet systématique d’amendements, assure Jean-Marie Rolland. C ’est un reproche traditionnel mais nous allons sortir des statistiques sur ceux reçus et ceux rejetés pour montrer que cette accusation est infondée ! » Au contraire, selon le rapporteur, l’opposition essaierait « de fâcher » le gouvernement avec les médecins hospitaliers. « J’ai prévenu le ministère de la Santé de faire attention à ne pas fermer les yeux sur la fronde des médecins hospitaliers, qui sont vent debout contre la réforme, lâche un député spécialiste des questions de santé. Il ne faudrait pas que Roselyne Bachelot devienne une Valérie Pécresse… ».
Vers une semaine supplémentaires de débats.
Quoi qu’il en soit, les discussions dans l’Hémicycle devraient prendre une autre tournure au retour de vacances des élus, lundi prochain. Yves Bur promet un « débat plus politique et plus animé », dès lors que « les parlementaires représentant les territoires seront là » pour se pencher sur le titre II du projet de loi intitulé « l’accès de tous à des soins de qualité ». « Il y a une incertitude quant à la reprise ou non des amendements adoptés en commission afin d’aller plus loin en matière de permanence des soins et d’installation des professionnels, poursuit-il. Certains d’entre eux, désincitatifs voire plus contraignants (que les dispositifs existants) pourraient rassembler des députés de gauche et de droite, malgré un avis défavorable du gouvernement ». Après deux semaines d’échanges « très hospitalo-centrés », le chirurgien-dentiste Marc Bernier (UMP) estime que les parlementaires devraient « se mobiliser sur les titres II et IV » (consacré aux Agences régionales de santé ou ARS). Les thèmes abordés « vont commencer à intéresser bougrement les députés de tout bord et créer des clivages », pronostique celui qui fut rapporteur de la Mission d’information Offre de soins. D’ailleurs, Marc Bernier se réjouit que le rapport de cette mission (dans lequel il a formulé 30 propositions) soit « un best-seller » auprès de ses pairs, au point d’être en rupture de stock à l’Assemblée. En matière de démographie médicale, « nous vivons le début d’une crise sanitaire pour les 10 à 15 ans qui viennent » puisqu’il y aura « 30 000 médecins de moins d’ici 2025 », rappelle-t-il. Quand bien même la ministre de la Santé a réaffirmé le maintien du principe de liberté d’installation, le député de la Mayenne craint que « les mesures incitatives ne suffisent pas pour les zones les moins attractives », en passe de devenir bientôt de vrais « déserts médicaux ». « Les amendements que je propose ne sont pas des déclarations de guerre, fait-il valoir . Mais moi, j’irai au combat parce qu’à mon avis, je suis dans le vrai. J’étais avec les ruraux et les représentants des organismes agricoles au côté de Nicolas Sarkozy lors de son déplacement dans le Maine-et-Loire [le 19 février, NDLR] : ils attendent qu’on aille plus loin. Il faut quand même être courageux et poser au moins des jalons à l’Assemblée pour l’avenir ».
Enfin, les articles relatifs à l’alcool et à l’obésité (titre III sur la prévention et la santé publique) devraient, eux aussi, constituer un autre temps fort du débat parlementaire autour du projet de loi HPST. Marc Bernier s’attend à ce que les députés passent « un temps fou dessus ». Yves Bur prévoit « la présence de tout le lobby du vin » dans l’Hémicycle, et observe que « Danone et l’ANIA [l’Association nationale des industries alimentaires, NDLR] sont déjà à la manuvre ».
La loi pourra-t-elle être examinée à l’Assemblée nationale d’ici le 12 mars, date de fin programmée ? « Ca va être un peu juste », reconnaît Jean-Marie Rolland. C’est pourquoi il « a prévu sur (son) agenda une semaine supplémentaire ».
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