PAR LE Pr THIERRY THOMAS*
L’ACTIVITÉ PHYSIQUE, une approche non pharmacologique de l’ostéoporose. Toutes les 20 secondes une fracture due à l’ostéoporose survient en France. Cette statistique est révélatrice de l’importance des maladies ostéo-articulaires qui représentent les causes les plus fréquentes de douleurs et d’incapacité physique chez les seniors. L’incidence de l’ostéoporose et de ses complications fracturaires augmente du fait du vieillissement et de la sédentarité croissante des populations. L’ostéoporose est une maladie systémique du squelette, caractérisée par une masse osseuse réduite et une détérioration architecturale du tissu osseux conduisant à un accroissement de la fragilité osseuse et un risque accru de fracture. Les mesures de prévention reposent sur des apports suffisants en calcium et vitamine D et une activité physique régulière. Récemment, il a été montré que des stimuli mécaniques cycliques de très basses amplitudes délivrés par des plateaux vibrants corps entier ont un potentiel ostéogénique. Cette stratégie pourrait constituer une alternative aux activités physiques soutenues devant comporter impacts et charges suffisamment importants pour être efficaces sur le squelette. On sait en effet que les sujets non sportifs ne suivront pas de programme d’activité physique au long cours. De plus des activités soutenues chez les sujets âgés peuvent elles-mêmes augmenter le risque fracturaire. La vibration corps entier (VCE) pourrait donc apparaître plus attractive aux personnes non sportives ou âgées comme approche non pharmacologique de prévention de la fragilité osseuse.
Les effets des vibrations corps entier sur le tissu osseux.
Depuis quelques années, de nombreuses marques vantent la VCE pour ces effets bénéfiques sur la force musculaire et le tissu osseux, en plus d’autres effets physiologiques. Si quelques publications vont effectivement dans ce sens, ces effets restent largement à démontrer. De surcroît, les standards d’utilisation de la VCE n’ont été ni établis ni validés dans différentes catégories de populations, particulièrement celles à qui la technique pourrait être destinée.
Plusieurs études ont été publiées chez l’animal. L’étude princeps montrait une augmentation de 34 % de la masse osseuse fémorale de brebis adultes après un an de vibration des pattes postérieures. Par la suite quelques travaux ont été effectués chez des rongeurs montrant une stimulation de la formation osseuse après plusieurs semaines, capable d’atténuer la perte osseuse.
Quelques études chez l’humain ont également été publiées. Chez des jeunes femmes à DMO basse, la pratique quotidienne de VCE pendant 12 mois a entraîné un gain d’os trabéculaire au niveau lombaire. Chez des enfants handicapés, l’utilisation de VCE pendant 6 mois a également augmenté le volume osseux au tibia par rapport aux valeurs initiales. Cependant, la VCE appliquée 3 à 5 fois par semaine grâce à une plateforme oscillante n’a pas eu d’effet sur le squelette de jeunes adultes sains. Les études conduites chez des femmes après la ménopause ont des résultats tantôt positifs, tantôt nuls selon les conditions de réalisation et le niveau habituel d’activités.
Une étude française conduite sur un an.
La VCE pourrait également augmenter la force musculaire et les performances, comme cela a été montré chez des sportifs jeunes. Cependant, les études s’adressant aux populations âgées ou fragiles sont encore rares. Par exemple, 6 semaines de VCE chez des sujets âgés institutionnalisés améliorent la mobilité, les forces musculaires, la posture et l’équilibre, démontrant ainsi l’applicabilité et le bénéfice de cette technique chez des sujets très fragiles. Des sujets âgés effectuant deux mois de VCE en plus d’un programme d’exercices physiques de routine améliorent leur capacité de marche par rapport à ceux qui effectuent seulement les exercices. Après un an de VCE, les gains de force et masse musculaire sont équivalents aux gains observés après un programme de fitness chez des hommes âgés. Les connaissances des effets de la VCE sur d’autres tissus ou systèmes sont encore plus éparses ou quasiment nulles. C’est le cas pour le cartilage, la composition corporelle, les réponses hormonales, la perfusion tissulaire ou la vascularisation périphérique. Il s’agit pourtant de notions importantes à connaître pour apprécier le rapport bénéfices/risques chez des sujets potentiellement à risque.
Toutes ces incertitudes nous ont conduits à mettre en place une étude visant à évaluer chez des sujets à risques (55 à 75 ans) le bénéfice multi-tissus de la VCE pratiquée pendant un an, en utilisant de nombreuses techniques de mesure incluant bien sûr la mesure de la DMO par absorptiométrie biphotonique (DXA), mais aussi la tomographie haute résolution (Xtreme-CT, Scanco Medical), des mesures de force musculaires par isocinétisme et plateforme de force, des dosages de marqueurs du cartilage… Nous espérons ainsi apporter des réponses plus formelles à l’intérêt de ces plates-formes vibrantes qui connaissent actuellement un engouement important, sans réelle validation scientifique.
*Service de Rhumatologie et INSERM U1080, CHU de Saint-Étienne.
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