Si beaucoup de médecins s’engagent bénévolement pour venir en aide aux migrants syriens, arrivés massivement en Allemagne ces deux dernières semaines, leurs représentants officiels s’inquiètent de l’insuffisance des structures sanitaires mises à leur disposition. L’afflux de migrants, s’il est mal pris en charge médicalement, menace non seulement leur propre santé, mais aussi celle de la population allemande en général, souligne l’Ordre des médecins.
Le Dr Frank Ulrich Montgomery, président de l’Ordre fédéral des médecins, appelle tous ses confrères, actifs ou retraités, à se mobiliser pour les migrants, mais attend aussi du gouvernement une mobilisation beaucoup plus forte en matière de santé, tant en matière de structures que de personnel. Les médecins employés par l’État, notamment les praticiens de santé publique, devraient coordonner rapidement l’ensemble des prises en charge médicales. L’Ordre, mais aussi l’association des pédiatres, s’inquiète des contrôles sanitaires insuffisants des migrants et redoute la réapparition de maladies infectieuses en Allemagne, en particulier des tuberculoses multirésistantes.
Polémiques sur le financement des soins
Aux insuffisances sanitaires s’ajoutent des polémiques sur le financement et la prise en charge des soins médicaux. Si beaucoup de médecins travaillent bénévolement, l’organisation générale des structures incombe aux régions et aux communes, une situation provisoire qui ne pourra pas durer. Certaines villes et régions à majorité socialiste souhaitent que les migrants bénéficient rapidement de cartes d’assurés sociaux qui leur donneraient les mêmes droits que les Allemands et leur permettraient de se faire soigner dans les structures de soins officielles, hospitalières comme libérales. Les régions et villes chrétiennes démocrates, elles, s’opposent à la généralisation des cartes santé pour les migrants, car celle-ci aurait, selon elles, un effet incitateur qui augmenterait encore le nombre de migrants se rendant en Allemagne. Quelques villes ont trouvé une solution intermédiaire : les demandeurs d’asile en attente de décision disposent de cartes de santé « light », qui leur garantissent des soins médicaux de base, limités à un certain nombre de prestations essentielles.
Crainte d’une recrudescence des maladies infectieuses
Sur place, les migrants sont rassemblés dans des centres de transit ou, souvent, dans des anciennes casernes ou des établissements publics désaffectés. Selon les médecins qui y travaillent, les conditions médicales sont très variables, avec trop peu de matériel d’examens et une hygiène très insuffisante. À Dresde, par exemple, les médecines bénévoles œuvrant dans un centre d’accueil accueillant un millier de migrants relèvent que 10 % d’entre eux ont besoin de soins médicaux, mais que les conditions de travail évoquent plus « un hôpital militaire de campagne » que des structures réellement adaptées, alors même que les migrants n’ont pas accès aux structures de soins officielles de la ville. Ici aussi, les médecins s’inquiètent avant tout de la recrudescence des maladies infectieuses, d’autant plus que de nombreux migrants sont arrivés en Europe malades et extrêmement affaiblis. Au-delà du « devoir humanitaire » fréquemment cité par les personnalités politiques allemandes, l’arrivée, parmi les réfugiés, de nombreux jeunes forts d’un bon niveau d’études pourrait aussi contribuer à réduire les problèmes démographiques dont souffre l’Allemagne, y compris en matière de santé : visitant il y a quelques jours un grand centre d’accueil installé à Lebach, en Sarre, le ministre de la Santé, Hermann Gröhe, a rappelé que beaucoup de migrants pourront trouver des emplois dans la santé, ou faire des études de santé en Allemagne.
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