D'un ciel gris à rose, de la précarité à la stabilité. Les praticiens à diplôme étranger hors Union européenne (PADHUE) vont-ils enfin voir leur horizon s'éclaircir ?
L'avenir de 4 000 à 5 000 de ces professionnels a en tout cas fait l'objet d'une concertation urgente, vendredi dernier, sous la houlette de la direction générale de l'offre de soins (DGOS, ministère). PADHUE, syndicats de praticiens hospitaliers, jeunes, directeurs, doyens, présidents de CME et Fédération hospitalière de France planchent, avec l'appui de l'Ordre et du Centre national de gestion (CNG), sur la sécurisation du statut de ces médecins.
Généralistes, anesthésistes, chirurgiens, cardiologues, gériatres ou exerçant une autre spécialité, ces professionnels, pour la plupart en provenance du Maghreb et du Moyen-Orient, sont confinés dans les hôpitaux français dans des statuts instables et sans garantie professionnelle. Pour certains, depuis des dizaines d'années.
Vulnérabilité
La situation est critique pour 500 d'entre eux, inscrits sur la liste C (encadré) et dont l'autorisation d'exercice prend fin le 31 décembre 2018. Si rien n'est fait, ils devront quitter leur hôpital et leur service, au risque de voir l'organisation interne vaciller. « Les PADHUE travaillent pour l'essentiel dans des hôpitaux de moyenne importance, ils complètent des équipes en souffrance, analyse le Dr Thierry Godeau, président de la conférence des présidents de CME de centres hospitaliers. Les établissements auraient du mal à fonctionner sans eux. »
Hors liste C, quelque 4 000 autres professionnels souffrent d'une grande vulnérabilité professionnelle. Recrutés par les hôpitaux sans autorisation d'exercice, pour certains après avoir été recalés au concours de la liste A, ils exercent dans l'ombre comme faisant fonction d'interne (FFI) ou praticiens attachés associés.
Un sursis en attendant mieux
Alors que les syndicats ont multiplié les signaux d'alerte – le SNPADHUE a organisé mi-novembre une manifestation sous les fenêtres d'Agnès Buzyn –, le gouvernement semble déterminé à trouver une solution.
D'abord transitoire, au regard de l'urgence : portée par le député LREM Julien Borowczyk, une proposition de loi examinée en commission des Affaires sociales de l'Assemblée mercredi prochain doit permettre à « plusieurs centaines » de praticiens (interdits d'exercice à compter du 31 décembre) d'obtenir un nouveau délai de deux ans jusqu'en 2020. « Nous voulons sortir de la zone grise et sécuriser l'exercice et les compétences de ces médecins, confirme Cécile Courrèges, à la tête de la DGOS. La proposition de loi prolonge la situation actuelle de deux ans pour éviter le couperet du 31 décembre 2018 mais elle ne donne pas de nouveau cadre d'exercice à ces praticiens. Le futur projet de loi santé, examinée au premier trimestre 2019 par le Parlement, nous permettra de donner un régime d'exercice définitif aux PADHUE. »
VAE médicale
C'est en effet le deuxième étage de la fusée PADHUE. Le ministère veut entériner un nouveau mode de vérification des connaissances selon un mécanisme en deux temps.
Sélective, la liste A serait maintenue pour les nouveaux entrants par spécialité mais aussi par lieu, pour mieux coller aux besoins du terrain.
Quant aux PADHUE déjà en France, ils devraient réussir un contrôle des compétences à la carte, sur le modèle de la validation des acquis de l'expérience (VAE), selon leurs titres, diplômes, expériences et selon les critères d'acceptation de la commission d'autorisation d'exercice de leur spécialité. Après plusieurs filtres – dont un passage devant une commission régionale ad hoc – et uniquement en cas de succès, l'affectation définitive des candidats serait décidée par le ministère de la Santé.
Les syndicats de praticiens concernés veulent croire que, cette fois, leur exercice sera sécurisé. La Fédération des praticiens de santé (lire page 3) est « globalement satisfaite » des orientations et salue l'écoute attentive d'Agnès Buzyn.
« Si le plan présenté par la DGOS s'applique tel quel dans la réalité, les problèmes des PADHUE sont résolus, c'est une bonne nouvelle, s'est également réjoui vendredi le Dr Mohand Said Benoufella, membre du SNPADHUE et chirurgien viscéral en Seine-et-Marne. Nous sommes sur la même ligne : nous ne voulons pas régulariser à tout prix tous les PADHUE mais sécuriser une bonne fois pour toute l'exercice des meilleurs. »