Choquants, pourvoyeurs d'un sentiment d'échec et de culpabilité chez les professionnels, les suicides ou tentatives en milieu de soins peuvent néanmoins être prévenus. D'où la publication par la Haute Autorité de santé (HAS), ce 8 septembre (à deux jours de la Journée internationale de prévention du suicide le 10) de préconisations destinées aux établissements de santé et structures médico-sociales, et à leurs équipes.
Pour ce faire, la HAS a analysé 795 cas de suicides et tentatives de suicides (TS) (près de 64 % ont abouti au décès) déclarés dans le cadre du dispositif national de déclaration des événements indésirables graves (EIGS) associés aux soins entre mars 2017 et juin 2021. Les décès concernent principalement les hommes âgés ainsi que les patients atteints de troubles de l’humeur. La HAS souligne la sous-déclaration importante de ces EIGS, notamment par la médecine de ville, et les failles dans leur qualité, ce qui ne permet pas d'en tirer des conclusions générales sur le risque suicidaire en milieu de soin.
Évitables dans plus de 60 % des cas
« Tous les secteurs délivrant des soins sont concernés par la survenue de suicides et tentatives de suicide : les établissements de santé, les institutions médico-sociales et la ville. Aucun secteur n'échappe à ce risque, même si les services de psychiatrie sont les premiers déclarants », lit-on. Ces derniers représentent la moitié des déclarations des établissements sanitaires (eux-mêmes à l'origine de 82 % des déclarations).
Au regard des quelque 800 cas déclarés, plusieurs causes profondes récurrentes se distinguent : le manque de sécurisation des locaux, l'absence d'évaluation du risque suicidaire, le manque de formation en psychiatrie et santé mentale des professionnels de santé, des défauts organisationnels, la surcharge de travail, l'insuffisance de la communication entre les équipes. Le défaut de prise en charge est aussi pointé du doigt. Les tentatives de suicide et suicides sont dans 61,4 % des cas estimés comme évitables par le déclarant, lit-on.
Repérer, informer et débriefer
La HAS résume la prévention en quelques messages clés : penser à repérer systématiquement le risque suicidaire et à repérer les troubles de l’humeur ; penser à informer sur les dispositifs de soutien existants (exemples : VigilanS, SOS Amitié France…) ; et ne pas négliger la postvention (intervention après un suicide auprès de l'entourage). Quatre messages que les professionnels peuvent retrouver dans un Flash sécurité patient, illustré par quatre situations.
Plus largement, la HAS invite les établissements à définir des objectifs de prévention du suicide dans leur projet ou programme, et à sécuriser l'environnement en limitant l'accès aux moyens létaux (points de fixations et liens pour la pendaison ou la strangulation, accès aux terrasses, escaliers et fenêtres, sacs plastiques et sacs-poubelles, médicaments, objets coupants, briquets et sèche-cheveux).
Les équipes doivent, elles, évaluer le risque de suicide du patient sur la base de facteurs multidimensionnels comme les antécédents personnels (anciennes tentatives de suicides, addiction en phase de sevrage, dépression, troubles de la personnalité…) ou la survenue d'événements négatifs (perte, conflits, problèmes financiers, dates anniversaires traumatiques, annonce d'un diagnostic ou de soins lourds…). La situation clinique du patient doit aussi être évaluée, et un dépistage de la dépression et des idées suicidaires est particulièrement pertinent pour des pathologiques physiques, souligne la HAS, en particulier lorsqu'il s'agit d'un cancer.
En cas de crise suicidaire, la HAS suggère de construire un plan personnalisé de sécurité quant à l'accès aux moyens de suicide et au parcours du patient dans l'immédiat et dans les jours à venir. Elle donne enfin des conseils pour savoir gérer l'après : par exemple, inscrire le patient suicidant dans le dispositif de recontact VigilanS et accompagner les équipes soignantes dans l'épreuve.
Ces préconisations sont déclinées par secteur d'activité de façon plus spécifique : établissements de santé mentale (avec des préconisations particulières pour les soins sans consentement et le recours à la chambre d'isolement), établissements Médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) et Soins de suite et de réadaptation (SSR), établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes (Ehpad).
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