Quelles stratégies ont fait leurs preuves dans la lutte contre le Covid-19 ? À cette question, un groupe de 80 chercheurs (1), principalement anglo-saxons, propose un consensus dans « The Lancet ». Baptisée « John Snow Memorandum », en référence à la quête portée par le héros de la série « Game of Thrones », la lettre est ouverte aux signatures.
Alors que la deuxième vague de l’épidémie touche l’Europe, ces scientifiques avertissent qu’une stratégie d’immunité collective (développement d’une immunité dans les populations à faible risque en protégeant les plus vulnérables) est une « erreur dangereuse non étayée par les preuves scientifiques ».
Ces chercheurs rapportent que les mesures de restrictions (fermeture de certains lieux, restrictions de déplacement, télétravail, etc.) sont les seules à avoir démontré leur efficacité pour contrôler l’épidémie et préserver la société et l’économie.
Les stratégies d’immunité collective, jugées « imparfaites », sont d’abord difficilement applicables, dans la mesure où il n’est pas possible de limiter les flambées incontrôlées à certaines couches de la société et où l’isolement d’une large partie de la population serait contraire à l’éthique — les personnes vulnérables pouvant représenter jusqu'à 30 % d’une population.
Une transmission incontrôlée chez les personnes plus jeunes entraînerait ensuite « d’importants problèmes de santé et de décès dans l'ensemble de la population » et même « des épidémies récurrentes » durant plusieurs années, si l’immunité acquise après une infection n’était pas durable, mais décroissante.
Cette approche risque d’avoir un impact sur « la capacité des systèmes de santé à fournir des soins aigus et courants », avertissent les auteurs. « Un fardeau inacceptable pour les professionnels de santé, dont beaucoup sont morts du Covid-19 ou ont subi un traumatisme pour avoir exercé une médecine de catastrophe », préviennent-ils.
Une vie « presque normale »
À l’inverse, les stratégies de restrictions ont le mérite d’éviter un confinement aux effets désastreux tout en préservant une vie « presque normale ». Le contrôle du nombre de cas permet la détection rapide des flambées localisées et de mettre en œuvre le triptyque prôné par l’OMS, « tester – tracer – isoler ».
Le déploiement de telles stratégies doit accorder une attention particulière aux plus vulnérables avec « des programmes financiers et sociaux qui s'attaquent aux inégalités amplifiées par la pandémie », insistent les signataires.
« Jusqu'à ce que des vaccins et des traitements sûrs et efficaces arrivent dans les mois à venir (…), il est essentiel que nous agissions de toute urgence sur la base des preuves », concluent-ils.
N Alvan et al .The Lancet, 2020. doi.org/10.1016/ S0140-6736(20)32153-X
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