Par le Pr JACQUES CLEMENTY*
LA CARDIOLOGIE se prête particulièrement à l’utilisation de la télémédecine dans ses différentes applications – téléconsultation, téléassistance, télésuivi, téléexpertise, téléimagerie. Cela en raison de l’accroissement de certaines affections cardio-vasculaires dont la prise en charge peut être facilitée par des appareils télécommuniquants, mais aussi de la stagflation du nombre de cardiologues dont, par ailleurs, la répartition territoriale est très hétérogène et dont la charge de travail s’accroît régulièrement avec la mise en œuvre de techniques de plus en plus sophistiquées et de plus en plus chronophages.
La télésurveillance est un des champs d’applications majeurs de la télécardiologie.
Des stimulateurs et des défibrillateurs implantés, télécommuniquants existent depuis dix ans, leur fiabilité est démontrée. Le télésuivi évite le déplacement des patients. Il permet une détection précoce des anomalies techniques et rythmiques et leur prise en charge rapide. Le temps médical consacré à la surveillance de ces appareils est réduit au prix d’une organisation relativement simple. Certains appareils de télésuivi sont déjà remboursés par l’assurance-maladie. Pour le constructeur, la matériovigilance est affinée. Pour l’assurance-maladie, le coût des transports médicalisés est significativement réduit.
Les patients dépendants, âgés, accueillis en institution.
Les chutes, les malaises, l’hypertension artérielle mal contrôlée, les douleurs thoraciques sont des doléances très fréquentes chez les sujets âgés institutionnalisés. Leur prise en charge est compliquée de par les difficultés à déplacer ces patients, souvent handicapés ou déments.
La téléconsultation permet aujourd’hui de réaliser des auscultations, des lectures d’électrocardiogrammes, des surveillances tensionnelles à distance, sans avoir à déplacer les patients. Cela permet de séparer ceux qui peuvent être directement traités par le médecin responsable de la maison de santé, de ceux qu’il faut obligatoirement hospitaliser ou qui justifient d’un contrôle cardiologique face à face.
Les cas d’insuffisances cardiaques sont en augmentation rapide.
Les patients atteints d’insuffisance cardiaque doivent être éduqués et surveillés pour éviter les épisodes de décompensations qui sont à l’origine d’hospitalisations coûteuses.
Grâce aux appareils télécommuniquants (tensiomètre, ECG, oxymètre, pèse-personne, etc.), la télémédecine permet un suivi régulier en collaboration avec les acteurs paramédicaux, le personnel d’aide à domicile et même les pharmaciens qui pourraient être ainsi impliqués dans le suivi des patients en insuffisance cardiaque.
L’imagerie médicale dans les structures isolées.
Qui n’a pas été confronté au besoin d’un avis plus spécialisé sur la conduite à tenir devant, par exemple, des atteintes coronaires plus ou moins complexes ? La téléassistance, la télé-expertise et la téléimagerie permettent de transmettre les images à un centre expert et discuter les indications de revascularisation avec les médecins et les chirurgiens de ce centre, cela sans déplacement du médecin, afin de prendre des décisions parfaitement adaptées aux besoins du patient.
La téléassistance.
Elle permet aux services qui accueillent des urgences d’aider les structures de terrain (médecins généralistes, pompiers) pour des conduites thérapeutiques adaptées (fibrinolyse, traitement antiarythmique) avant l’hospitalisation du patient.
On pourrait citer bien d’autres applications, comme, par exemple, le suivi tensionnel régulier des hypertensions sévères ou compliquées d’insuffisance rénale.
En synthèse.
La télécardiologie nécessite organisation, formation, équipement et financement, et c’est le rôle des pouvoirs publics et des sociétés savantes de l’organiser et d’aider à sa mise en place. Mais la télémédecine c’est avant tout une révolution culturelle pour le patient et pour le médecin, « formatés » de longue date à la consultation face à face et au paiement à l’acte. Il faut accepter la délégation d’activité à des machines dont la fiabilité est prouvée, savoir partager la prise en charge des patients avec les autres acteurs de la santé, en particulier les paramédicaux, cela pour un meilleur suivi et une meilleure qualité de vie des patients, et une meilleure organisation du temps médical.
L’intégration de la télémédecine à l’activité professionnelle des cardiologues est en marche. La progression est absolument inéluctable, les applications sont nombreuses et il est évident que lorsque « la génération de l’ordinateur portable » arrivera à l’âge de maladie, elle acceptera plus facilement – et même, probablement, exigera – de pouvoir bénéficier des progrès en termes de prise en charge et d’éducation que peuvent lui apporter les techniques de la télémédecine.
*CHU de Bordeaux.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation