Antalgie

Cancer : traiter les accès douloureux paroxystiques

Publié le 14/03/2014
Article réservé aux abonnés

Survenant chez un patient par définition traité pour une douleur chronique cancéreuse, ces exacerbations répondent efficacement au fentanyl transmuqueux.

DÉFINITION

Chez un patient ayant des douleurs chroniques d’origine cancéreuse, les accès douloureux paroxystiques (ADP) sont une exacerbation transitoire et de courte durée de la douleur, d’intensité modérée à sévère (1, 2). Le paroxysme est atteint en moins de 3 minutes. Dans la moitié des cas, la douleur dure plus de 30 minutes. Ils surviennent sur une douleur de fond contrôlée par un traitement opioïde fort efficace.

› Par définition, l’ADP survient sur une douleur de fond bien contrôlée. Si ce n’est pas le cas, il ne s’agit pas d’ADP. Il peut s’agir d’un traitement insuffisant, d’un échappement thérapeutique et, notamment des douleurs de fin de dose… Ces accès douloureux survenant en fin de dose justifient une augmentation de la dose ou du nombre d’inter-doses de morphiniques.

› Ces douleurs aiguës peuvent être spontanées et imprévisibles, survenant sans facteurs déclenchants ou à l’occasion de toux, d’éternuement, de spasmes digestifs, de céphalées... Ils peuvent aussi être prévisibles lors d’actions volontaires du patient (mouvement, alimentation, défécation, miction, déglutition...) ou être provoqués par des soins (mobilisation, toilette...) ou des actes médicaux à visée diagnostique ou thérapeutique.

LA STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE

Les experts de la HAS et des sociétés savantes de lutte de la douleur préconisent le fentanyl par voie transmuqueuse comme étant le traitement efficace de référence des ADP liés au cancer chez les patients déjà sous traitement de fond optimal par opioïdes.

› Les patients sous traitement de fond opioïde sont définis comme prenant au moins 60 mg/j d’équivalent morphine par voie orale, depuis au moins une semaine de traitement (25 mgrammes/h de fentanyl transdermique, 30 mg/j d’oxycodone, 8 mg/j d'hydromorphone par voie orale ou une dose équi-antalgique d'un autre opioïde).

› Cinq spécialités à base de fentanyl sont actuellement indiquées : Abstral®, Actiq®, Effentora®, Instanyl® et Pecfent®.

Aucun de ces médicaments n’a démontré d’avantage clinique par rapport aux autres. Le choix se fait en fonction du mode d’administration, en accord avec le patient et en tenant compte des affections éventuellement associées.

› Comme tous les morphiniques, le fentanyl expose notamment à un risque de dépression respiratoire grave. Une prudence particulière est recommandée lors de la titration chez les patients présentant une affection favorisant une dépression respiratoire ou chez ceux prenant des médicaments ayant ce type d’effet (benzodiazépine, par exemple). On commence par la plus faible dose disponible pour la forme galénique prescrite et on augmente progressivement la dose si nécessaire (voir T1).
 

[[asset:image:966 {"mode":"full","align":"","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["* Pour Abstral\u00ae : \r\nAdministration de 100 mg si la dose pr\u00e9c\u00e9dente \u00e9tait de 100 \u00e0 300 mg. \r\nAdministration de 200 g si la dose pr\u00e9c\u00e9dente \u00e9tait de 400 ou 600 mg.\r\n\r\nPour Effentora\u00ae : \r\nLe second comprim\u00e9 ne doit \u00eatre pris que 30 minutes apr\u00e8s le premier.\r\n\r\nPour Instanyl\u00ae : \r\nLa r\u00e9administration se fait dans l\u2019autre narine.\r\n\r\n** Pour Pecfent\u00ae : \r\nL\u2019efficacit\u00e9 doit \u00eatre \u00e9valu\u00e9e sur les 30 minutes suivant l\u2019administration. En cas d\u2019\u00e9chec, pas de r\u00e9administration de la m\u00eame dose.\r\n\r\n*** Pour Pecfent\u00ae : \r\n2 pulv\u00e9risations de 100 mg (une dans chaque narine) si la dose pr\u00e9c\u00e9dente \u00e9tait de100 mg, 2 de 400 mg si la dose pr\u00e9c\u00e9dente \u00e9tait de 400 mg."]}]]

› La substitution d’un de ces produits à un autre ne doit pas être effectuée dans un rapport de 1/1, car les profils d’absorption diffèrent. Toute substitution doit donner lieu à une nouvelle titration.

MODALITÉS PRATIQUES

- Le comprimé d’Abstral® doit être placé sous la langue (humectée si besoin), le plus loin possible. Il faut le laisser fondre sans le sucer, le mâcher ni le croquer. Le comprimé d’Actiq® doit être placé contre la face interne de la joue, puis déplacé à l’aide de l’applicateur pour optimiser l’exposition de la muqueuse au produit actif et attendre qu’il fonde. Le comprimé d’Effentora® doit être placé entre joue et gencive ou sous la langue. Il se dissout en général en 15 à 25 minutes (s’il n’est pas entièrement dissous après 30 minutes, le patient peut avaler ce qui reste avec un peu d’eau). En cas de sécheresse buccale, on peut humidifier les muqueuses en buvant un peu d'eau avant l’absorption de ces trois comprimés.

- Les solutions d’Instanyl® ou de Pecfent® sont pulvérisées dans une narine. Elles ont les mêmes indications que les spécialités administrées par voie transmuqueuse buccale et peuvent constituer une alternative à celles-ci. Leur utilisation est déconseillée en cas de congestion nasale traitée par un vasoconstricteur local et contre-indiquée en cas d’obstruction sévère des voies aériennes, d’épistaxis chronique ou de radiothérapie de la face.

Cancer : traiter les accès douloureux paroxystiques 
TESTEZ VOS CONNAISSANCES

 

Synthèse bibliographique du Dr Linda Sitruk (fmc@legeneraliste.fr)

Source : lequotidiendumedecin.fr