CHAPITRE 2 : LE REPÉRAGE EN PREMIER RECOURS

Publié le 14/10/2016
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Les plaintes ou difficultés observées sont très variées et aucune n’est pathognomonique du TDAH. On bâtit l’hypothèse d’un TDAH devant le cortège de signes évocateurs, leur persistance dans le temps (au minimum > 6 mois), leur intensité, leur fréquence et leur retentissement.

Plusieurs plaintes ou difficultés doivent être associées et elles doivent concerner plusieurs milieux de vie (scolaire, familial, extra-scolaire, etc.).

→ Ces difficultés peuvent :

- Etre exprimées directement par l’enfant :

n’aime plus l’école, a peu d’amis proches et/ou a des difficultés à conserver des liens d’amitié, a une faible estime de soi, des conflits fréquents avec ses parents, exprime une « difficulté à être sage »

- Emaner des parents :

- se laisse facilement distraire, donne l’impression de ne pas écouter;
- a des difficultés à maintenir son attention dans le travail scolaire ou dans les jeux, se lasse très vite ;
- a des difficultés à s’organiser seul pour son travail et à gérer son matériel de classe, obligeant à fréquemment « refaire les stocks » de fournitures scolaires ;
- « ne sait pas par où commencer » ;
- a du mal à s’engager dans une activité jusqu’à la terminer, tendance à bâcler le travail ;
- est agité, ne tient pas en place, perturbe les autres ;
- se met en danger (accidents, fractures, sutures..), échappe à la surveillance, se perd, nécessite une surveillance constante inhabituelle ;
- agit ou répond sans réfléchir ;
- se montre impatient, se sent facilement frustré ;
- coupe la parole ou intervient de manière impromptue.

Parfois, il existe des antécédents familiaux de TDAH, diagnostiqués ou non : les parents « se reconnaissent » alors dans les difficultés de leur enfant.

- Avoir été observées par le personnel scolaire :

- il s’agit d’un élève excessivement « rêveur », « dans la lune », qui passe d’une activité à une autre sans les terminer ;
- agité, il ne tient pas en place, se tortille, tombe de sa chaise ;
- présente des résultats irréguliers ;
- oublie son matériel ;
- tripote ou laisse tomber sans cesse ses outils ;
- présente des difficultés demémorisation à court terme ;
- perturbe la classe et les autres élèves en parlant sans demander l’autorisation, sans lever la main, interrompant souvent les autres ;
- ayant des difficultés à organiser son travail de manière autonome…

- Avoir été repérées par le médecin traitant lui-même au fil des consultations :

- le fait de ne pas avoir d’amis malgré un contact de qualité et agréable ;
- des résultats scolaires mauvais ou irréguliers contrastant avec le caractère curieux et intelligent

→ Chez l’adolescent, le retentissement de l’inattention est plus important compte tenu de la demande attentionnelle croissante et de la complexité des tâches.
L’impulsivité demeure et expose à des conduites à risque, alors que l'hyperactivité motrice tend à s’atténuer. L’absence d’agitation motrice manifeste lors des consultations médicales ne doit pas faire récuser d’emblée le diagnostic, car les capacités de l’enfant s’améliorent volontiers en situation duelle.

→ Les signes évocateurs d’un TDAH sont observés majoritairement avant 12 ans. Le TDAH concerne 2 à 3 garçons pour 1 fille : cela tient en partie au fait que la forme avec prédominance du déficit attentionnel, plus fréquente chez les filles, est moins bruyante, donc moins souvent ou plus tardivement repérée.

→ L’entretien clinique nécessite au moins une consultation dédiée. Cet entretien se fera avec les parents (si possible les 2) et l’enfant, et si possible seul avec l’enfant, en particulier s’il s’agit d’un adolescent. Chez ce dernier, après avoir insisté sur les notions de secret médical et de confidentialité, l’entretien doit permettre d’aborder des sujets plus « personnels » : dépression, idées suicidaires, substances psychoactives.

Le TDAH est un facteur de risque de consommation de substances plus précoce, plus fréquente et plus intense, d’autant plus qu’un trouble des conduites est associé. Le risque ultérieur de dépendance est augmenté : x 3,5 pour les substances illicites, x 2,3 pour le tabac, x 1,3 pour l’alcool.

→ L’examen clinique est nécessaire à la démarche diagnostique.
L’objectif est triple : explorer la symptomatologie, éliminer un diagnostic différentiel et rechercher des comorbidités associées (voir encadré E1). Cet examen comporte plus spécifiquement :

- antécédents familiaux (TDAH, maladies psychiatriques), obstétricaux et périnatals (grossesse pathologique, prise médicamenteuse ou de toxiques, RCIU, prématurité….), antécédents personnels de l’enfant (cardiovasculaires, neurologiques, tics, épilepsie, accidents…),
- historique du développement psychomoteur (propreté, sommeil, langage oral et écrit…),
- poids, taille, IMC, périmètre crânien,
- vérification de l’acuité visuelle et auditive,
- examen neurologique,
- examen cutané : traces de traumatismes, taches évoquant une neurofibromatose.

→ Il n’y a pas, actuellement, d’examen complémentaire spécifique du TDAH, et aucun examen complémentaire n’est recommandé de manière systématique. Les échelles d’évaluation sont un moyen efficace d'obtenir des informations de la part du patient et de son entourage. Ce ne sont pas des outils diagnostiques à proprement parler, mais elles peuvent étayer l’hypothèse diagnostique et aider au suivi.

À défaut d’échelle spécifiquement validée en médecine de premier recours, la HAS propose d’utiliser l'échelle SNAP-IV 26 Rating Scale [4], facile d’accès et d’utilisation, ou les versions abrégées des échelles de Conners [6, 7]. Il existe plusieurs variantes pour chaque échelle, permetttant d’explorer le comportement de l’enfant dans différents environnements (scolaire, familial, etc.). Enfin, il existe des autoquestionnaires.

→ En complément, une évaluation psychométrique peut éventuellement être demandée ; cependant, elle n’est actuellement pas prise en charge par la CPAM.



Source : lequotidiendumedecin.fr