Ces recommandations ont été élaborées par le Comité des maladies liées aux voyages et des maladies d’importation (CMVI) et approuvées par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Les préconisations ne pouvant prendre en compte l’évolution des risques et l’émergence de nouvelles maladies infectieuses, les experts conseillent, pour être informé des mises à jour, de consulter l'un des sites suivants :
– http://www.santepubliquefrance.fr
– http://emergency.cdc.govainsi que celui de France Diplomatie pour les aspects administratifs notamment (1).
E1. OUTILS PRATIQUES
1- Ministère des Affaires étrangères : France Diplomatie, rubrique « conseils aux voyageurs », onglet « santé ». Disponible sur http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs/conseils-par-pa…
2- Fiche de signalement à l’ARS des cas suspects de dengue, chikungunya ou Zika.
http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-infect…
3- Ameli.fr. Vacances à l’étranger : votre prise en charge. Mise à jour mai 2017.
https://www.ameli.fr/assure/droits-demarches/europe-international/vacan…
4- European Centre for Disease Prevention and Control. Situation épidémique du Zika. http://ecdc.europa.eu/en/healthtopics/zika_virus_infection/zika-outbrea…
VACCINS, LES GRANDS PRINCIPES
Fièvre jaune, hépatite A, infections invasives à méningocoque, encéphalite à tiques…, les maladies à prophylaxie vaccinale sont multiples.
► Le BEH rappelle que la première étape de la prophylaxie vaccinale reste la mise à jour du calendrier national. En effet, certaines des infections visées peuvent être endémiques dans le pays de destination : tétanos, coqueluche, poliomyélite (persistance de souches en Afghanistan, au Laos, au Nigeria, au Pakistan), diphtérie (en résurgence en Europe de l’Est, en Algérie, au Vietnam).
► La rougeole est endémique dans les pays en développement mais il existe depuis début 2017 une épidémie européenne, notamment en Roumanie et en Italie. Les nourrissons qui doivent voyager dans ces pays peuvent recevoir une dose de vaccin rougeoleux monovalent entre les âges de 6 et 11 mois révolus, puis recevront ultérieurement les 2 doses de ROR prévues au calendrier vaccinal.
L’ENCÉPHALITE JAPONAISE
L’encéphalite japonaise est une infection virale de pronostic grave, transmise par un moustique du genre Culex, à l’activité nocturne avec des pics au crépuscule et à l’aube, en particulier lors de la saison des pluies.
► Les pays concernés actuellement sont l’extrême-nord de l’Australie et la Papouasie-Nouvelle Guinée, le Bangladesh, le Cambodge, la Chine, Hong Kong, Taïwan et Hainan, les Corées, l’Inde et le Sri Lanka, l’Indonésie et le Timor oriental, le Japon, le Laos, la Malaisie, le Myanmar, la Thaïlande, le Vietnam, le Népal, le Pakistan, les Philippines et la Sibérie orientale.
► Dans les zones d’endémie, l’incidence parmi les non-vaccinés est de 5 à 21/100 000 (2). Seule une infection sur 250 est symptomatique, se manifestant par un tableau de méningite fébrile ou d’encéphalite fébrile. 10 % des adultes et 50-85 % des enfants présentent des convulsions. 25 % des formes graves sont mortelles ; 30 % garderont des séquelles neurologiques ou psychiatriques permanentes.
► Le risque estimé d’infection pour le voyageur en zone d’endémie varie de 1/5 000 à 1/20 000 par semaine de séjour, suivant les circonstances (saison des pluies, irrigation des rizières, activités à risque…). Le HCSP rappelle l’importance des mesures individuelles de protection contre les piqûres de moustiques (répulsifs cutanés, moustiquaires et vêtements imprégnés d’insecticide). Le HCSP ne recommande pas une vaccination systématique mais, à partir de l’âge de 2 mois, une vaccination conditionnelle, qui rend parfois complexe l’évaluation du risque:
– séjour (quelle qu’en soit la durée) avec exposition importante en milieu extérieur dans une région endémique, notamment dans les zones rurales où l’irrigation par inondation est pratiquée (rizières), à proximité d’élevages de porcs, en période d’épidémie. Ces « expositions importantes au milieu extérieur » peuvent être une nuit passée à la belle étoile sans moustiquaire, le camping, le travail à l’extérieur, le cyclisme et la randonnée ;
– expatriation ou séjour prolongé dans les zones rurales d’un pays situé dans la zone de circulation du virus. Chez ces patients, le risque d’encéphalite japonaise peut atteindre des proportions similaires à celles de la population locale/résidente réceptive ;
– toute autre situation jugée à risque par le médecin vaccinateur.
GÉRER LE RISQUE ZIKA
La fin de l’épidémie en Amérique latine et dans les Caraïbes met au jour une nouvelle problématique de gestion de crise, celle des recommandations dans un contexte de faible risque. En effet, la fin de l’épidémie de Zika dans les Amériques ne signifie pas l’absence totale de circulation du virus mais plutôt un passage à l’endémicité, comme dans le Sud-Est asiatique, les îles du Pacifique et même en Afrique, territoires où le virus semble circuler à bas bruit depuis longtemps. Il faut apprendre à vivre avec la possibilité de cas sporadiques de Zika et rester extrêmement vigilant quant aux complications néonatales, dont les microcéphalies constituent la « partie émergée de l’iceberg ».
► Conseiller les voyageurs devient paradoxalement plus difficile que lorsque le risque était majeur (3). Zika peut rester présent dans le sperme jusqu’à 6 mois après le contage. Les femmes enceintes ou ayant un projet de grossesse doivent donc avoir des rapports protégés pendant 6 mois après la fin de l’exposition à risque de Zika pour leur partenaire. L’information fournie aux femmes enceintes et aux couples ayant un projet d’enfant, même si elle est « claire, loyale et appropriée » génère, chez les consultants, si ce n’est chez les consultés, un véritable dilemme. La situation épidémiologique du Zika dans le monde peut être suivie sur le site de l’ECDC (voir encadré E1).
► Toute personne de retour depuis moins de 15 jours d’un voyage d’une zone endémique et présentant ≥ 1 des symptômes de dengue, de chikungunya, ou de Zika doit être signalée à l’ARS et faire l’objet d’une demande de confirmation biologique en utilisant la fiche de signalement (2) (voir encadré E2). Les fiches de signalement sont différentes selon chaque région).
E2. Dengue, Chikungunya et Zika : quand y penser de retour de voyage ?
Dengue : devant toute personne présentant une fièvre supérieure à 38,5°C d’apparition brutale et au moins un signe algique (céphalées, arthralgies, myalgies, lombalgies, douleur rétro-orbitaire) ayant effectué un voyage en zone endémique dans les 15 jours précédant l’apparition des signes.
Chikungunya : devant toute personne présentant une fièvre supérieure à 38,5°C d’apparition brutale et des douleurs articulaires invalidantes, et ayant effectué un voyage en zone endémique dans les 15 jours précédant l’apparition des signes.
Zika : devant toute personne présentant une éruption cutanée à type d’exanthème, accompagnée ou non de fièvre, même modérée, et d’au moins deux signes parmi les suivants : hyperhémie conjonctivale, arthralgies, myalgies en l’absence d’autres étiologies. Et ayant effectué un voyage en zone endémique dans les 15 jours précédant l’apparition des signes.
PALUDISME : AU CAS PAR CAS
Les données concernant le paludisme en 2016 sont stables, concernant le nombre de cas, les pays de contamination (97,2 % d’Afrique subsaharienne), la proportion des formes graves et la chimiorésistance.
Selon l’OMS, plus de la moitié des 91 pays endémiques ne sont pas en voie d’atteindre l’objectif de 40 % de réduction de l’incidence du paludisme et de la mortalité associée d’ici à 2020. La résistance aux insecticides vient aussi se combiner avec celle aux dérivés de l’artémisine pour faire craindre une résurgence du paludisme dans certaines régions.
► Le BEH préconise de quitter l’approche macrogéographique continentale ou nationale pour s’orienter vers une stratégie microgéographique, c’est-à-dire régionale. Par exemple, un voyageur partant en Thaïlande n’aura pas de risque de paludisme dans les villes et dans les stations touristiques de l’île de Phuket, mais devra suivre une chimioprophylaxie dans les zones frontalières avec le Cambodge, le Laos, le Myanmar. Le cas d’un voyageur partant en Inde est plus complexe encore : il n’y a pas de risque de paludisme dans trois états et à plus de 2 000 m d’altitude.
► Pour un court séjour (< 7 jours, qui est la durée minimale d’incubation du paludisme à P. falciparum) en zone de faible risque de transmission, la chimioprophylaxie n’est pas indispensable, à condition de respecter les règles de protection antimoustiques et d’être en mesure, durant les mois qui suivent le retour, de consulter en urgence en cas de fièvre, en signalant la notion de voyage en zone d’endémie palustre.
[[asset:image:11907 {"mode":"full","align":"","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":[]}]]LA DANGEREUSE FIÈVRE JAUNE
L'année 2016 a été marquée par une épidémie majeure de fièvre jaune en Angola et au Congo, avec plusieurs milliers de cas et des centaines de décès. Au Brésil, les zones de résurgence de la fièvre jaune s’étendent et la carte déterminant les zones où la vaccination est nécessaire est continuellement modifiée. Au Pérou, une reprise épidémique a été observée, avec 2 cas dont un décès chez des touristes français.
► La vaccination contre la fièvre jaune est indispensable pour un séjour dans une zone endémique (régions intertropicales d’Afrique et d’Amérique du Sud) même en l’absence d’obligation administrative.
La vaccination est recommandée à partir de l’âge de 9 mois pour les enfants se rendant dans une zone à risque. Exceptionnellement, elle peut être effectuée dès l’âge de 6 mois si le nourrisson doit séjourner en milieu rural ou en forêt ou si une épidémie sévit dans la région visitée. Le vaccin, qui est un vaccin vivant, est en principe déconseillé chez la femme enceinte ; mais, au vu de la gravité de la maladie, la vaccination peut être réalisée à tous les stades de la grossesse, si le voyage ne peut être différé. En raison du passage dans le lait maternel du virus vaccinal pendant la virémie post-vaccinale, il paraît souhaitable d’attendre que le nourrisson ait atteint l’âge de 6 mois pour vacciner une mère qui allaite. Si la vaccination est impérative, notamment en cas de voyage ne pouvant être différé dans une zone à haut risque, l’allaitement doit être suspendu et peut être repris deux semaines après la vaccination. La vaccination anti-amarile est en principe contre-indiquée en cas de déficit immunitaire congénital ou acquis, mais parfois possible, par exemple, six mois après la fin d’une chimiothérapie.
Lorsque la vaccination ne peut pas être réalisée, les voyages en zone d’endémicité amarile sont formellement déconseillés. Si nécessaire, un certificat de contre-indication à la vaccination anti-amarile peut être délivré par le médecin d’un Centre de vaccination anti-amarile ou par le médecin traitant.
BACTÉRIES RÉSISTANTES : QUEL IMPACT ?
Les voyageurs ayant été hospitalisés au cours de leur voyage ou rapatriés sanitaires présentent un risque de portage de bactéries multirésistantes (BMR) qui doit faire l’objet d’un dépistage en cas d’hospitalisation dans une structure de soins.
► Le risque principal est l’acquisition d’entérobactéries productrices de β-lactamase à spectre étendu (BLSE). Une étude a récemment estimé le risque d’acquisition d’une BLSE à 75 % en Asie du Sud, 48 % en Asie centrale et de l’Est, 42 % en Asie de l’Ouest, 42 % en Afrique du Nord, et 37 % en Asie du Sud-Est, le pays le plus à risque étant l’Inde avec 88,6 %.
► Les autres facteurs de risque d’acquisition BLSE sont confirmés : antibiothérapie pendant le voyage, surtout s’il s’agit de fluoroquinolones, et diarrhée du voyageur. La durée médiane de colonisation après le voyage est de 30 jours, mais 11 % restent colonisés 1 an plus tard, et une transmission à l’entourage est détectée chez 7,7 % des contacts. Ce portage a une influence sur la prise en charge des infections urinaires au retour de voyage : 25 % des infections urinaires chez des voyageurs étaient dues à des entérobactéries BLSE, ce qui oblige d’ores et déjà à reconsidérer l’antibiothérapie de première intention dans de tels cas. Encore faut-il penser à poser la question d’un voyage !
► Les autres BMR posant problème sont les entérobactéries productrices de carbapénémases (EPC). Les carbapénémases conduisent ainsi à une inefficacité partielle ou totale des antibiotiques de la classe des carbapénèmes, considérés comme des traitements de dernier recours. Les EPC restent rares en France mais les signalements augmentent depuis 2009. La notion de voyage à l’étranger est retrouvée dans 87 % des épidémies d’EPC en Île-de-France.
Enfin, le risque d’importation de Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM) impose de prélever les patients avec des infections cutanées présumées staphylococciques (impétigo, folliculite, furoncle, abcès) pour établir un antibiogramme. L’antibiothérapie empirique devrait aussi prendre en compte le risque de SARM, voire d’autres résistances.
ANTICIPER L’ADMINISTRATIF
Des renseignements sur chaque pays, notamment d’ordre sanitaire (épidémie, médecins, hôpitaux et cliniques identifiés par l’ambassade de France dans le pays) sont fournis sur le site du ministère des Affaires étrangères (voir encadré E1).
Le médecin généraliste peut suggérer au patient de s’inscrire au système Ariane qui permet :
– de recevoir des recommandations de sécurité par e-mail si la situation du pays le justifie ;
– d’être contacté en cas de crise dans le pays de destination ;
– de prévenir, si besoin, une personne-contact désignée par le patient.
► Concernant la prise en charge médicale, il est indispensable de vérifier la couverture, le plafond maximal de la prise en charge et la validité de son contrat d’assistance et de son assurance maladie avant le départ. La carte européenne d’assurance maladie couvre les séjours au sein de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et de la Suisse. Hors UE et pour un séjour < 6 mois, il est recommandé de contracter un contrat d’assurance couvrant les frais médicaux non pris en charge par l’assurance maladie française. Pour les séjours > 6 mois, il est indispensable de contracter un contrat d’assurance maladie auprès de la Caisse des français de l’étranger ou d’un assureur privé. Les renseignements sur les démarches et les documents nécessaires pour avoir une assurance maladie lors des voyages se trouvent sur le site de l’assurance maladie, que ce soit pour les voyages en Europe ou hors d’Europe [3]
► L’assistance rapatriement est différente des contrats d’assistance maladie. Pour les séjours < 3 mois, de nombreux contrats d’assistance sont liés aux contrats d’assurance habitations, véhicules, ou liés aux cartes bancaires, mais les plafonds peuvent être vite dépassés en cas de prise en charge lourde dans certains pays. Pour les séjours > 3 mois, il est recommandé de souscrire un contrat d’assistance spécifique.
► En cas de maladie(s) chronique(s), le patient voyageur devra emporter avec lui un compte rendu médical, traduit dans la langue du pays de destination ou au moins en anglais, avec les coordonnées d’une structure de santé ou d’un médecin correspondant spécialiste. L’ordonnance pour le traitement régulier devra être rédigée en dénomination commune internationale et, le cas échéant, un certificat médical pour le matériel d’injection (insuline, par exemple) d’un traitement peut être requis. Une autorisation de délivrance d’un traitement pour 6 mois dans une pharmacie française peut être demandée auprès de sa caisse d’assurance maladie.
Bibliographie
1- Bulletin épidémiologique hebdomadaire. Recommandations sanitaires pour les voyageurs, 2017. Hors-série du
6 juin 2017. http://invs.santepubliquefrance.fr/Publications-et-outils/BEH-Bulletin-…
2- Haut conseil de la santé publique. Vaccination contre l’encéphalite japonaise. Actualisation des recommandations. 11-10-2013.
http://www.hcsp.fr/Explore.cgi/Telecharger?NomFichier=hcspa20130920_vac…
3- Haut Conseil de la santé publique. Prévention de la transmission sexuelle du virus Zika – Actualisation du 29-6-2016.
http://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=565
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
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