Gilberte, 78 ans, consulte car son dermatologue lui a prescrit un bilan biologique en raison d’une toux persistante depuis plus d'un mois, accompagnée d’une dyspnée au moindre effort. Il craint une pathologie leucémique en raison d’une hyperleucocytose à 18 000 polynucléaires/µl (N entre 4 000 et 10 000), avec 82 % de polynucléaires neutrophiles (N entre 40 et 75 %), avec une hyperplaquettose à 501 000/µl (N entre 150 000 et 450 000). Cliniquement, on note des crépitants au niveau du champ pulmonaire gauche, ce qui conduit à effectuer une radiographie. Cet examen retrouve un syndrome de condensation lingulaire gauche en rapport avec une pneumopathie (cliché 1). La thrombocytose est secondaire à cette pathologie. Ainsi, après avoir administré un traitement à base de pénicilline A, on note six semaines plus tard une normalisation du taux de plaquettes (368 000/µl) et de l’hyperleucocytose (8 350/µl).
La thrombocytose, ou hyperplaquettose, se caractérise par un taux élevé de plaquettes. à noter que des erreurs peuvent survenir dans ce comptage : microcytose, confusion entre plaquettes et schizocytes en cas de drépanocytose. Il est alors intéressant d’effectuer un frottis à la suite d’un prélèvement sanguin. Cet examen permet également d’observer les anomalies des lignées blanches et rouges.
ÉTIOLOGIE
→ Les thrombocytoses secondaires ou réactionnelles Elles représentent entre 80 et 90 % des hyperplaquettoses. On identifie ce cas de figure si le taux de plaquettes est généralement inférieur à 800 000 plaquettes/µl, avec une absence d’anomalie morphologique des plaquettes sur le frottis et une absence de splénomégalie. Plusieurs origines sont décrites comme étant responsables de ce tableau :
• Les thrombocytoses d’origine infectieuse ou inflammatoire Les infections bactériennes sévères sont responsables de 25 % des thrombocytoses secondaires, une néoplasie de 10 % , une pathologie inflammatoire (connectivite, colite ulcéreuse) de 10 %.
• Les thrombocytoses dues à une carence en fer Elles sont le plus souvent secondaires à une hémorragie digestive ou gynécologique (chroniques).
• Les thrombocytoses d’entraînement Deux cas de figure sont classiquement décrits :
– Les cas de suite d’une intervention chirurgicale lourde, de traumatismes importants, d’accouchements compliqués.
– Les cas de thrombocytose rebond, après une hémorragie abondante, une anémie hémolytique, ou certains traitements comme une chimiothérapie.
• Une asplénie Le plus souvent, cette anomalie est due à un traumatisme ou une intervention chirurgicale sur la rate, et la thrombocytose disparaît généralement au bout de deux mois. Néanmoins, il est possible d’observer un taux persistant, de manière chronique. Dans ce cas, le taux est inférieur à 500 000 plaquettes/µl. Cette thrombocytose modérée est associée à une hyperleucocytose. Chez les patients ayant une drépanocytose homozygote, les thromboses itératives au niveau de la rate rendent cet organe non fonctionnel et sont responsables d’une thrombocytose.
→ Les thrombocytoses secondaires à un syndrome myéloprolifératif Elles représentent entre 10 et 20 % des hyperplaquettoses.
• La thrombocytémie essentielle On envisage ce diagnostic en l’absence de cause secondaire retrouvée. Au niveau clinique, on note des paresthésies aux extrémités et des céphalées. Dans la moitié des cas, cette pathologie est asymptomatique. Il existe une splénomégalie dans 20 à 50 % des cas, et une hyperleucocytose neutrophile dans 50 % des cas. Le taux des plaquettes est supérieur à 600 000/µl. Le myélogramme objective des mégacaryocytes géants et des noyaux fragmentés. La biopsie ostéo-médullaire met en évidence une hyperplasie médullaire globale et des mégacaryocytes nombreux avec des noyaux multilobés. La biologie moléculaire met en évidence dans 50 % des cas une mutation du gène JAK2 et une surexpression de gène PRV-1.
• Les autres syndromes myéloprolifératifs La polyglobulie primitive, la leucémie myéloïde chronique et la splénomégalie myéloïde en font partie.
TRAITEMENT
Pour les formes réactionnelles, le traitement dépend de l’étiologie. Pour la thrombocytémie essentielle, il repose sur l’administration d’hydroxyurée. Pour les autres syndromes myéloprolifératifs, la chimiothérapie dépend de la nature du syndrome myéloprolifératif. L’administration d’antiagrégants (aspirine) est effectuée au-delà de 600 000 plaquettes/µl pour les plus de 60 ans, et au-delà de 1 000 000 pla- quettes/µl pour les plus jeunes.
Bibliographie
1. Varet B. Hématologie. Ed. Lavoisier 2012.
2. Griesshammer M, Bangerter M, sauer T, et al. Aetiology and clinical significance of thrombocytosis : analysis of 732 patients with elevated platelet count. Journal of Internal Medicine 1999 ; 245 : 295-300.
3. Bardet V. Conduite à tenir devant une thrombocytose. https://www.revuebiologiemedicale.fr/images/diaporamas-51-jbp/Bardet-Th….
4. Viallard JF. Conduite à tenir devant une thrombocytose. La Revue de Médecine Interne 2010 ; 31 (S3) : 333-338.
5. Duployez N. Hématologie. Ed. De Boeck Supérieur 2017.
Étude et pratique
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Cas clinique
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