Jeanine, 68 ans, consulte pour la première fois car depuis plusieurs mois elle a noté au niveau des plis de son cou la présence d’une nappe de coloration brune ayant l’apparence de la crasse (photo, flèches rouges), ne disparaissant pas malgré des toilettes répétées. Cette patiente vit dans des foyers de sans-abris depuis plus de 10 ans, date à laquelle elle a quitté l’appartement de son compagnon.
Son examen clinique retrouve une obésité avec une IMC à 39, une asthénie apparue il y a plus de 6 mois, une polydipsie. Compte tenu de ces éléments, le bilan sanguin réalisé objective une glycémie à 2,97 g/l et une TSH à 9,6 µU/ml (N entre 0,15 et 4,9). La lésion cutanée observée chez cette patiente hypothyroïdienne est en fait une acanthosis nigricans.
LES DIFFÉRENTES FORMES
♦ Le type 1 est une forme héréditaire bénigne, de transmission autosomique dominante rare, non rattachée à une dysfonction endocrinienne. Les manifestations dermatologiques apparaissent le plus souvent à la naissance ou durant l’enfance.
♦ Le type 2 est aussi une forme bénigne, en relation avec une insulino-résistance associée avec des anomalies endocriniennes. On retrouve dans ce cas une surcharge pondérale, une hyperandrogénie, une hypothyroïdie, un syndrome de Cushing, une acromégalie. Ce type d’acanthosis nigricans est plus fréquent chez les femmes.
♦ Le type 3 est une forme de pseudo-acanthosis nigricans. Dans cette situation, la dermatose est associée à une obésité et une insulino-résistance périphérique (cette insulino-résistance est favorisée par l’obésité). On la met en évidence chez les patients ayant un phototype foncé.
♦ Le type 4 est une forme d’origine iatrogène. Plusieurs thérapeutiques en sont responsables : hormones de croissance, corticoïdes, acide nicotinique, acide fusidique, pilule œstroprogestative, antiprotéases, insulinothérapie.
♦ Le type 5 est la forme paranéoplasique. Elle est observée chez les patients quel que soit le sexe, et s’associe à certaines pathologies néoplasiques sous-jacentes : adénocarcinome de l’estomac et autres néoplasies digestives, cancer génital (ovaire et prostate) ou urinaire, lymphome, mélanome.
♦ Le type 6 demeure exceptionnel. Il s’agit d’une acanthosis nigricans naevoïde qui se caractérise cliniquement par une atteinte unilatérale.
SUR LE PLAN CLINIQUE
L’acanthosis nigricans se caractérise par des placards épais de couleur brun-gris dont la limitation est très imprécise, le plus souvent symétriques. Cette dermatose est constituée d’éléments dont la surface est lisse ou veloutée ; parfois papuleuse. On note souvent au niveau des zones atteintes une majoration des plis.
→ L’acanthosis nigricans est observé au niveau des aisselles, des paupières (sur le bord libre), du dos, des mains, des pieds, des cuisses, du cou (comme dans notre situation), des plis des coudes, au niveau anogénital, en sous-mammaire et en ombilical.
→ Dans le type 5 paranéoplasique, on observe souvent une hyperpigmentation plus importante que les autres formes, mais aussi une hyperkératose qui est majorée au niveau des paumes des mains et des plantes des pieds (épaississement parfois de couleur jaune : la pachydermatoglyphie). On constate dans 30 % des cas un épaississement centré sur les contours de la bouche.
LE TRAITEMENT
Il demeure avant tout en rapport avec l’étiologie responsable (traitement de la néoplasie ou de la pathologie endocrinienne responsable). En parallèle, il faut favoriser une réduction de poids chez les patients obèses. De manière symptomatique, certains auteurs recommandent l’utilisation, sur les placards pigmentés, de trétinoïne ou de calcipotriol. Il est également possible de recourir au laser.
L'ÉVOLUTION
Pour le type 1, une disparition des lésions est parfois observée au moment de la puberté ou chez le patient adulte.
Pour le type 2, une disparition de l’acanthosis nigricans est observée chez le patient qui est traité de manière efficace ; tout comme le type 3 qui verra une disparition de cette dermatose en cas de réduction de poids. Pour le type 4, la disparition est liée à l’éviction de la thérapeutique responsable. Pour le type 5, l’acanthosis nigricans disparaît dès lors que la néoplasie est en rémission.
L’EXAMEN HISTOLOGIQUE
Il permet de retrouver une papillomatose non spécifique avec une hyperkératose orthokératosique. Au niveau de l’épiderme, les plis sont mal définis, et on note une acanthose modérée. La basale est hyperpigmentée.
Bibliographie
1- Bessis D. Manifestations dermatologiques des maladies d’organes. Ed. Springer 2012.
2- Szepetiuk G, Letot B, Hermanns-Lé T, Piérard GE. L’image du mois. Acanthosis nigricans juvénile. Revue Médicale de Liège 2007 ; 62 (4) : 181-183.
3- Fitzpatrick TB. Atlas en couleurs de dermatologie clinique. Ed. Flammarion Médecine-Sciences 2007.
4- Brady MF, Rawla P. Acanthosis Nigricans. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK431057/.
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Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
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