Neurologie

L'ALGIE VASCULAIRE DE LA FACE

Publié le 12/09/2022
Article réservé aux abonnés

L’algie vasculaire de la face est une pathologie rare dont la symptomatologie est la douleur hémicrânienne. La prise en charge nécessite la recherche d’une éventuelle étiologie secondaire cérébrale ou carotidienne. Le sumatriptan ou l’oxygénothérapie sont les traitements de base de la crise.

Crédit photo : Dr Frances

Nous avons fait la connaissance de ce patient il y a 6 mois car il présentait une douleur thoracique en barre en rapport avec un angor instable. Il a bénéficié de la pose d’un stent et de recommandations de sevrage pour son tabagisme excessif (60 paquets années) – recommandations non suivies. Par ailleurs, il y a un an, il avait été hospitalisé en Nouvelle-Calédonie pour un épisode similaire de douleurs hémicrâniennes. Un traitement par oxygène à plus de 10 l/mn avait été effectué.

Sur un plan clinique, nous pouvons objectiver une rhinorrhée gauche légère, un œil gauche rouge. Le patient relate l’existence de douleurs très intenses rétro-orbitaires. Ces douleurs sont apparues la veille et le taraudent près de 3 fois par jour durant 1 à 2 heures. Compte tenu des éléments recueillis à l’interrogatoire (prise en charge antérieure par oxygène), mais aussi du fait de la description clinique de la douleur, nous établissons le diagnostic d’algie vasculaire de la face.

INTRODUCTION

L’algie vasculaire de la face est une affection qui touche une personne sur 1 000. Elle est observée le plus souvent chez les hommes entre 20 et 40 ans, et la grande majorité est tabagique (près de 80 % d’entre eux). L’origine de cette pathologie, pas encore définie de manière claire, est liée à un trouble dysautonomique qui repose sur une activation du système trigémino- vasculaire, avec atteinte du système nerveux autonome de manière unilatérale.

SYMPTOMATOLOGIE

La base de la symptomatologie est la douleur, qui est très intense, intenable à type de broiement ou de brûlure. Elle est localisée autour de l’œil, au niveau de la tempe de l’hémicrâne et parfois dans la région cervicale. La durée de cette douleur varie de 30 minutes à 3 heures et est associée à des nausées, vomissements, une phonophobie ou photophobie, une rougeur du front et une rhinorrhée aqueuse unilatérale. Sur un plan ophtalmologique : un œil rouge (irritation conjonctivale), un larmoiement et, parfois, un œdème palpébral. Les douleurs ne rétrocèdent pas lorsque le patient est allongé, et même il doit se lever et déambuler (les douleurs sont intolérables) dès lors qu’elles surviennent la nuit pour tenter de réduire leur intensité.

On objective également une agitation du patient et parfois une importante irritabilité en rapport avec l’intensité de la douleur. En fin de crise, il est possible d’observer un ptosis palpébral et une contraction pupillaire (signe de Claude Bernard-Horner avec ptosis, myosis et énophtalmie).

Deux formes d’algie vasculaire de la face sont classiquement décrites :

La forme épisodique

Elle est la plus courante. Les crises d'algies vasculaires surviennent sur une période qui varie entre quelques semaines à quelques mois. Le plus souvent, cette forme est en rapport avec la prise de boissons alcoolisées. Par ailleurs, il existe une saisonnalité dans sa survenue, mais aussi une apparition suivant un rythme circadien (heure fixe et le plus fréquemment la nuit).

La forme chronique

Les crises sont répétitives (avec ou sans période de rémission d’une durée le plus souvent de 1 mois) et sont souvent associées à une dépression (55 % des cas) ou des tendances suicidaires (25 % des cas).

PRISE EN CHARGE

Tout d’abord, il est important de souligner qu’une origine secondaire est possible (dissection carotidienne ou tumeur hypophysaire) et, dans ce contexte, une imagerie (IRM ou angioscanner) est utile.

Le traitement de la crise repose sur l’administration de sumatriptan 6 mg/0,5 ml en sous-cutané (deux injections au maximum par jour) ou une oxygénothérapie nasale à raison de 15 l/mn durant 15 à 20 minutes.

Le traitement de fond repose sur le vérapamil ou le lithium. On peut également recourir à une corticothérapie orale ou une neuromodulation pour les formes réfractaires aux traitements chroniques.

En parallèle, il est important de conseiller un sevrage tabagique et d’éviter les consommations d’alcool au-delà des seuils recommandés.

Pour finir, il faut rassurer le patient car cette pathologie a souvent un retentissement professionnel et psychologique.

Dr Pierre Frances (médecin généraliste à Banyuls-sur-Mer), Adam Merikhi (interne en médecine générale à Montpellier), Madeleine Stoumen et Odile Halbout (externes à Montpellier)

BIBLIOGRAPHIE

1. Ducros A, Bousser MG. L’algie vasculaire de la face. Annales de Médecine Interne 2003 ; 154 (7) : 468-472.
2. Item 97. Migraine, névralgie du trijumeau, et algie vasculaire de la face. https://campusorl.fr/espace-etudiants/2eme-cycle-ecni/item-97-migraine-…
3. Géraud G, Fabre N, Lantéri-Minet M, et al. Céphalées, migraines, et algies faciales en 30 leçons. Ed. Elsevier Masson 2022.


Source : lequotidiendumedecin.fr