Pédiatrie

L’INVAGINATION INTESTINALE AIGUË

Publié le 07/06/2019
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L’invagination intestinale aiguë (IIA) est une pathologie rare observée chez l’enfant entre 0 et 3 ans, et se traduisant cliniquement par des douleurs abdominales, des vomissements, et des elles muco-sanglantes. L’échographie est l’examen clé pour poser ce diagnostic qui est une urgence médico-chirurgicale.
Invagination

Invagination
Crédit photo : Dr Frances

Melissa, 2 ans, est amenée par sa maman car depuis 3 jours elle présente des vomissements répétés. Malgré du paracétamol et de la métopimazine en gouttes prescrits par un confrère qui pensait à une gastro-entérite aiguë, les vomissements persistent. La maman a noté en parallèle une constipation et un train fébrile (37° 7). à la palpation, nous notons une discrète douleur abdominale diffuse, surtout centrée au niveau de la fosse iliaque droite. De ce fait, nous adressons directement Melissa aux urgences de pédiatrie. L'échographie abdominale est pratiquée dès son arrivée. La présence d’une image en cocarde témoigne d’une invagination intestinale aiguë (photo).

L’invagination intestinale aiguë (IIA) est une des causes rares de douleurs abdominales chez les enfants de 0 à 3 ans (1,1 à 4,5/1 000 en Europe). Elle est encore moins fréquente que l’appendicite à cet âge (10 à 20/1 000). Les garçons sont souvent plus concernés. Des pics sont observés entre l’automne et le printemps, correspondant aux pandémies virales.

→ Le plus souvent, les adénolymphites mésentériques, mais aussi à moindre fréquence les diverticules de Merckel, sont des facteurs semblant induire cette pathologie.

PHYSIOPATHOLOGIE

→ Cette pathologie est liée à un segment intestinal et son mésentère qui pénètrent au niveau du segment d’aval, formant ainsi une sorte de boudin d’invagination. Ce phénomène produit une ischémie, à l’origine de manifestations douloureuses et de vomissements (dès la 6e heure).

→ Dans 85 % des cas, la localisation est iléo-colique, et dans 15 % il s’agit d’une localisation iléo-iléale ou colo-colique.

→ En cas de persistance de cette ischémie, l’IIA peut conduire à une perforation colique, induisant alors une péritonite stercorale et pouvant mener au décès (moins de 1 % des cas).

CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES

La triade classique décrite dans la littérature n’est observée que dans 20 % à 50 % des cas :

– Des douleurs abdominales paroxystiques, dites en « coups de tonnerre dans un ciel serein ».

– Des vomissements, liés à une réaction vagale (strangulation du méso) ou faisant suite à l’installation du syndrome occlusif. L’enfant refuse ses biberons ou les vomit.

– Des selles muco-sanglantes, secondaires à la desquamation de la muqueuse colique. L'absence de constipation n'élimine pas le diagnostic d’IIA. À ce titre, il existe des formes pseudo-entériques avec des diarrhées aiguës.

Il est possible parfois d’observer des manifestations neurologiques, avec des pertes de connaissance de durée brève et des convulsions.

→ L’examen clinique peut retrouver la présence d’une masse abdominale légèrement ferme au niveau de l’hypocondre droit. Classiquement, on décrit au toucher rectal la possibilité de palper la tête du collet. Dans certains cas, on observe une extérioration colique prenant l’aspect d’un prolapsus. Le doigtier peut être maculé de sang.

Par ailleurs, l’examen clinique doit rechercher des manifestations en rapport avec une déshydratation, l’existence d’arthralgies et d’un purpura (le purpura rhumatoïde est parfois associé à une IIA).

LES EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

L’échographie, examen de choix, a une sensibilité et une spécificité proches de 100 %.

On retrouve (comme dans notre cas) une image en cocarde, témoignant de l’impaction du segment colique invaginé dans la partie d’aval du côlon.

L’ASP a un intérêt moindre, mais peut montrer une zone déshabitée, témoin d’un syndrome occlusif.

LE TRAITEMENT

La réalisation d’un lavement baryté (avec un produit iso-osmolaire, de l’eau ou de l’air) permet une réduction de l’IIA dans plus de 90 % des cas.

Par cet examen, on confirme également le diagnostic avec la classique image en pince de crabe.

Le succès du traitement est confirmé si le produit de contraste est arrivé au niveau de l’intestin grêle.

Cependant, les récidives après cette prise en charge avoisinent 10 à 15 % des cas.

Le traitement chirurgical n’est effectué que dans les cas de contre-indication au lavement ou du fait d’une prise en charge trop tardive qui engendre une perforation intestinale.

De nombreuses équipes effectuent dans ce cas une appendicectomie de principe, qui permet d’éliminer un réservoir infectieux et limite les récidives (1 à 3 % des cas).

Bibliographie

1- Vandertuin L, Vunda A, Gehri M, Sanchez O, Hanquinet S, Gervaix A. Invagination intestinale chez l’enfant : une triade vraiment classique ? Revue Médicale Suisse 2011 ; 7 : 451-455.
2- Jouve JL, Pure PY. Urgences chirurgicales de l’enfant. Ed. Doin 2012.
3- Bourillon A. Pédiatrie. Ed. Elsevier Masson 2011.
4- Bourillon A, Chéron G. Urgences pédiatriques. Ed. Elsevier Masson 2005.
5- Desvignes V, Martin-Lebrun E. Pédiatrie ambulatoire. Ed. Doin 2014.

 

Dr Pierre Frances (médecin généraliste, Banyuls-sur-Mer), Dr Célia Ponce de Leon (médecin généraliste, Banyuls-sur-Mer), Dr David Hassid (médecin généraliste, Argelès-sur-Mer), Pauline Cartier (interne en médecine générale, Montpellier), Dr Hannah Wright

Source : lequotidiendumedecin.fr