Pour réussir l’hypersélective première année, trois « péhuns » sur quatre suivent la formation d’une des 100 prépas privées de l’Hexagone. Pour renforcer l’égalité des chances des candidats qui ne peuvent pas tous s’offrir les services d’une officine dont le coût moyen est d’environ 3 000 euros par an, les facultés de médecine ont mis en place des tutorats. Il y a deux ans, l’université Paris-XIII a ouvert à Bobigny une prépa santé gratuite unique en son genre.
Depuis la création du numerus clausus en 1971, les prépas privées en médecine fleurissent dans l’Hexagone.
Selon notre estimation, qui croise la base documentaire de « L’Étudiant » et les informations de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF), une centaine de prépas privées proposent des formations aux aspirants en médecine.
Ces « écuries » proposent une « année 0 » (un an de préparation au concours, juste après le bac) ou une prépa classique, que les étudiants suivent en même temps que la première année commune des études de santé (PACES). Le nombre de prépas est très variable selon les facultés. Neuf ont été recensées à Lyon tandis que les carabins de Bordeaux ont le choix entre 8 officines tout comme Nice. Paris en compte 7 de même que Montpellier, la fac de médecine la plus sélective de France avec moins d’un étudiant reçu sur 10.
Le système a pris une ampleur spectaculaire. Selon une récente enquête de l’ANEMF, 75 % des péhuns suivent une formation privée en plus des cours magistraux de la faculté.
Perdus dans des amphis bondés, peu armés...
Le succès de ces officines privées s’explique d’abord par la très forte pression qui s’exerce sur les inscrits en PACES. Les P1 ont statistiquement 13 % de chance d’être admis en 2e année de médecine. « Dans la tête de beaucoup de gens, il faut suivre un cours de plus que les autres pour avoir un meilleur résultat », explique Matthieu Thomazo, étudiant à Caen.
Souvent perdus dans les amphis bondés et bruyants, ne s’estimant pas armés pour affronter sans soutien une année de dur labeur ou parce qu’ils souhaitent simplement acquérir une méthode de travail ou se rassurer, les étudiants se précipitent dans ces cours privés. Pendant 4 à 6 heures par semaine en moyenne, ils y réalisent des QCM, élaborent des fiches de synthèse, travaillent les annales d’épreuves des années précédentes et parfois passent des concours blancs.
Investissement conséquent
Ces prépas peuvent représenter un investissement financier considérable. Le prix moyen d’une année de formation est d’environ 3 000 euros par an. Certaines formations bon marché démarrent à 800 euros mais ce coût peut s’envoler jusqu’à 6 200 euros à Medisup Grenoble ou 6 900 euros à Sup santé et Sup social à Lyon et jusqu’à près de 17 000 euros – tarif exceptionnel relevé par l’ANEMF – pour un étudiant qui suivrait tous les enseignements proposés Medisciences à Nice.
Beaucoup d’écuries sont nationales, comme Medisup ou le Cours Galien, que l’on retrouve dans plusieurs facultés de l’Hexagone avec à leur tête des patrons de groupes financiers. Mais il existe aussi de nombreuses officines locales, parfois confidentielles. « Tout le monde et n’importe qui peut monter une prépa privée, observe Mathieu Levaillant, président de l’ANEMF. Il n’y a aucune obligation de montrer des diplômes ». Ces établissements d’enseignement privés doivent simplement être déclarés auprès du rectorat. Le marché des prépas est juteux puisqu’il représenterait entre 120 et 150 millions d’euros par an.
Résultats incertains
Pour rivaliser et convaincre, les prépas revendiquent le plus souvent d’excellents résultats.
L’écurie Medisup se targue sur son site Internet d’un taux de réussite oscillant entre 46 % et 51 % de ses « poulains » dans les facs parisiennes. Mais aucune étude sérieuse indépendante n’a été menée récemment sur les critères de succès en première année de médecine. Une enquête réalisée en 2005 à Paris V auprès de plus de 400 étudiants avait relevé deux facteurs significatifs de réussite : le résultat au baccalauréat (la mention obtenue) et le redoublement de la P1. « Le fait de suivre des cours parallèles n’apporte pas d’augmentation des chances de réussite », concluait l’étude.
Faut-il, dès lors, encadrer leur activité ? « Auprès des pouvoirs publics, ce sujet est tabou, explique Mathieu Levaillant. La réelle avancée serait de supprimer les prépas privées et d’encourager le tutorat. » Pas si simple, rétorque-t-on au ministère de la Santé. « On ne voit pas comment réglementer les prépas privées ni comment on pourrait empêcher les étudiants d’y aller, nous confie-t-on dans l’entourage de Marisol Touraine. Cette habitude qu’ont prise les étudiants et leurs parents risquent d’être longue à défaire. La seule façon de supprimer les prépas privées serait de supprimer le numerus clausus... mais ce n’est pas à l’ordre du jour. »
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