LE QUOTIDIEN : Avant de vous engager en politique, vous avez été praticien hospitalier puis directeur du pôle de médecine d'urgence du centre hospitalier de Mulhouse. Votre formation médicale va-t-elle influer sur votre action politique ?
Dr JEAN ROTTNER : L’État nous délègue de plus en plus de compétences pour l’aménagement du territoire, et je pense que nous devrions nous montrer plus audacieux en matière de santé. La région détient plusieurs leviers pour cela, notamment la formation professionnelle, l’innovation et la recherche. Je m’occupe depuis plusieurs années de l’aménagement du territoire au sein de l’ancienne région Alsace et maintenant du Grand Est. J'y vois la possibilité d’engager des actions en matière de santé. Le Grand Est investit 2 milliards d’euros pour généraliser le très haut débit sur tout son territoire. Nous serons d'ailleurs la première région totalement couverte par le très haut débit. Grâce à cela, il sera possible de pratiquer la télémédecine et la télésurveillance partout, y compris dans les plus petits hameaux.
Êtes-vous favorable, comme le font certains pays européens, à une implication accrue des régions dans l’organisation de la politique de santé ?
Mille cinq cents généralistes prendront leur retraite dans les 10 départements du Grand Est d’ici à 5 ans et je pense que la région doit se mobiliser plus fortement face aux difficultés démographiques, qui s’aggravent partout. Je regrette que les régions ne jouent pas un rôle plus décentralisé dans ce domaine. Ici, la région participe déjà au financement de la maison de santé de Mulhouse-Bourtzwiller à travers un plan État-Région, et je souhaite la voir s’engager plus activement dans d’autres programmes du même type.
Les collectivités territoriales sont les mieux placées pour évaluer les besoins de terrain : il y a 234 habitants au kilomètre carré dans le Bas-Rhin et 29 en Haute-Marne, et les problèmes ne sont donc pas les mêmes. Je serais donc favorable à l’instauration d’un numerus clausus régional dès les études, parce que les besoins sanitaires de la population, et les besoins en futurs médecins, sont différents selon les régions. Par contre, je ne vois pas les régions prendre en charge le financement de la santé, comme le font certains pays, car ce n’est pas dans l’esprit français.
La région Grand Est, qui réunit Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne, est très disparate. Vous vous êtes souvent montré critique sur la réunion des trois régions antérieures. Quelle sera votre position maintenant que vous la présidez ?
La loi a été votée, nous sommes des républicains et nous l’appliquerons le mieux possible. Il faut un débat serein autour de l’avenir de la région. Je ne souhaite pas l’animer mais plutôt trouver des solutions.
En ce qui concerne les structures de santé dans la région, il y a effectivement de fortes différences, mais les besoins sont couverts et les urgences assurées. Il y a des zones difficiles mais pas de déserts. Je reste avant tout un élu local, et je pense que les collectivités locales devraient être plus impliquées dans des questions comme celles des regroupements hospitaliers, car nous sommes les interlocuteurs de la population. Je plaide pour des collaborations renforcées entre l’État et les collectivités en s’affranchissant du centralisme parisien. Les déclarations de la ministre de la Santé sur le report du tiers payant marquent d’ailleurs un retour au réalisme, et je m’en félicite.
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