Il y a encore du pain sur la planche. Au récent séminaire de la conférence des doyens qui a réuni à Lyon plus d'une centaine de participants (internes, enseignants, hospitalo-universitaires, ordinaux…), l'heure n'était plus aux pistes mais à l'écriture d'une feuille de route pour réformer le troisième cycle des études médicales. Il y a urgence car cette refonte pilotée par le Pr Benoît Schlemmer doit entrer en vigueur à la rentrée 2017. « À l’issue de cette journée, il nous faut des points de sortie », avait prévenu le Pr Jean-Luc Dubois-Randé, président de la conférence des doyens. Force est de constater qu'un an et demi avant cette profonde refonte, les universités ne sont pas prêtes. Tour d'horizon des sujets qui coincent.
La simulation numérique, casse-tête financier
La ministre de la Santé a annoncé en fin d'année dernière que tous les CHU devraient être équipés d'un centre de simulation en santé d'ici à 2017 pour former les futurs médecins. Après la polémique sur des touchers pelviens effectués sans consentement sur des patients endormis, l'apprentissage des examens des parties intimes sera réalisé sur des mannequins. Plus qu'une priorité dans la réforme, la simulation numérique est « une exigence pédagogique et sociétale », confirme le Pr Schlemmer. « Il y a une urgence absolue », martèle le Pr Luc Mouthon, président de l'assemblée des collèges des enseignants de médecine. Mais le coût élevé des structures et des outils inquiète. « Un mannequin haute-fidélité coûte 100 000 euros mais il est indispensable pour les examens intimes et sensibles », réagit le responsable du projet lyonnais SAMSEI (Stratégies d’apprentissage des métiers de santé en environnement immersif). Qui assumera ces frais ?
La formation en ambulatoire confrontée au manque de maîtres de stage
La réforme du 3e cycle doit permettre de renforcer la formation en ambulatoire. Les internes de médecine générale souhaitent que la moitié de leur cursus soit réalisée en ambulatoire. « Il faut rendre obligatoire un SASPAS (stage en autonomie supervisé, NDLR) et un stage au pôle mère-enfant. Certains internes découvrent ce pôle dans des services de réanimation néonatale à l'hôpital, ce n'est pas cohérent », lâche Yves-Marie Vincent, président de l'ISNAR-IMG. Or, en 2014-2015, seulement un interne sur deux s'est vu proposer un SASPAS et seuls 470 postes ambulatoires ont été ouverts pour le pôle femme-enfant. Le manque de maîtres de stage complique la tâche. Selon une enquête du Syndicat national des enseignants de médecine générale publiée fin 2015, 7 863 maîtres de stage sont en activité dont un peu plus de 7 000 encadrent des étudiants en DES de médecine générale. Il faudrait qu'ils soient beaucoup plus nombreux encore pour accentuer l'apprentissage en cabinet de ville. Une perspective que les hospitaliers ne voient pas d'un bon œil, craignant à terme une perte de main-d’œuvre dans leurs services. « Décloisonner oui, mais il ne faut pas tout cloisonner à l'ambulatoire ou à l'hôpital », prévient le Dr Thierry Godeau, président de la conférence des présidents de CME des CH. Autre difficulté sur laquelle il faudra trancher : les enseignants souhaitent que le DES de médecine générale soit porté de 3 à 4 ans, ce que refusent catégoriquement les internes.
La difficile évaluation des compétences des internes
Les acteurs de la formation souhaitent renforcer les évaluations des internes pendant leurs stages. « Il faut un suivi plus régulier des étudiants », demande Baptiste Boukebous, président de l'Intersyndicat national des internes. Pour y arriver, la responsabilité de l'ensemble des intervenants (responsable des structures du stage, maître de stage, coordonnateur de la discipline, doyen, commission pédagogique) devra être redéfinie. Selon le Dr Laurence Compagnon, responsable de la commission pédagogique du DES médecine générale en Ile-de-France, le coordinateur gère trop d’étudiants dans les grandes subdivisions. Elle propose plusieurs évaluations de la formation à des moments clés du cursus ainsi qu'une évaluation du tuteur suivant le cursus de l'interne. Un portfolio numérique, dont les modalités doivent être précisées, permettra de suivre l'acquisition des compétences propres à chaque spécialité.
Quel statut pour les médecins engagés dans un second DES ?
Prévue dans la loi santé, l'obtention d'un second DES après « probablement cinq ans d'exercice » sera désormais possible. Il permettra à des praticiens de passer d'une spécialité à une autre seulement entre des disciplines ayant des parentés. Toutefois, les modalités de cette évolution demeurent floues. Faut-il se baser sur la formation initiale et l'expérience professionnelle ou définir un référentiel ? Le statut de ces médecins ayant quitté l'internat pose également problème. « Ils ne peuvent pas revenir avec le salaire d'un interne », précise le Pr Schlemmer.
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