L'information a été confirmée par Olivier Véran aux étudiants et aux enseignants, à la veille des assises de la santé mentale : l'internat de psychiatrie passera de quatre à cinq ans, et ce dès novembre 2022 pour la nouvelle promo d'internes.
La maquette new look entend proposer une formation plus « diversifiée » permettant aux juniors de « découvrir l’ensemble des enjeux de la discipline au travers d'options précoces ». Deux options enrichissent le cursus : périnatalité et psychiatrie légale. Les stages s'ouvrent aux cabinets de ville, la formation aux psychothérapies sera approfondie.
Même si elle était dans les tuyaux, l'annonce a surpris certains étudiants, à l'instar de Franck, interne en deuxième année. « Je ne vois pas forcément cette évolution d’un bon œil car l’internat est déjà long ! J’ai l’impression d’une course à l‘échalote vers quelle spécialité aura les plus longues études », ironise-t-il.
Compromis
La nouvelle maquette du DES en psychiatrie émane en réalité d'un compromis autour d'une querelle de chapelle entre psychiatrie de l’adulte et de l’enfant. « Initialement, les discussions portaient sur une séparation nette des DES en psychiatrie de l’enfant et de l’adulte, ce qui aurait été catastrophique, raconte Marine Gilsanz, présidente de l’Association française fédérative des étudiants en psychiatrie (Affep). Nous avons concédé cette année supplémentaire pour éviter cela. »
Au cœur de la controverse : un internat jugé pas assez formateur pour les étudiants attirés par la pédopsychiatrie. « Seul un stage de six mois était obligatoire en psychiatrie de l'enfant, c'est peu, confirme le Pr Olivier Bonnot (CHU de Nantes), secrétaire général du Collège national des universitaires de psychiatrie (CNUP). Et si les internes choisissaient cette option, il leur était impossible de faire une formation transversale, en addictologie ou sommeil par exemple. »
Moins d'hospitalocentrisme
À l'heure où d'autres pays européens ont fait le choix de deux spécialités séparées, le nouvel internat devrait donner davantage de place à la pédopsychiatrie. Les deux premières années seront divisées en deux stages de psy adulte et deux stages de psy de l’enfant, obligatoires. Soit un semestre supplémentaire pour expérimenter la pédopsychiatrie. « À l’issue de cette phase socle, l’interne devra choisir s’il s’oriente plutôt vers l’une ou l’autre », détaille le Pr Bonnot, qui juge cette évolution « assez exaltante ». Durant la suite du cursus, les jeunes pourront bénéficier de deux options supplémentaires : périnatalité et psychiatrie légale. « Une demande forte des étudiants », se réjouit Marine Gilsanz.
Autre avancée : la possibilité pour les futurs psychiatres d’effectuer des stages en libéral. « Beaucoup d’entre nous choisiront d’exercer en ville et pourtant notre internat se cantonnait au milieu hospitalier », rappelle Franck. Enfin, les formations en psychothérapies – jusque-là assurées en majorité par des écoles privées – devront être renforcées.
Incertitudes sur l'encadrement
À l’instar d'autres DES, la cinquième année (de consolidation) se fera sous le statut de « docteur junior », qui n'a pas levé toutes les craintes, loin s'en faut. « Travailler une année de plus avec un tel salaire, ce n’est jamais une réjouissance », alerte Marine Gilsanz, qui espère « une vraie plus-value dans la formation ».
D'autres questions demeurent : il faudra adapter les terrains de stage, trouver les encadrants universitaires indispensables. « Il faudrait tripler le nombre d’universitaires en psychiatrie, mettre des moyens supplémentaires, prévient le Pr Bonnot. Nous sommes en moyenne un professeur pour 25 étudiants, contre deux en cardiologie. »
La psychiatrie est jusque-là classée en queue de peloton des disciplines prisées par les internes. Cette année, 13 % des postes sont restés vacants à l’issue des ECN. Reste à savoir si ce nouveau DES contribuera à redorer le blason de cette spécialité.
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