Sous la pluie, plus d'un millier d'internes et d'externes remontés à bloc se sont donné rendez-vous, ce vendredi, à Paris, devant le ministère de la Santé. À l’appel des syndicats de jeunes – l’Intersyndicale nationale des internes (Isni), l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG) et l'association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) –, les juniors ont battu le pavé avec un seul mot d’ordre : « la coercition, c'est non ! »
Ils demandent le retrait immédiat de l’article 23 du PLFSS qui allonge d’un an l’internat de médecine générale, à effectuer « en priorité » dans les zones sous-denses.
À 14 heures, des bus entiers de carabins ont débarqué avenue de Ségur, alors qu’à Angers, Strasbourg, Lyon ou Tours, des rassemblements étaient également prévus dans la journée. Au total sur toute la France, 41 % des internes de médecine générale étaient en grève ce vendredi, selon un pointage de l’Isnar-IMG. « Braun t’es foutu, les internes sont dans la rue ! », ont scandé les juniors au pied du ministère.
« C’est la goutte d’eau »
« Médecins pas larbins ! », « génération sacrifiée », « les médecins c'est comme la confiture, moins t'en as, plus tu l'étales », pouvait-on lire sur les pancartes des juniors. Et dans le cortège, la sensation d’un « mépris » et d’une provocation de plus pour les internes. « C’est la goutte d’eau », souffle Mélanie, interne en médecine générale, venue de Dijon pour l’occasion. « On nous a applaudis pendant le Covid, et là, on a la sensation qu’on nous crache dessus », témoigne-t-elle, alors que les jeunes craignent que cette 4e année ne se transforme en remplacement déguisé. « C’est pour combler les trous », confirme Amélie, interne dijonnaise, qui ne « voit pas comment il y aura assez de terrains de stage ».
Même sentiment de mépris du côté des leaders des syndicats d'internes. « Ça fait des années qu’on demande à être écoutés, et là on nous dit qu'en plus, on n'aura pas le droit d’être heureux », scande Olivia Fraigneau, présidente de l'Isni, devant la fenêtre de François Braun. « Cette 4e année est faite sans projet pédagogique, vous nous mettez à mal financièrement et psychologiquement en nous envoyant seuls dans les déserts médicaux, avec une rémunération dérisoire », abonde Raphaël Presneau, président de l’Isnar-IMG. « Nous refusons d'être de simples pions qu'on déplacerait sur le territoire, au bon vouloir des politiques », ajoute-t-il.
Les deux syndicats craignent à terme que la réforme n'entraîne une baisse de l’attractivité de la filière généraliste, voire des départs d'étudiants pour l'étranger.
« Nous avons peur pour nos études »
Descendue de Lille pour « soutenir les internes », Lola, étudiante en médecine de premier cycle, dénonce des réformes « bâclées ». « Nous avons peur pour nos études, mais aussi pour l’état du système de santé dans lequel nous allons travailler à l’avenir », craint-elle. Alors que l'étudiante lilloise souhaitait initialement s’orienter vers la médecine générale, Lola avoue aujourd'hui que l’ajout d’une 4e année pourrait être « un frein ».
En début d’après-midi, les jeunes ont pris le chemin du jardin du Luxembourg. Les séniors – libéraux et hospitaliers – soutenaient le mouvement comme un seul homme mais n’étaient pas présents à la manifestation, hormis le syndicat de jeunes généralistes Reagjir.
Comme une traînée de poudre
Peu avant la manif', le Conseil national de l’Ordre des médecins s'était prononcé pour une 4e année mais « de professionnalisation » et « en aucun cas comme une réponse rapide aux difficultés d’accès aux soins ».
Ce vendredi, l’Isnar, l’Isni et l'Anemf ont été reçus par le cabinet de François Braun. Depuis plusieurs jours, la majorité se défend de toute coercition et explique que cette 4e année sera mise en place dans les zones sous-denses, uniquement s’il y a des maîtres de stages.
Dans une interview publiée dans « Libération » ce 14 octobre, François Braun a regretté que ce conflit soit « parti comme une traînée de poudre sur un malentendu ».
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