« Vous êtes étudiants en médecine et souhaitez bénéficier d'une bourse de 700 euros par mois pour financer vos études ? En contrepartie, vous êtes prêts à vous engager à vous installer pendant au moins cinq ans une fois votre diplôme obtenu ? Envoyez-nous votre candidature par courrier recommandé. » Voici le type de message que devrait bientôt diffuser la ville de Sorgues (Vaucluse) aux carabins dans l'objectif de recruter de futurs médecins. « Nous préparons une communication très ciblée visant à la fois les associations étudiantes et les facultés de médecine, confie Thierry Lagneau, maire de la commune de 19 200 habitants. L'idée est de financer les études de deux étudiants à partir de leur troisième année. Cette aide est assortie d'une obligation d'installation de cinq ans sur le territoire une fois le diplôme obtenu. »
Investir sur l'avenir
Votée début novembre par le conseil municipal, cette opération séduction soulève beaucoup d'espoir. De fait, si cette zone n'est pas répertoriée à ce jour comme un désert médical par l'agence régionale de santé (ARS), la tendance pourrait s'inverser. « La situation n'est pas encore catastrophique mais elle pourrait le devenir, alerte l'édile. Nous avons dix médecins en exercice sur le territoire dont deux qui partiront à la retraite dans les deux ans. Et un troisième doit partir d'ici à la fin de l'année pour une reconversion professionnelle ». Dans ce contexte fragile, le maire a préféré anticiper. Il n'en est d'ailleurs pas à son coup d'essai. « Nous avions déjà proposé la gratuité du loyer des cabinets pendant un an pour les médecins qui accepteraient de s'installer à la maison de santé de Sorgues mais on s'est rendu compte que la mesure n'était pas suffisante. Le champ concurrentiel est très fort… », constate-t-il.
Cette opération de la dernière chance se veut « moins ordinaire » et plus ambitieuse. « C'est une aide financière qui n'est pas négligeable ; à l'année, cela représente 8 400 euros par étudiant », concède l'édile. Selon la spécialité choisie par les étudiants, cette opération pourrait coûter jusqu'à 100 000 euros à la commune. Mais le maire refuse de parler de fonds perdus. « Je considère plutôt qu'avec ces deux bourses, on investit sur l'avenir ! Je veux croire que des étudiants se manifesteront et qu'ils auront plus tard l'envie de rester chez nous. Je suis aussi plein d'humilité car je ne sais pas si nous recevrons des candidatures. »
Logement à prix symbolique
Dans la Sarthe, ce coup de pouce financier prend la forme d'un logement à prix imbattable proposé aux internes. Le 20 octobre, le département a ainsi inauguré la Ruche, bâtiment d'une superficie habitable de 2 325 m2 localisé en plein cœur de ville et pouvant accueillir 120 internes des filières santé, à proximité des lieux de stage et des transports en commun. « Nous savons que les jeunes générations ne veulent plus travailler de manière isolée, explique Jean-Carles Grelier, vice-président de la commission santé du conseil départemental, député (Renaissance) de la Sarthe. L'idée est de rassembler dans un même lieu les futurs médecins, dentistes, infirmiers ou kinés pour qu'ils créent du lien dès le stade de leurs études. » Les 117 logements diversifiés – dotés d'espaces de coworking, de restauration et d'un local vélo – sont proposés à des prix défiant toute concurrence. « Selon les superficies, cela varie de 0 à 150 euros. C'est un prix symbolique, avance l'élu. L'idée est de ne pas ajouter une charge aux internes alors qu'ils disposent en général déjà d'un logement dans leur ville étudiante. »
Avec cette maison des internes, Jean-Carles Grelier fait lui aussi un pari. « Plus nous aidons les internes, plus nous avons la certitude qu'ils viendront s'installer dans notre territoire, assure le député, investi de longue date sur les questions de démographie médicale. L'idée est qu'ils prennent goût à la Sarthe au travers des infrastructures médicales et paramédicales que nous proposons et grâce au réseau professionnel créé », confie l'élu local, qui juge ce type de dispositif « plus efficace que les aides financières liées à un engagement moral ». Pour ce projet, le département a financé le campus des internes – dont fait partie la Ruche – à hauteur de 1,5 million d'euros.
« Si l'étudiant parle de son stage, c'est gagné »
Avec le début des nouveaux stages d'internat début novembre, de nombreuses mairies et collectivités proposent des logements équipés destinés aux internes pendant leur stage de six mois.
C'est le cas à Albi et Castres (Tarn), aux Herbiers (Vendée) ou encore à Montélimar (Drôme) où l'agglomération, le département et la CPTS Portes-de-Provence ont mis à disposition deux logements fraîchement rénovés au prix de 150 euros par mois à deux internes de médecine générale. « Ces deux appartements situés au sein de la maison des internes ont été meublés spécifiquement. Ils sont localisés en plein cœur de ville, ce qui permet aux étudiants en stage d'avoir accès à toutes les commodités et les loisirs », s'enthousiasme Julien Cornillet, président de Montélimar-Agglomération. L'élu ne s'en cache pas, « l'idée, sans attendre un quelconque retour de l'interne, est de donner une image positive de la ville. Si l'étudiant parle [en bien] de son stage autour de lui, cela participe à rendre le territoire plus attractif et c'est gagné ! ».
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