LE QUOTIDIEN : De premières propositions ont été faites par l’Assurance-maladie dans le cadre des négociations conventionnelles. Sont-elles à la hauteur de vos attentes ?
Dr RAPHAËL DACHICOURT : Absolument pas. L’Assurance-maladie propose une revalorisation du tarif de la consultation de base à 30 euros. Mais les contreparties collectives requises (augmentation de la patientèle médecin traitant, de la file active et augmentation de la participation aux gardes) ne vont pas dans le bon sens. Cela nous pousse à augmenter la cadence alors que l’enjeu est de pouvoir prendre davantage de temps pour mieux soigner nos patients. Dans ces conditions, cette majoration de la consultation ne peut pas être considérée comme un véritable rattrapage de l’inflation.
Et en ce qui concerne le début d’exercice ?
Nous attendions une reconnaissance et une revalorisation du statut de collaborateur libéral – statut de plus en plus prisé par les jeunes médecins favorisant d’ailleurs les installations – mais l’Assurance-maladie n’a encore rien mis sur la table. S’agissant des aides à l’installation, celles proposées ne sont clairement pas à la hauteur des enjeux. Le conventionnement des remplaçants – mesure portée par Reagjir depuis de nombreuses années – n’est, lui, plus du tout à l’ordre du jour. Le seul sujet qui cristallise toutes les tensions est celui des médecins installés. Les jeunes n’ont pas leur mot à dire dans ces négociations. Pourtant, il ne faut pas oublier que les remplaçants représentent 5 % des médecins toutes spécialités confondues et 10 % des généralistes. Ils participent d’ailleurs de manière active à la continuité des soins.
Pourquoi le conventionnement des remplaçants est si important ?
Il est primordial d’offrir aux remplaçants un accès aux mêmes droits sociaux et à la même protection que les médecins installés. Il est d’ailleurs inacceptable que ce ne soit pas déjà le cas. Par ailleurs, alors que la part des forfaits dans la rémunération des médecins progresse — et se situe aux alentours de 15 % pour les généralistes — les remplaçants en sont toujours exclus [ils ne bénéficient pas de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) ni du forfait patientèle médecin traitant (FPMT), que la Cnam veut réformer, NDLR]. On ne demande pas que le remplaçant perçoive le FPMT, ça n’aurait pas de sens car il n’assure pas le même suivi et n’a pas le même rôle. Mais on pourrait envisager de créer une forme de rémunération sur objectif de service public pour valoriser le rôle du remplaçant quand il s’engage à remplacer en zone sous-dotée, participe à la permanence des soins, etc.
La revalorisation de ce statut ne risque-t-il pas de dissuader les jeunes de s’installer ?
C’est un des arguments de l’Assurance-maladie. Mais dire que rendre « attractif » le statut de remplaçant va dissuader les jeunes de s’installer est un fantasme. Il faudrait déjà rendre ce statut acceptable. Peut-être que la solution pour favoriser les installations est de rendre le statut d’installé plus attractif et non pas de précariser le statut de remplaçant.
Avez-vous pu rencontrer la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, et son ministre délégué, Frédéric Valletoux ?
Malgré nos sollicitations, pas du tout. Pourtant, nous avons appris que l’ensemble des syndicats libéraux ont été auditionnés la semaine dernière pour évoquer les négociations. Nous sommes toujours aussi surpris de voir que les jeunes sont mis de côté. Le manque de considération et d’écoute est criant. La lettre de cadrage précisait pourtant la nécessité de rendre la prochaine convention attractive pour les jeunes. Nous attendons toujours d’être reçus. L’ensemble des syndicats jeunes a des propositions concrètes à mettre sur la table.
Vous organisez votre congrès annuel les 30 et 31 mai à Angers. Quel en est le thème ?
« Santé et travail : enjeu sociétal ». Nous voulons montrer que le travail et la santé sont étroitement connectés. D’ailleurs, cette thématique est encore plus d’actualité avec la nomination d’un ministre unique pour le travail, la santé et les solidarités. L’idée est née dans la foulée des débats sur les arrêts de travail, qui ont beaucoup agité les discussions autour du budget de la Sécu 2024 (PLFSS). Dans ce contexte, il nous a semblé pertinent de proposer, lors de nos rencontres, des tables rondes pour aider les médecins à avoir les bonnes clés de compréhension. Bien souvent, les généralistes peuvent être démunis sur les questions d’accompagnement au travail. Des glissements de tâches avec les médecins du travail peuvent aussi s’opérer. Nous aborderons aussi la question de la santé des soignants et bien d’autres sujets susceptibles d’intéresser les remplaçants.
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