Les règles du jeu de l'obtention de la licence de remplacement chez les internes, délivrées par l'Ordre des médecins, vont-elle provoquer une querelle médicale ?
Depuis l'été 2018, l'Ordre, les représentants des internes (ISNI et ISNAR-IMG), les enseignants ainsi que les conseils nationaux professionnels (CNP) de spécialité s'attellent à une révision des modalités d'accès au remplacement étudiant.
Réforme du troisième cycle oblige, l'introduction de 14 nouveaux diplômes d'études spécialisées (DES) et la nouvelle architecture des maquettes de formation en trois phases (socle, approfondissement, consolidation) changent la donne.
Quel niveau d'études faudra-t-il justifier pour obtenir la fameuse licence ? Le régime du remplacement étudiant est défini dans le code de la santé publique. Un interne de médecine générale par exemple a le droit de remplacer après trois semestres validés dont un stage chez le praticien de niveau 1. Les autres spécialités doivent attendre en moyenne la validation de cinq semestres (avec des spécificités par DES) pour prétendre au remplacement.
Inégalités
Dans les discussions actuelles, il y a deux écoles.
D'un côté, l'Ordre se positionne pour une délivrance plus tardive de la licence de remplacement, à partir de la phase de consolidation du troisième cycle (phase 3 d'autonomie supervisée) correspondant à la validation de 6 ou 8 semestres selon les spécialités. Pour l'instance ordinale, ce temps d'apprentissage supplémentaire est précieux avant de prétendre au remplacement. Les internes « auraient fini les deux premiers blocs (socle et approfondissement) et acquis un ensemble de compétences dans leur champ d'activité professionnelle », explique au « Quotidien » le Pr Robert Nicodeme, président de la section formation et compétences médicales à l'Ordre national.
Le Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR) plaide également pour un recul – après un 5e semestre validé en médecine générale. « Nous proposons que la licence de remplacement ne puisse être obtenue qu'après la validation du stage de niveau 2, le SASPAS [Stage ambulatoire en soins primaires en autonomie supervisée, N.D.L.R.]. Cette mesure permettrait de garantir la pleine capacité de l'interne à assumer seule la responsabilité des actes qu'il réalise au cours de son remplacement », confie le Dr Yannick Schmitt, président de la structure.
Mais repousser l'obtention de la licence de remplacement ne va pas de soi. Ce schéma pourrait être source d'inégalités entre spécialités. « Ce seraient des règles plus contraignantes que par le passé, juge le Pr Benoît Schlemmer, pilote de la réforme du troisième cycle. Les spécialités chirurgicales attendraient 4 ans, et les spécialités médicales entre trois et quatre ». Autre difficulté, il n'existe pas de phase de consolidation dans la maquette actuelle du DES de médecine générale.
Des avantages à remplacer tôt
Les internes, eux, ne partagent pas la vision de leurs aînés. « Nous préférons maintenir les modalités actuelles, en milieu du cursus, qui permettent de valoriser très tôt les compétences acquises durant les stages », défend Antoine Reydellet, président de l'ISNI.
De fait, le remplacement offre plusieurs avantages aux jeunes. « Ça permet de découvrir un territoire et d'affiner un projet d'installation, explique-t-il. C'est aussi un moyen de subsistance dans le cas d'une interruption transitoire de l'internat pour une année de master ou de recherche non-financée ». Sans que compter que l'octroi plus tardif de la licence pourrait affecter l'accès aux soins. « Accorder le remplacement tardivement, c'est se priver d'un effectif potentiel de 8 500 jeunes sur le terrain », argumente le chef de file des internes.
Même si seule une minorité d'internes saute le pas du remplacement, l'expérience est souvent gratifiante. « Ceux qui y vont sont prêts », souligne Lucie Garcin, présidente des internes de médecine générale de l'ISNAR-IMG, qui penche pour le maintien du système actuel. « Lorsqu'ils remplacent, la plupart des internes vont chez leurs anciens maîtres de stage, de manière ponctuelle pour les congés par exemple », poursuit-elle.
Le chapitre n'est pas clos. En attendant, les règles actuelles s'appliqueront aux internes entrant dans un nouveau semestre au 1er mai 2019.
« L’accès au secteur 2 pour tous, meilleur moyen de préserver la convention », juge la nouvelle présidente de Jeunes Médecins
Jeu concours
Internes et jeunes généralistes, gagnez votre place pour le congrès CMGF 2025 et un abonnement au Quotidien !
« Non à une réforme bâclée » : grève des internes le 29 janvier contre la 4e année de médecine générale
Suspension de l’interne de Tours condamné pour agressions sexuelles : décision fin novembre