Lors d’une consultation dans le box des urgences, quand je me présente comme « interne », le patient me rétorque : « Mais interne ça veut dire quoi au juste ? Vous êtes médecin ou pas ? » Et moi de balbutier : « Oui, je suis médecin, mais encore en formation. Vous verrez probablement un de mes chefs ou un médecin senior tout à l’heure. » Malgré « l’effet blouse blanche », pas évident de s’affirmer face au patient lorsqu’on est jeune interne.
Il m’apparaît encore plus difficile de se positionner au sein de l’équipe médicale et paramédicale. S’imposer ? Non, je n’ai pas assez d’expérience (ni de confiance en moi d’ailleurs !). S’effacer ? Non plus, il est nécessaire de prendre des décisions pour progresser.
J’ai ainsi commencé mon stage aux urgences avec l’appréhension des relations avec les collègues. Aller travailler avec la perspective de passer un bon moment avec eux, c’est important ! Heureusement, les praticiens du service nous ont immédiatement rassurés sur leur encadrement et nous ont accueillis à bras ouverts. Des liens confraternels voire amicaux se sont tissés.
Certains médecins forment avec plaisir et beaucoup de pédagogie. D’autres, moins à l’aise sur ce plan, ont le mérite d’être disponibles. Certains sont meilleurs que d’autres dans leurs diagnostics et leur prise en charge. Armée de ces constats, j’essaie d’apprendre au maximum au contact des seniors, sur le plan médical et relationnel.
Oser les questions
Une amie interne en pédiatrie m’a avoué qu’elle n’osait pas poser de questions. Surtout après avoir essuyé plusieurs remarques piquantes : « Si tu poses cette question, c’est que vraiment tu n’as rien compris. » Ou encore « prends une décision, on ne va pas te materner toute ta vie ». Je comprends que cela l’ait refroidie. Moi-même, ayant oublié une notion ou mal compris un raisonnement, poser une question éventuellement « bête » me terrifie. Mais nous sommes en formation, AUCUNE question n’est stupide.
Je m’efforce ainsi tout de même d’interroger les seniors. Nous avons besoin de l’expérience de nos pairs. Lorsque j’estime avoir eu une bonne réflexion, ou que je suis en désaccord avec mon senior, j’ose le lui dire. Le débat et le questionnement améliorent aussi bien la formation des internes que la remise en question des médecins expérimentés. J’ai déjà ainsi tellement appris en trois mois d’internat.
Retenir les noms des collègues
Je prends toutes les remarques comme des conseils. « Sois plus rapide », « Sois plus convaincante », « Impose-toi », « Laisse-moi respirer ». On ravale sa salive et on essaie d’être meilleure. Même mes chefs les plus exigeants ont su être rassurants ou compréhensifs quand il le fallait. Par exemple lorsqu’un patient agressif m’a mise à bout de nerfs, ou quand une migraine terrible m’a prise au milieu d’une garde. C’est cette juste balance entre soutien et exigence qui fera de nous de meilleurs médecins.
Le relationnel avec l’équipe paramédicale a été pour moi le plus compliqué. Le plus difficile, retenir les prénoms de tous les infirmier(es) et aide(s)-soignant(es). Sinon, les plus susceptibles peuvent vous pourrir la vie. Un casse-tête pour moi, véritable tête en l’air. Difficile aussi de leur demander une prise de sang ou un sondage lorsqu’on les voit débordés. Pourtant, il faut se faire entendre, pour le bien du patient. Alors je m’affirme de plus en plus, discute avec eux à propos des bilans, écoute leurs conseils avisés. Puis échange quelques mots et sourires quand le service retrouve un peu de calme.
La vie à l’hôpital, c’est un mélange de tensions, parfois de disputes, un partage d’émotions positives comme négatives, des souvenirs qui se créent lors de longues nuits de garde. Chaque semestre, l’interne change de service et doit tout recommencer à zéro. Mais nous sommes globalement tous d’accord sur un point primordial : avancer ensemble permet d’améliorer les soins pour le patient.
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